
★ Confrontée à la difficulté de faire un second oeil vaguement symétrique au premier dans mon portrait en cours, je commence à comprendre la démarche artistique de Picasso.
Mercredi:
★ N’en pouvant plus de mes cheveux, j’ai pris rendez-vous chez une coiffeuse recommandée par Julie du blog From Toulon With Love: Laurence Milano, à côté de la gare. J’y suis accueillie dans des conditions d’hygiène impeccables, par une patronne qui tend un doigt vers mes orteils turquoise en s’écriant: « Oh, le Bamako de Mavala! » (bien vu, madame) et une coloriste qui m’annonce que ce qu’elle préfère dans son métier, c’est faire de longs massages du cuir chevelu aux clientes (« Epousez-moi »).
★ Ces dames bossent si bien et si consciencieusement que le temps que je sorte, il est 13h45, alors que j’avais prévu de retrouver Kiki pour déjeuner à 12h30. Coup de bol: le personnel de l’Arganier, qui est vraiment adorable en plus de préparer de la délicieuse cuisine marocaine, accepte de nous servir quand même, dessert et thé à la menthe compris, sans manifester la moindre impatience.
★ Ensuite, la fille et le petit-fils de Kiki nous rejoignent; nous nous promenons un peu pour digérer, allons acheter quelques bouquins à Charlemagne et finissons assises à la terrasse du bar de l’Opéra, où le bébé siphonne l’Ice Tea de sa tante avant de boulotter un spéculoos avec délectation. Malgré le port du masque et/ou la désinfection des mains au gel dès qu’on entre dans un commerce, c’est bon de retrouver un peu de vie sociale.
Jeudi:
★ La météo annonce de grosses pluies à partir de demain soir et pendant tout le week-end. Autant dire que la pose de produit anti-fourmis en extérieur demain matin ne va servir absolument à rien. L’univers a décidé que je ne me débarrasserais JAMAIS de ces bestioles.
★ Stressée, je me dépêche de finir mon quota de pages pour mettre en couleur le portrait commencé au crayon lundi. Il représente l’héroïne racisée (mi-latina mi-noire, si mes souvenirs sont exacts) d’un roman jeunesse culinaire que j’avais beaucoup aimé l’an dernier. Hé bien, arriver à rendre une teinte de peau et une texture de cheveux autre que les siennes, c’est pas évident du tout. Sans être horrible, le résultat ne présente qu’un rapport assez lointain avec son très joli modèle. Mais il m’a permis de faire taire mon cerveau pendant deux heures, et c’est tout ce que je lui demandais.
Vendredi:
★ Le technicien censé arriver à 10h débarque à 9h30. Le locataire du rez-de-chaussée dont la présence est indispensable, et qui avait juré-craché qu’il serait bien présent, a mis un mot sur sa porte pour dire qu’il devait s’absenter et qu’il reviendrait vers 10h30. A ce stade, j’envisage de m’arroser d’essence, d’aller me planter au-dessus de la fourmilière et de me mettre le feu.
★ N’étant absolument pas en état de bosser, je m’accorde le droit de passer l’après-midi à peindre – cette fois, un dessin à moi crayonné pendant le confinement. Bien entendu, ça ne rend pas comme je l’aurais voulu, mais pour un premier essai perso, on va dire que ça n’est pas honteux.
★ Je teste « Feel good », et ça me fait le même effet qu’à peu près toutes les séries anglaises de ces dernières années (au hasard, « Fleabag » ou « After life »): un mélange de gêne profonde devant la maladresse sociale des personnages et d’ennui abyssal dû à la lenteur du rythme.
Samedi:
★ Ma mère, cherchant à expliquer pourquoi ma soeur est un modèle d’équilibre mental et moi une catastrophe ambulante: « Toi, tu es arrivée très vite après mon mariage. Ta soeur, je la voulais vraiment. C’est peut-être pour ça. » Au point où j’en suis…
★ En fin de soirée, je suis tellement mal que je cherche sur Google à partir de quelle dose les médocs que j’ai sous la main ont une chance de me tuer si je les mélange à une quantité suffisante d’alcool et que je me taillade les veines pour la bonne mesure. Je tourne un moment avec mes plaquettes de cachets, ma bouteille de rhum et mon couteau à steak avant de me décider à appeler une hotline de prévention du suicide. Et de raccrocher sans avoir rien dit d’autre que « Bonsoir » suivi d’un long silence puis d’un « Excusez-moi de vous avoir dérangée ».
