« This time tomorrow » (Emma Straub)

Alice Stern s’apprête à fêter ses 40 ans. Elle travaille au secrétariat de l’école new-yorkaise privée où elle a suivi sa scolarité – un boulot censé être temporaire à la base, dont elle n’a jamais bougé parce qu’elle s’en satisfait. Elle ne s’est pas mariée et n’a pas eu d’enfants, mais apprécie son indépendance de célibataire même si sa meilleure amie est rarement disponible pour la voir. Seule véritable ombre au tableau: son père adoré, écrivain et auteur d’un immense best-seller pour la jeunesse qui leur a assuré à tous deux une existence matériellement confortable, se meurt à l’hôpital. Le soir de son anniversaire, les pas d’Alice la conduisent vers leur ancienne maison, où elle finit par s’endormir. Quand elle se réveille le lendemain, elle est revenue dans sa chambre d’adolescente en 1996, le jour de ses 16 ans. Dès lors, elle va tout faire pour tenter d’infléchir le destin – celui de son père, et peut-être aussi le sien…

Clairement, entre le voyage dans le temps, l’uchronie personnelle et la relation père-fille au centre de l’histoire, ce livre criait mon nom. J’ai découvert par la suite qu’Emma Straub l’avait écrit en 2020 alors que son propre père, l’écrivain de romans fantastiques Peter Straub, était hospitalisé dans un état grave. A la sensibilité avec laquelle elle traite son sujet, on sent bien qu’il lui est très personnel. Alors, c’est vrai que la mécanique du voyage dans le temps est fantaisiste et ne résiste pas même à un examen superficiel. Mais « This time tomorrow » ne vise pas un public d’amateurs de SF pure et dure. Le retour dans le passé d’Alice n’est qu’un moyen d’explorer le thème des choix de vie et des regrets, la nature transitoire des choses et la nécessité de profiter à fond de l’instant présent. Certes, ce n’est pas d’une originalité révolutionnaire, mais c’est très bien fichu, empreint d’une délicieuse nostalgie pour les années 90 et de cette atmosphère typiquement new-yorkaise qui m’enchante toujours dans les oeuvres de fiction (alors que, dans la réalité, je déteste cette ville dont le gigantisme vertical, le grouillement humain et la fébrilité perpétuelle m’oppressent).

Je sais que si ce roman m’a fait un tel effet, c’est au moins autant pour des raisons personnelles que pour ses qualités intrinsèques. Mais je l’ai tant aimé que je ne pouvais pas ne pas vous en parler ici. J’espère qu’il ne tardera pas à être traduit en français (et je rêve évidemment qu’on s’adresse à moi pour le faire) (ce qui n’arrivera pas car je ne travaille pas pour 10/18 qui publie Emma Straub chez nous). En attendant, si vous lisez l’anglais et que vous êtes sensible aux mêmes thématiques que moi… foncez l’acheter, sans oublier de prendre aussi une boîte de Kleenex!

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