[ECOSSE] Où je crapahute beaucoup et me change souvent

Deux jours plus tard, le verdict est sans appel: je pense toujours au pull à torsades repéré avant-hier. Après une nuit au cours de laquelle j’ai encore dû prendre un Témesta vers 2h du matin, nous engloutissons notre full scottish breakfast, prenons congé de Leah et nous dirigeons donc vers le magasin House of Aran dont nous faisons l’ouverture. J’essaie le pull en S; Chouchou me donne un pouce levé; je vais à la caisse pour payer. Pendant ce temps, Chouchou commente qu’il adore la musique diffusée par le système audio – une cover à la cornemuse d’un vieux morceau de rock. Il demande ce que c’est au vendeur. Celui-ci lui répond « The Red Hot Chili Pipers » en désignant une pile de CD sur son comptoir. Chouchou en saisit un en s’écriant: « Achat compulsif! ». Je lui rappelle que nous n’avons plus de lecteur, juste un abonnement Spotify. Il repose le CD.

J’avais acheté des billets de train en ligne pour nous rendre à l’aéroport d’Inverness, où nous attend une voiture de location. Malheureusement, en arrivant à la gare, nous découvrons que notre train est annulé. Nous nous rabattons donc sur un bus. A l’agence Europcar, nous tombons sur un jeune agent sympathique qui nous suggère un upgrade par rapport au modèle déjà pas basique que nous avions choisi en ligne. Je suis tentée de refuser: si ça se trouve, il n’a plus notre catégorie de véhicule en stock, et il sera obligé de nous donner la plus grosse voiture au même prix. D’un autre côté, notre expérience précédente des Highlands nous a appris que mieux valait rouler avec le meilleur véhicule (et l’assurance la plus complète) qu’on peut s’offrir. Donc, va pour le supplément de £20 par jour, même si ça monte le total du coût de la voiture – une Kia sans même de boîte automatique… – à un ahurissant 800€ pour 3 jours sans l’essence.

Chouchou est un excellent conducteur. (Ce qui tombe bien, parce que je n’ai pas touché un volant depuis presque 10 ans et serais tout à fait incapable de rouler à gauche.) Néanmoins, ses nerfs sont mis à rude épreuve dans la première partie de notre périple, essentiellement composée de petites routes à double sens mais file unique. Au lieu des 35 minutes annoncées par le GPS, nous mettons une heure et quart à atteindre Carrbridge, et je commence à craindre d’avoir très mal évalué les étapes de ce mini-road trip.

De la petite ville de Carrbridge, nous ne verrons rien hormis le pont célèbre pour sa photogénie. Je n’avais encore jamais vu personne poser devant sur Instagram, et je comprends vite pourquoi: la configuration « officielle » des lieux ne s’y prête pas. Pour avoir un bon cliché, il faut quitter la plateforme d’observation, escalader des rochers et descendre jusqu’au bord de l’eau. C’est un peu sportif et visiblement pas fait pour, mais aucun panneau ne l’interdit, donc… La précieuse photo une fois réussie, nous pique-niquons de sandwichs en triangle dans la voiture et repartons aussitôt en direction de Huntly.

Cette fois, la route est meilleure, avec une grosse portion de nationale, et nous respectons le temps indiqué par le GPS. Au milieu de nulle part ou presque, nous atteignons enfin la fauconnerie locale au moment où tout un bus de scolaires en repart. Nous acquittons les £10 d’entrée par personne et nous retrouvons seuls pour la démonstration de 14h30. Kurt – le retraité bénévole qui se charge de l’animation en l’absence de John, le propriétaire des lieux – va tour à tour me chercher 3 oiseaux pour que je puisse les faire venir sur mon poing.

Toutefois, je suis très désarçonnée par les énormes différences que je constate avec le Jardin des Hiboux, en Belgique. D’abord, Kurt ne me laisse pas manipuler la nourriture ni appeler les oiseaux moi-même, ce que je trouve hyper-frustrant. Ensuite, il m’explique que John, actuellement parti donner un spectacle dans un château des environs avec plusieurs de ses rapaces, se livre à la reproduction en captivité pour vendre les petits à des particuliers qui les veulent comme animaux de compagnie, ou qui les utilisent pour faire des courses dans certains pays étrangers.

Bien que la pratique soit tout à fait légale au Royaume-Uni, j’avoue qu’elle me choque. Mais c’est sans doute de l’hypocrisie de la part d’une personne non-végane, qui accepte de manger et d’exploiter les animaux d’autres façons. Enfin, je suis attristée de voir que les oiseaux sont attachés à l’intérieur de leurs cages par ailleurs extrêmement spartiates. Le contraste avec le Jardin des Hiboux me fait vraiment mal pour eux. La conversation avec Kurt a été instructive, mais je me sens assez abattue lorsque nous repartons.

Troisième destination de la journée: le village côtier de Portsoy. Nous y passerons la nuit au Station Hotel, un hôtel familial à la déco un peu désuète et aux couloirs aussi étroits que tarabiscotés. Le temps de poser nos bagages dans la chambre et nous repartons explorer les environs. Sur le petit port, nous sommes surpris de trouver une sorte d’autel fleuri dédié à la mémoire d’un certain Michael Gray. Nous mettons quelques instants à réaliser qu’il s’agit d’un personnage de la série « Peaky Blinders » (que nous n’avons pas regardée), et que la scène de sa mort a justement été tournée ici.

Je n’avais pas repéré de resto particulier pour ce soir. Chouchou effectue une rapide recherche Google et suggère l’Aspire, installé depuis peu dans une ancienne église. Nous y faisons un repas absolument délicieux, servi par des jeunes filles encore maladroites mais pleines de bonne volonté. Les plats mettent beaucoup de temps à arriver, mais quel régal! En entrée, un cullen skink qui est l’un de mes plats écossais préférés. Puis des beignets de scampis pour Chouchou et pour moi, un risotto à la courgette qui se révèle très sophistiqué dans l’assaisonnement et les saveurs. Vraiment une excellente surprise, et pour un prix plus que correct.

A l’approche du coucher du soleil, nous reprenons la Kia pour nous diriger vers un autre spot photogénique voisin: celui de Bow Fiddle Rock. La descente abrupte, sablonneuse et glissante, jusqu’à la plage de galets n’est pas évidente du tout; trouver un bon point de vue l’est encore moins, et pendant que nous cherchons, la marée monte tandis que la lumière décline. Nous devons boucler notre shooting dans la précipitation. Ce fut une journée très bien remplie, au cours de laquelle je me suis changée pas moins de quatre fois!

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