[ECOSSE] Où je me perds dans un calme blanc

Comme hier, nous décidons de passer la matinée dans notre confortable appartement pour nous reposer et avancer dans le traitement de tout le contenu produit depuis le début du voyage. A l’approche de midi, nous nous aventurons dehors pour tester un autre restaurant recommandé par Gillian: le Padthai Hotpot and Grill. Chouchou se régale avec une entrée à base de poulet dont je n’ai pas noté le nom, suivie d’un Jew Yim beef. Je suis moins emballée par mon Pad Thai dont les nouilles sont trop cuites et les saveurs peu développées. Mais la dame qui nous sert est charmante et la salle très agréable, donc pas de regrets.

L’estomac lesté, nous nous dirigeons vers l’Aberdeen Arts Centre. Comme dans beaucoup d’autres musées écossais, l’accès est gratuit pour tous. Quand je pense au prix insensé de l’entrée dans la plupart des musées français ou belges, et au privilège que devient l’accès à la culture dans nos pays, je n’en aime que davantage l’Ecosse.

La particularité de l’Aberdeen Arts Centre, c’est de regrouper uniquement des oeuvres d’artistes originaires de la région, mais sans privilégier d’époque, de style ou de thème spécifique. On y trouve donc aussi bien des tableaux figuratifs hyper classiques que des installations modernes abstraites, et même une visiteuse aussi difficile que moi ne peut manquer de trouver des choses à son goût.

Je signale deux coups de coeur: une mosaïque de centaines de teintes de céramique, obtenues à partir d’un nombre très réduit de pigments, et le tableau « White Calm – Ailsa Craig from Port An Righ » de William McTaggart, un des principaux paysagistes écossais. Je suis absolument fascinée par cette toile; je crois que je pourrais m’y perdre pendant des heures. Sur-le-champ, la nouvelle mission de ma vie devient d’en trouver une reproduction décente à accrocher chez moi. Et d’explorer toute l’oeuvre de l’artiste.

Quant à Chouchou, bien que beaucoup de choses lui plaisent, il apprécie particulièrement le tableau « Flood in the Highlands » d’Edwin Landseer.

L’architecture du bâtiment lui-même est très réussie. Au dernier étage, on trouve un café et une librairie spécialisée qui regorge de pépites – étant limitée par le volume et le poids de mes bagages, je me contente de noter le titre de quelques ouvrages séduisants. Au rez-de-chaussée, une boutique pourtant bien fournie ne propose hélas aucune sérigraphie de « White Calm », ni le plus petit carnet ou magnet imprimé d’une reproduction, pas même une misérable carte postale. Je sens que la nouvelle mission de ma vie va se révéler plus compliquée que prévu.

Nous mettons ensuite le cap plein ouest, car je souhaite passer dans une papeterie qui vend des produits Roger Laborde. Je cherche depuis des mois déjà à me procurer ce carnet illustré par Jennifer Orkin Lewis… Malheureusement, la dame de Cloudyblue ne le vend pas.

Un peu plus haut dans cette rue boboïsante où se succèdent un minuscule salon de beauté entièrement rose, un fromager gourmet, un magasin de bonbons à l’ancienne et un autre de laines artisanales, je pousse la porte d’une épicerie de luxe qui vend le magazine Hidden Scotland. J’ai malheureusement dû cesser de commander ce dernier après que le Brexit en a plus que doublé le prix entre les frais de port et les frais de douane; aussi, je suis ravie de pouvoir acheter le numéro le plus récent (j’aurais bien pris tous ceux qui me manquent, mais chacun d’eux est à peine moins volumineux qu’un catalogue de La Redoute…). Au passage, j’admire les splendides étiquettes de bières locales en regrettant presque que ni Chouchou ni moi n’en buvions.

La suite du programme, a priori, c’est un afternoon tea dans un bon salon de thé qui se trouve encore à une dizaine de minutes de marche. Mais comme à peu près tous les établissements de ce type en Ecosse, il ferme à 16h, soit dans moins d’une heure. A regret, je conviens que ça ne vaut pas la peine de pousser jusque là. Nous rebroussons donc chemin jusqu’à un bar intrigant aperçu non loin de l’Aberdeen Arts Centre: le Slains Bar, installé dans une ancienne église – comme le restaurant de Portsoy et des tas d’autres établissements de bouche ou de boisson un peu partout en Ecosse. Un principe de recyclage qui ne peut que ravir une athée dans mon genre.

L’intérieur est décoré façon château de Dracula, avec notamment des toilettes dissimulées derrière des bibliothèques en trompe-l’oeil. Dommage pour les écrans plats qui diffusent des matchs: ça casse un peu l’ambiance! Au moins, la musique est sympa. Les cocktails, bien que ne brillant pas par leur originalité, sont très bon marché (£5.50) et portent les noms des péchés capitaux, des vertus cardinales ou des cavaliers de l’Apocalypse. J’hésite entre un Death et un Humility avant d’opter pour ce dernier.

En sortant, nous décidons de rentrer passer la soirée au calme, et nous mettons le cap sur le grand Marks & Spencer le plus proche pour y acheter des plats indiens à réchauffer. Je regrette de devoir quitter demain matin cet appartement si confortable pour déplacer tout notre barda à royalement 20 minutes de train, alors qu’on aurait pu rester une nuit de plus et reprendre le train depuis Aberdeen après-demain. Mais le dernier changement de plan à la dernière minute ne m’a guère réussi, donc, je me retiens de contacter Gillian pour lui demander si on peut prolonger. A la place, je me reproche ma mauvaise organisation pendant la moitié de la nuit au lieu de dormir.

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