★ Je me couche avec mon casque ANC et lance une méditation Breethe dans l’espoir de m’apaiser. « Vous flottez sur le dos dans un bel océan turquoise, susurre la douce voix de Lynne. Un océan plus vieux que l’humanité, et dont les flots vous murmurent… » « RECHARGEZ LA BATTERIE », m’ordonne aigrement une inconnue. Si l’univers tente de m’envoyer un message, je le trouve assez peu subtil.
Dimanche:
★ A la poubelle, la Sertraline.
★ Une de mes éditrices me propose de traduire un bouquin si indiciblement chiant que j’en ai abandonné la lecture au bout de 100 pages. J’hésite d’autant moins à refuser que le délai de remise est trop serré par rapport à mon planning, et qu’après un an à bosser sans prendre de vacances, j’espère bien m’arrêter quelques semaines une fois rendus tous les projets déjà signés.
★ Un peu avant 20h, ma soeur me textote qu’ils sont sûrs d’être chez eux le week-end prochain, si je veux venir. Bien sûr que je veux. A 20h20, second texto: « Merde Manu il a dit tous les enfants à l’école le 22 ». Ce qui signifie que le week-end prochain, ils ne seront pas chez eux mais en train de ramener Darklulu à Grenoble pour les deux semaines qui restent avant les grandes vacances. J’ai failli voir ma famille en 2020.
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Ton généraliste t'a-t-il prescrit des anxiolytiques en plus de l'anti dépresseur? J'ai fait cette expérience il y a 2 ans, du prozac pour essayer de gérer les crises d'angoisse et bien j'ai cru crever, une anxiété généralisée atroce. Je suis allée voir le généraliste qui m'a "rassurée" en m'expliquant que c'est normal, les 15 premiers jours les antidépresseurs sont un cauchemar, mais après c'est cool, donc il faut se bourrer d'anxiolytiques pour passer le cap… J'en suis arrivée à la même conclusion que toi : tant qu'à être mal, je préfère la version sans médocs car je ne compte pas vivre sous antidépresseur à long terme donc j'ai tout arrêté au bout de 10 jours (et ça va beaucoup mieux depuis!) Bref, tu ne peux pas rester comme ça, peut-être que des anxiolytiques à dose quotidienne en attendant que l'effet du cachet se tasse? Bon courage (facile à dire mais en toute communauté d'expérience :))
De lire que tu envisages le suicide me fait beaucoup de peine, j'espère que tu trouveras la formule chimique qui te convient, et bravo pour avoir fait la démarche de téléphoner à la hotline de prévention plutôt que de passer à l'acte. Commentaire absolument creux, mais sincère.
Très touchée par ce que tu nous partages… de tout cœur avec toi !
@clo: J'avais bien un combiné anti-dépresseur + anxiolytiques pour contrer les effets secondaires de l'AD. Avant ça, je prenais juste des anxiolytiques seuls, mais ils ne me font que peu ou pas d'effet. Et là j'étais à plus de 3 semaines d'AD + AX, j'aurais dû passer le cap initial d'ajustement mais en fait c'était pire chaque jour.
Je voudrai t'envoyer un câlin virtuel, merci pour ta sincérité. J'espère que ton médecin traitant saura trouver un autre médicament/ combinaison de médicaments.
Peut être qu'un psychiatre pourrait t'aider davantage?
ps: ta coupe de cheveux est top 🙂
Quelle honnêteté dans ce résumé de la semaine, j'en suis bouleversée… Hélas, les commentaires sur les blogs sont rarement la solution aux angoisses dont vous parlez, mais j'espère beaucoup beaucoup beaucoup que vous allez trouver le moyen de traverser la nuit et trouver l'apaisement.
Je ne sais pas quoi dire. Quelle période de m… et comme il est difficile de se raccrocher aux branches. Le rdv chez le généraliste ne peut pas être avancé?
ok, bon désolée de ne pas avoir pu t'aider plus, j'espère que la thérapie va pouvoir améliorer les choses.
