[LISBONNE-SINTRA] Sur la piste du cabillaud perdu

Cette nuit, je me suis levée 11 fois pour faire pipi, et cogné les orteils deux fois contre un des pieds du lit en jurant bruyamment. J’ai enchaîné les bouffées de chaleur (un symptôme de périménopause qui m’avait plutôt épargnée jusque là, ce dont je me réjouissait) tout en court-circuitant les ruminations négatives. Et lorsque j’ai fini par m’endormir vers 6h du matin, j’ai rêvé que je revoyais un vieux pote de jeu de rôles et que je me plaignais d’être atrocement fatiguée. Moment auquel mon réveil a sonné. Soupir…

Autant dire que je ne suis pas fraîche du tout en me levant pour aller petit-déjeuner. Heureusement, le buffet du Mémoria FLH est aussi délicieux que le laissaient présager les gâteaux du goûter d’hier. En plus des grands classiques du buffet continental – viennoiseries, charcuterie, fromage, yaourt, salade de fruits… -, nous avons droit à des pastéis de nata et des mini-roulés aux saucisses qui tabassent. Un vrai repas qui nous tiendra largement toute la matinée. Je suis presque triste de quitter ce superbe hôtel après une nuit seulement, mais nos plans nous appellent à l’extérieur de Lisbonne pour la suite de ce séjour.

Après avoir fait notre checkout et confié nos bagages à la réception, nous nous dirigeons vers le quartier de l’Alfama. En arrivant au célèbre point de vue du Miradouro de Santa Luzia, très reconnaissable avec sa belle colonnade, je dis à Chouchou: « On est déjà venus ici en 2010. Même que juste après, on avait mangé un bacalhau fabuleux pour un prix dérisoire dans un petit resto qui ne payait pas de mine, de l’autre côté de la rue. » Chouchou: « Tu es sûre? Je n’en ai aucun souvenir. » Moi: « Sûre et certaine. »

Beaucoup d’autres gens attendent pour se prendre en photo devant le panorama de petites maisons blanches étagées en contrebas. Sur chaque colonne, une inscription en majuscules rouges se détache nettement: EMPTY-MINDED TOURIST. Fair enough. Ca sautera à Photoshop. On profite de notre passage pour trouver une géocache planquée dans le creux d’un arbre; puis on redescend vers la Praça do Comercio en suivant les rails du célèbre tram 28.

Aujourd’hui, pas de Moldus stationnés près de la borne anti-incendie repérée hier: nous loguons la géocache correspondante, ainsi qu’une autre située cent mètres plus loin devant le terminal maritime. En face, le Centro Interpretativo da Historia do Bacalhau (en gros, le Musée de la Morue) me fait de l’oeil depuis hier. Comme nous avons un peu de temps devant nous, j’y entraîne Chouchou.

Pour à peine 4€ chacun, nous nous marrons devant les tableaux classiques dont les sujets ont été remplacés par un cabillaud, et nous apprenons des tas de choses sur la véritable épopée qui commença à la fin du 15ème siècle dans le but d’approvisionner le Portugal en protéines. Aujourd’hui encore, alors que les populations de poissons déclinent à la vitesse grand V, le pays continue à consommer 20% de la production mondiale, et la morue est à un Noël local ce que la dinde est aux Noël américains.

Nous remontons la rua Augusta, en nous arrêtant quelques minutes pour écouter un chanteur de rue au coffre impressionnant en train d’interpréter « O sole mio ». Nous avons réservé pour ce midi à la Casa do Alentejo, un restaurant de spécialités portugaises installé dans une sorte de palais mauresque qui vaut le coup d’oeil. Je ne peux hélas pas en dire autant de mon plat de morue frite sur coussin de purée de pois chiche: le poisson est trop épais, pas assez cuit à mon goût, vaguement gluant et klaffi d’arêtes. Celui de Chouchou arrive dix bonnes minutes après le mien. De plus, il fait si froid dans la salle que je garde ma doudoune et mon écharpe pendant tout le repas. Ca ne se terminera pas en avis à 5 étoiles sur Trip Advisor.

