Hier, en sortant du cinéma, j’ai fait quelques courses dans le quartier de la Bourse. J’avais envie d’une bédé, alors je suis entrée chez Brüsel. Sur la table des nouveautés, il y avait un album signé Zidrou, le scénariste de « Lydie » que j’avais adoré. Un des libraires avait collé un carton « Coup de coeur » sur la couverture. Je l’ai embarqué sans trop chercher à savoir de quoi ça parlait.
Et en fait, c’est l’histoire d’une jeune femme dont le père meurt (probablement d’un cancer, même si ça n’est jamais dit) sans qu’elle ait pu lui parler une dernière fois. Oh, bien sûr, c’est aussi l’histoire d’un secret qui a empoisonné la vie de toute une famille, mais ça, ça m’est passé un peu au-dessus de la tête, rapport au fait que je chialais pour la seconde fois de la journée en pensant à mon père.
Depuis quelques mois, j’ai l’impression que les pères morts sont partout, comme avant ça j’avais l’impression que le cancer était partout (je l’ai encore, d’ailleurs). Je me demande si je joue d’une malchance singulière dans mes choix culturels, ou si ça n’est que le reflet d’une réalité à laquelle j’étais restée aveugle jusque là, parce qu’elle ne me concernait pas encore. Mon gentil généraliste, à qui je m’ouvrais de cette impression tenace, m’a répondu que c’était comme si je venais d’acheter, disons, une Classe A: tout à coup, j’en verrais à tous les coins de rue, non parce qu’il y en aurait plus qu’avant, mais parce que j’y prêterais une attention nouvelle.
Autre explication possible: j’ai un instinct tout pourri.
Je ne pense pas que tu aies un instinct tout pourri. Simplement, tout nous ramène inévitablement au séisme que nos vies viennent de subir. Rien ne sera plus jamais comme avant et il nous faut du temps pour nous reconstruire et réapprendre à vivre avec l'absence et le manque. Alors, bien sûr, parfois il y a des rappels un peu plus directs et violents que d'autres… Moi, en ce moment, c'est plutôt indirect, j'ai arrêté de regarder Downton Abbey parce que j'en avais marre de me dire toutes les 5 secondes que ma mère aurait adoré et que, comme moi, elle aurait sûrement eu envie d'adopter Maggie Smith. En plus, elle adorait Shirley McLaine, alors ça m'a pas aidé non plus. Enfin bref. Il y a des jours avec et des jours sans.
Je t'embrasse fort.
Je crois que c'est parce à présent, la peine et les épreuves que ça représente sont beaucoup plus concrets. Il y a comme dit Isa des jours avec et des jours sans mais on y pense tous les jours, même plus de 10 ans après.
Il y a des études scientifiques phsycho-visuelles très sérieuses qui expliquent qu'à partir du moment où on a été sensibilisé à quelque chose, on le "voit" plus.
Ce quelque chose peut être une couleur, une thématique, un mouvement particulier, une attitude, etc. Genre tout à coup tu t'intéresses au vernis à ongle bleu et hop, dès qu'il y en a dans ton champ de vision, tu ne peux plus le rater, alors qu'avant tu ne le "voyais pas" même s'il était sous tes yeux.
Tu n'as donc pas un instinct tout pourri, mais des sens particulièrement attentifs, au cancer certes, mais aussi aux trucs en formes/au motif de renard, aux cheveux "ombrés" et/ou roses, etc.
Faut que je remette la main sur cette étude, c'était passionnant.
Quand j'étais enceinte, je voyais des handicapés mentaux partout..sauf que parfois c'était juste des bébés un peu moches 😉
Ton généraliste a raison.
Tu es concernée donc maintenant tu y prête plus attention. Mon père est décédé d'un cancer en 1994, depuis sa maladie, ce mot, cancer, non seulement je l'entend trop souvent mais j'y pense tout le temps alors qu'avant, non.
Je pourrais écrire plus mais je vais m'abstenir car même si bcp d'années sont passées, le sujet est toujours douloureux.
Mais ce qui est sûr c'est que tu n'es pas malchanceuse, tu as traversé, tu traverse, une période très dure et malheureusement, beaucoup de choses t'y ramène.
Courage….
Sophie
Peut-être qu'il faut que tu achètes une classe A comme ça tu verrais des voitures partout et plus des pères morts?
(tenterais n'importe quelle boutade maladroite et approximative pour ramener un sourire)
Ce qui est bien, c'est que ce réflexe fonctionne aussi avec les éléments marquants positifs de la vie, ça devrait donc s'équilibrer un peu à l'avenir.
Pensées et courage,
Ness
Bon courage.
Je ne saurais rien te dire d'autre, ni même que ça va aller mieux, je n'en sais rien. Je constate surtout que les décès ont souvent lieu en fin/début d'année.
Et depuis que j'ai lu tes poignants messages (et d'autres), je me projette dans des situations horribles où mes parents succombent aussi.
Bref, bon courage *hug*