Merci en tous cas pour ce partage, un commentaire ce n'est pas grand chose comme l'a écrit quelqu'un plus haut mais ça permet de manifester son empathie.
@Clo et les autres: Ce n'est pas vrai que ce n'est pas grand-chose un commentaire; c'est toujours touchant de savoir que des inconnues pensent à vous et compatissent. Ca rappelle qu'on n'est pas seul(e). Donc merci d'avoir mis un petit mot ici, et merci aussi à toutes celles qui m'ont contactée par mail ou sur Messenger <3
Un commm de soutien de plus. <3
Hello, moi aussi ça me fait de la peine de savoir que ça va mal et j’espère que ton médecin pourra t'aider. C'est juste une idée, mais j'ai l'impression que ça va souvent mal la nuit, lorsqu'il fait noir mais qu'en journée ça va mieux. Est-ce que ça pourrait peut être t'aider de parler à quelqu'un aux Etats-Unis (ou autre) lorsque ça va mal pendant la nuit, peut être en vidéo pour que tu vois qu'il fait jour ailleurs? Peut être que ce serait aussi plus facile de parler à quelqu'un en anglais qu'en français, pour être un peu plus détachée en quelque sorte des paroles? J'ai entendu beaucoup de bien des Samaritains. Ou sinon, s'il y a une période particulière où ça arrive souvent que tu te réveilles et que tu te sentes mal, peut être que tu pourrais justement commencer ta journée a 4hrs du matin, quitte à se coucher tôt ou faire une sieste pendant la journée? Peut être si tu lèves a 4hrs tous les jours, et que tu prends un petit-déjeuner, que tu commences à travailler etc que ça pourrait bannir les idées noires à cette période de la nuit? Courage…!
Tiens bon, le retour à Bruxelles n'est plus très loin.
Désolée de ne rien pouvoir faire pour t'aider 🙁
Je suis désolée de lire à quel point ton mal-être te pousse dans tes retranchements. Je t’envoie tout mon soutien, et je maintiens la lumière allumée (tu sais, celle de la certitude qu’il y a des joies à vivre, que l’équilibre peut se retrouver, tout ça) pour toi durant les moments où tu doutes, en attendant que tu trouves le chemin pour en sortir.
Un commentaire, partager un peu ta peine en la lisant, c'est minimal, aussi réduit que notre vie sociale depuis trois mois. Même si je ne t'ai vue que deux fois en vrai (3 si je compte la fois où je t'ai croisée sans vouloir te déranger), je te lis depuis si longtemps et tu es tellement douée pour nous donner l'impression qu'on vit un peu tes aventures, lectures, voyages, colères, deuils, remises en questions, changements de centres d'intérêt,… que j'ai souvent l'impression que tu fais partie de ma famille. Tu dis souvent que côtoyer les gens, c'est pas ton activité favorite. Pourtant, tu offres généreusement à ceux qui te suivent un contact régulier. Je suis désolée de ne pas pouvoir te rendre la pareille. Alors aujourd'hui je commente longuement. Ta façon de t'exprimer m'apporte beaucoup, depuis des années. Tu m'importes beaucoup. J'espère que l'angoisse qui te mine et la dépression que tu traverses te ficheront bientôt la paix. Si je peux faire plus qu'un commentaire, je suis disponible, juste rendu du prêté de tes écrits.
Je lis bien souvent ton blog en sous-marin, sans commenter. Tout mon soutien pour traverser cette période difficile. Je te souhaite d'aller mieux et d'être plus apaisée.
Bonsoir,
Je vous lis depuis des années sans commenter, j'ai lu vos critiques de livres, découvert de nouveaux auteurs, de nouveaux paysages, cocktails, hôtels. Merci pour tout cela et pour ces billets d'humeur, ces semaines en bref. Je ne suis qu'un petit message de plus, mais je tiens vraiment à franchir le pas et à vous écrire pour la première fois.
Je vous transmets tout mon soutien, tout mon courage. J'espère que vous trouverez une solution, une aide à ce qui vous ronge.