Il est temps de repasser dans les deux magasins où nous avons trouvé porte close hier. La livraria Bertrand, qui existe depuis 1732, se revendique plus vieille librairie du monde encore en activité. Dès que nous y pénétrons, Chouchou s’écrie: « On est déjà venus ici; je t’ai photographiée dans cette enfilade d’arcades. » Moi: « Tu es sûr? Je n’en ai absolument aucun souvenir. » Lui: « Sûr et certain. » Bon, ben on va dire qu’à nous deux, on peut sans doute reconstituer 100% de nos voyages précédents. J’achète un roman anglais afin de récupérer un marque-page au nom de la librairie pour ma collection: malheureusement, ils n’en ont pas, mais la caissière propose de me mettre leur tampon sur la page de garde, comme chez Shakespeare & Co. Moui bon OK.

Arrêt suivant: A Vida Portuguesa, LA bonne adresse pour acheter de beaux produits locaux. (Ils ont aussi un immense magasin à Porto.) J’en ressors avec deux savons parfumés, une eau de toilette à la fleur d’oranger et un joli carnet à la couverture rétro. Nous retournons ensuite à l’hôtel récupérer nos bagages, faisons un saut aux toilettes pour piquer une tranche de bolo rei dans la salle à manger et remontons vers la gare de Lisboa Rossio. De là, moyennant 5€ chacun l’aller-retour, nous prenons un train pour Sintra, que nous atteignons au bout de 40 mn de trajet environ.

A la sortie de la gare, nous voulons prendre un taxi jusqu’à notre hébergement. Or, s’il y a bien des voitures stationnées le long du trottoir, leurs chauffeurs ne se trouvent nulle part en vue. Après avoir vainement attendu dix minutes, nous finissons par commander un Uber. La Villa Bela Vista ne se trouve qu’à un quart d’heure de marche selon Google Maps, mais nous sommes déjà venus ici et nous nous méfions des routes qui montent raide, surtout alors que nous charrions tous nos bagages.

Une fois de plus, j’ai été très inspirée en réservant ici. Nous avons droit à une mini-suite dotée d’un coin salon, d’une kitchenette, d’un lit king size, d’une grande salle de bain en marbre (avec le premier bidet que je vois depuis que mes parents ont vendu leur appartement en 2006) et surtout d’une immense terrasse avec une vue magnifique sur le reste de cette ville vallonnée.

Je suis absolument claquée, mais il faut encore ressortir pour dîner. La réceptionniste nous a donné une liste de restaurants sympas à proximité de la Villa. Pourtant, sur un coup de tête, nous nous posons à la Hamburgueira da Ferraria, découverte alors que nous explorions une ruelle étroite. Le serveur nous demande si nous voulons manger dehors ou dedans, et je réclame avec véhémence une table à l’intérieur… avant de changer d’avis comme le volume de la musique me met immédiatement en PLS.

Nous finissons sur la terrasse face au panorama, à côté d’un arbre aux branches encore chargées de fleurs rouge pâle. Et même s’il fait nuit, l’endroit a vraiment beaucoup de charme. Je commande un burger raisonnable avec une salade mixte à la place des frites, accompagné d’un cidre de la marque Bandido do Pomar au goût très prononcé de pomme rouge. Ca fait vraiment beaucoup de viande et de poisson en ce moment, surtout pour une ex-végétarienne. A l’occasion, je me couvrirai la tête de cendres bio et me flagellerai avec des orties locales et de saison pour expier mon apostasie.

Retour dans notre mini-suite où nous devons nous battre un peu avec le thermostat pour obtenir une température acceptable. Je passe le reste de la soirée à bloguer notre journée: le temps que Chouchou trie et traite ses photos, je ne pourrai pas publier mes billets tout de suite, mais au moins, la partie rédaction sera derrière moi.

Sauf exception, les commentaires sont désactivés. Si vous voulez poursuivre la conversation, je vous invite à le faire sur la page Facebook du blog.

Retour en haut