[COPENHAGUE] Où je fais preuve d’une époustouflante absence de flair

 

C’est par élimination que nous avons décidé de passer les fêtes à Copenhague: j’ai voulu attendre le plus tard possible pour réserver, de crainte que la situation sanitaire n’évolue entre-temps. Lorsque nous nous sommes enfin décidés, nos destinations préférentielles (Lisbonne ou Porto) étaient devenues hors de prix, et nous n’osions pas tenter Edimburg qui se trouve désormais hors de l’Union Européenne. Nous nous sommes donc rabattus sur Copenhague, que nous connaissions pour l’avoir déjà visitée – et adorée – deux fois. Nous nous réjouissions d’avance de passer Noël au Tivoli. 

Trois jours plus tard, Omicron faisait son apparition dans les médias. Lundi dernier, il était devenu dominant au Danemark qui fermait toutes ses activités en intérieur, notamment les musées, et certaines activités en extérieur, dont le Tivoli. 

Moi et mon flair de compétition. 

J’avoue: j’ai hésité à tout annuler. Partir ne rien faire dans une ville où on se gèlerait les noix et dont on risquerait de revenir avec le Covid, bof bof. Mais nos réservations (plus de 1000€ entre l’avion et l’Airbnb) n’étaient pas remboursables; je me disais qu’hormis pendant le vol aller-retour, on ne prendrait guère de risques vu qu’on resterait en tête-à-tête une fois sur place, et que nous promener dans une ville photogénique serait toujours mieux que déprimer à l’appart de Bruxelles. Ce ne serait pas des vacances de rêve, mais le rêve, depuis deux ans… vous m’avez comprise. Cette pandémie aura au moins eu l’avantage de me rendre un poil plus philosophe et moins exigeante. 

Mercredi en début d’après-midi, donc, nous nous mettons en route pour l’aéroport de Zaventem. Je craignais qu’il grouille de monde; en fait, malgré une queue assez importante aux comptoirs de Brussels Airlines, tout est plutôt calme et le port du masque bien respecté. Je suis néanmoins étonnée que personne ne vérifie nos passes sanitaires: nous avons juste dû cocher une case au moment du checkin en ligne pour certifier que nous étions en règle de ce côté. Quand je fais remarquer à l’employée chargée de l’embarquement qu’on aurait très bien pu mentir, elle hausse les épaules et me dit qu’en cas de contrôle, on prendrait une amende. Et que la vérification des passes sanitaires prenait trop de temps, si bien que les compagnies aériennes l’ont vite laissée tomber. Je ne trouve pas ça rassurant, mais bref. 

Le vol se déroule sans incident. Au moment de débarquer, le chef de cabine prévient en trois langues que nous devons procéder rangée par rangée et rester assis jusqu’à ce que vienne le tour de la nôtre. Bien entendu, juste derrière nous, un vieux mec blanc se lève aussitôt. Une hôtesse s’approche pour lui répéter les consignes. Il se rassoit de très mauvaise grâce. Dès qu’elle s’est éloignée, il se relève, empoigne son bagage à main et fonce à l’avant de l’avion. Où il se retrouve coincé derrière les occupants des premiers rangs en train de rassembler leurs affaires. C’est un moment Michel Fugain. (« Je ne sais pas, je ne sais plus, je suis perdue ». Flap flap.)

Nous récupérons rapidement la valise que nous avions mise en soute, achetons un billet à un distributeur et allons prendre le métro 2 jusqu’à la station Forum. Nous en émergeons 17 minutes plus tard au milieu du quartier de Norrebro plongé dans l’obscurité. Même de jour, je soupçonne que ce n’est pas le coin le plus attrayant de la ville. J’achète des donuts au passage (dans une boutique dont la charmante vendeuse n’arbore même pas de masque sous le menton…), puis nous récupérons nos clés dans un 7-Eleven et finissons le trajet jusqu’à notre Airbnb. En chemin, nous croisons des jeunes qui se claquent la bise et se parlent à moins de 50 cm comme si on était en 2019. Beaucoup de décontraction locales vis-à-vis d’Omicron, apparemment. 

L’appartement Airbnb: odeur tenace de patchouli, bibliothèque bien fournie pleine d’ouvrages féministes, produits d’épicerie en vrac dans des bocaux de cuisine, ni télé ni machine à laver, lave-vaisselle en panne, salle de bain microscopique où on se douche au-dessus des toilettes et… matelas à ressorts atrocement mou. On se croirait sur un waterbed. Alors que j’ai choisi cet endroit en grande partie parce que sur Airbnb, les locataires précédents vantaient le lit « super confortable ». Je suis super énervée. Pour me calmer, j’installe nos affaires et je prépare un thé. Les deux filtres métalliques trouvés dans un tiroir sont rongés par la rouille, et la bouilloire d’une propreté douteuse. Dépitée, je dis à Chouchou: « On est tombés chez la frange babos des écolos féministes de gauche. » Et je me rends compte qu’il n’a pas fallu grand-chose pour me faire basculer dans la frange réac du groupe – juste des vertèbres fragilisées par l’âge et une solide allergie au patchouli. 

Par flemme de ressortir, nous cherchons à commander des pizzas. Il n’y a pas d’Uber Eats dans le coin, et tous les restos italiens semblent tenus par des Turcs. Nous finissons par nous rabattre sur une app locale du nom de Just Eat et des plats indiens qui se révèlent exceptionnellement médiocres, avec des nans qui ressemblent à des fougasses sans garniture. Joie: c’est si copieux qu’il nous en restera pour demain soir. Grmbl. Nous passons la fin de la soirée à préparer la journée de demain, puis allons nous coucher – Chouchou dans le lit de l’enfer et moi sur les coussins du canapé posé à même le sol de la chambre. Bonjour le romantisme. 

6 réflexions sur “[COPENHAGUE] Où je fais preuve d’une époustouflante absence de flair”

  1. Lidvine Charpentier

    Je vous envoie des ondes positives pour la suite à toi et chouchou, je pense que ça sera le bienvenu. Je croise les doigts très forts pour mon propre déplacement en France, on ne sait jamais avec nos "autorités". bises. Lidvine

  2. "Un vieux mec blanc"…??? Parce que les jeunes mecs "pas blancs" se tiennent tous bien ? Les vieux mecs blancs sont pas définition des connards? Mais où on va? Cette atmosphère devient irrespirable et il n'y a pas que les "racistes de droite" qui en sont responsables. On touche le fond et on creuse chaque jour davantage, quel que soit le "bord".

    1. Absolument ! Et il y a plein de nanas, jeunes, âgées, blanches, africaines, asiatiques, martiennes qui n’ont pas une once d’éducation, si si…
      Bonnes vacances quand même, il y a moyen de se plaindre à Airbnb pour le manque d’adéquation du logement.

      Michelle lectrice habituellement silencieuse

  3. Je rappelle à tous les gens heurtés par l’expression « un vieux mec blanc » que ce blog n’est pas une démocratie et que si iels n’apprécient pas ma manière de m’exprimer, iels sont libres d’aller lire autre chose, c’est pas comme si les contenus manquaient sur internet.

  4. Quant aux lecteurices qui ne se manifestent que pour critiquer: allez vous faire cuire le cul, merci.

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