Lors du dernier Black Friday, j’avais réussi à choper deux aller-retour pour Amsterdam au prix dérisoire de 50€. J’ai assez vite déchanté en me rendant compte à quel point les hébergements étaient devenus hors de prix dans le centre-ville – non, ça n’allait pas du tout être « un petit week-end sympa qui ne reviendrait pas cher ». Et en ce samedi matin où nous devons partir avant 7h alors que je n’ai pas fermé l’oeil de la nuit, je maudis mes soi-disant idées brillantes.
Pour ne rien arranger, en arrivant à destination après un peu plus de trois heures de train IC, on découvre que l’hôtel The Exchange sur lequel j’ai fini par jeter mon dévolu au tarif exorbitant de 265€ la nuit ressemble au mieux à un hostel design – le genre où une déco rigolote est censée compenser le confort sommaire et les équipements inexistants. De plus, une horrible odeur d’égout flotte dans la salle de bain de notre chambre. Si j’avais su, j’aurais réservé dans un bête Ibis 3 arrêts de tram plus loin. Je suis d’extrêmement mauvaise humeur en ressortant de là. Et bien qu’il fasse assez doux et qu’il ne pleuve pas, la grisaille de février ne fait rien pour atténuer ma grogne.
Puis le premier endroit que j’avais repéré sur internet pour déjeuner se révèle décevant; le deuxième annonce 45 mn d’attente; le troisième n’est pas un resto libanais mais juste un snack avec un escalier-échelle casse-gueule pour accéder aux tables, alors que je porte un manteau long dans lequel je m’empêtre les pieds. Franchement, je lutte pour rester dans un état d’esprit positif et profiter malgré tout de ce week-end.
La plupart des magasins fermant à 16h le samedi, après avoir avalé nos manoushes finalement très convenables, nous entreprenons les zigzags habituels dans le quartier commerçant bobo des 9 rues. La Saint-Valentin approche, et beaucoup de vitrines sont décorées avec des post-it roses en forme de coeur. Ici aussi, de longues files d’attente se sont formées sur le trottoir devant les restos les plus populaires. Dans la vitrine d’un salon de thé nommé Ree7, des velvet cakes en forme de coeur hurlent mon nom, et qui suis-je pour ignorer la détresse de gâteaux aussi délicieux qu’instagramables?
La plupart des commerces où j’avais aimé faire du shopping lors de notre dernier passage, en… 2018 ou 2019, je pense, n’ont pas résisté à la pandémie. Je ne retrouve ni le chouette magasin de fringues rétro, ni celui qui vendait des cosmétiques à l’aloé vera. Je me console chez Haru Haru, spécialiste des cosmétiques coréens où officie un vendeur qui connaît ses produits sur le bout des doigts. J’achète trois masques jetables et un gel peeling aux noyaux d’abricot choisi sur son conseil. Puis nous mettons le cap sur The Otherist, un superbe cabinet de curiosités dont je ne suis encore jamais ressortie les mains vides. Cette fois, j’y déniche un fabuleux pendentif en forme de crâne de corbeau, qui ressortira magnifiquement bien sur une robe en lin noire. Il faudra juste que je lui trouve une chaîne de la bonne couleur.
Nous descendons ensuite Kaalverstraat, l’équivalent local de la rue Neuve à Bruxelles, soit une longue rue piétonne bordée de magasins de chaîne. Le Sabonnette où je m’étais brûlé la main la première fois que je suis venue à Amsterdam avec Chouchou, en 2009, a disparu, mais un Bath & Body Works est apparu un peu plus loin. Je m’y engouffre en poussant des couinements de joie: l’année où je vivais aux USA, je passais la moitié de ma vie chez eux (et l’autre dans le Borders local). Il faut cependant croire que mes goûts ont évolué en l’espace de, euh, 26 ans, car les odeurs me paraissent pour la plupart artificielles, trop fortes et désagréables. Sauf pour la gamme Champagne Apple & Honey, dont j’emporte une lotion pour le corps.
Nous passons également un moment dans l’immense magasin Lego où nous fabriquons 2 figurines customisées. Le résultat est assez décevant et je manque me trouver mal à cause de la combinaison foule/chaleur; je laisse donc Chouchou terminer avec la gentille employée qui m’a donné un verre d’eau et file l’attendre dehors. Plus bas, nous faisons évidemment un tour chez Waterstones, mais ils n’ont pas le livre que je cherche. Tant pis, ce n’est pas comme si ma PAL était vide…
Après une halte de trois quarts d’heure dans notre chambre d’hôtel pour recharger nos batteries et celle de l’iPhone de Chouchou, nous allons faire l’ouverture du très chouette bar à cocktails Tales & Spirits. Un serveur agressivement enthousiaste se jette sur nous et nous bombarde de questions personnelles, me mettant aussitôt mal à l’aise. J’envisage de me suspendre autour du cou une pancarte: « S’il vous plaît, ne me parlez pas plus que strictement nécessaire ». Il revient vers notre table alors que je n’ai pas fini de parcourir le menu et me force à lui dire de quoi j’ai envie au lieu de me laisser finir ma lecture en paix. Il ne le saura jamais, mais à ce moment-là, il passe à deux doigts de se faire éviscérer avec une touillette.
Bref, heureusement que les cocktails sont toujours aussi bons et la musique aussi. Je commence par un The girl next door, un long drink à base de vodka aromatisé à la fraise, au basilic, au jus de citron, au curaçao et au Fever Tree. Puis je me laisse tenter par le short drink emblématique de la maison, le What if…? (rhum/citron vert/ananas/gingembre), et pour absorber l’alcool, je propose à Chouchou de partager des bouchées de poulet frit trouvées dans le menu snacks. Serveur envahissant mis à part, nous passons un moment très agréable, et en sortant, je suis surprise de constater que nous sommes restés presque une heure et demie.
Nous marchons ensuite jusqu’à une cantine japonaise repérée dans l’après-midi et bien notée sur les sites de consommateurs, le Fou Fow Udon. Elle est visiblement très populaire, et nous attendons un quart d’heure dehors avant qu’une serveuse nous conduise à une table partagée. Quand elle prend notre commande, il est 19h15. Quand nos plats arrivent enfin, il est 20h, et j’espère vraiment que je vais me régaler. Hélas! Mon classic udon est aussi fade qu’humainement possible. Chouchou, en revanche, se déclare ravi de son katsu curry.
Nous rentrons à l’hôtel à pied vers 20h30. Bien qu’il soit encore tôt de mon point de vue de Française, les restos commencent à fermer, et il n’y a quasiment personne dans les rues. Epuisée par ma nuit blanche de la veille et par les 18 000 pas faits dans la journée, je ne tarde pas à m’endormir. Au moins, le lit est grand et confortable…