Février 1910. Ursula Todd vient au monde pendant une épouvantable tempête de neige qui bloque toute circulation dans le petit coin de campagne anglaise où habitent ses parents. Etranglée par son cordon ombilical, elle ne survit pas.
Février 1910. Le docteur réussit à atteindre la propriété de Fox Corner et à sauver l’enfant. Ursula grandit entre un père banquier affable, une mère très cultivée mais quelque peu acerbe, un grand frère agité et brutal, une grande soeur dotée d’un fort caractère et d’une intelligence développée, une cuisinière bourrue et une servante irlandaise.
Juin 1914. Ursula se noie lors de vacances à la mer.
Juin 1914. Un peintre amateur repêche Ursula juste à temps.
Janvier 1915. Ursula grimpe sur le toit de sa maison pour récupérer le tricotin que son frère vient de lancer par la fenêtre, et fait une chute mortelle.
Janvier 1915. Avant de grimper sur le tabouret, Ursula hésite. Sa soeur entre dans la chambre à ce moment-là et repêche le tricotin à l’aide d’une crosse de hockey.
Novembre 1918. La servante des Todd se rend à Londres pour les célébrations de l’armistice. Elle y contracte la grippe espagnole et contamine Ursula, qui succombe dès le lendemain.
Novembre 1918. Saisie par un inexplicable pressentiment, Ursula tente d’éviter la servante à son retour de Londres mais ne fait que retarder leur rencontre.
Novembre 1918. Sans trop savoir pourquoi, Ursula veut tellement empêcher la servante de se rendre à Londres qu’elle la pousse dans l’escalier…
Et ainsi de suite. Une vie après l’autre, les ténèbres viennent emporter Ursula; mais une vie après l’autre, ses prémonitions (qu’elle qualifie d’impressions de déjà-vu) lui permettent d’éviter la mort… jusqu’au carrefour suivant. Parfois, elle est victime de ses propres choix, et parfois, c’est le simple hasard ou une décision d’autrui qui précipite sa fin. Dans la plupart de ses existences, elle suit plus ou moins le même chemin: un travail administratif dans un ministère, pas de mari ni d’enfants, quelques amants au long cours, une activité de sauveteur bénévole durant le Blitz. Mais il arrive aussi qu’elle s’en écarte assez spectaculairement. Une fois, un viol subi à l’âge de seize ans fait dérailler toute la suite de sa courte vie; une autre fois, elle épouse un Allemand et se retrouve coincée à Berlin lorsqu’éclate Seconde Guerre Mondiale…
Dire que j’ai été fascinée par ce roman de Kate Atkinson serait encore en-dessous de la vérité. Loin d’un « Groundhog Day » littéraire, répétitif et ennuyeux, « Life after life » est un roman d’une extrême richesse, qui dépeint aussi bien la douceur de vivre dans la campagne anglaise que l’horreur quotidienne des bombardements. Il offre au lecteur une saga familiale aux personnages extrêmement bien campés, l’éblouit par l’intelligence de sa structure narrative et lui donne le tournis avec toutes les questions qu’il soulève. Si j’ai tendance à penser que beaucoup de gens surestiment la proportion dans laquelle des forces extérieures modèlent leur destinée, je tombe sûrement dans l’excès inverse, à croire presque exclusivement en l’auto-détermination. Avec un brio éblouissant, « Life after life » démontre que les événements indépendants de notre volonté exercent autant d’influence que nos propres choix, mais que les uns comme les autres déterminent le cours de notre vie de façon si imprévisible que même avec la prescience (certes limitée) d’Ursula, nul ne peut jamais être certain de la manière dont les choses vont tourner.
Je n’ai qu’un seul regret: que tous les efforts de l’héroïne pour « faire les choses correctement cette fois » semblent converger vers le plus gros poncif de la littérature de voyage dans le temps (qui n’est en aucun cas le thème du roman). Mais comme cela n’occupe que quelques pages sur les plus de 600 que compte « Life after life« , il est assez facile de passer outre, et de refermer le livre complètement chamboulée en regrettant qu’il ne s’agisse pas de toute une série à laquelle le sujet se prêterait fort bien.
« Life after life » n’est pas encore traduit en français, mais Kate Atkinson étant un écrivain connu et cet ouvrage ayant remporté le prix Costa en 2013, nul doute qu’il devrait l’être rapidement.
J'avais adoré Dans les coulisses du musée mais pas du tout La souris bleue.
En revanche,pour Groundhog Day,tu parles bien du film?
AnneSo
ça donne envie! je le mets sur ma liste!
Rhâââ… je VEUX le lire ! J'adore Kate Atkinson, déjà, mais ton résumé est irrésistible !
Voila un thème original comme je les aime. Tu as réussi a me convaincre de lire ce roman.Vivement sa sortie en français. J'en profite pour te remercier de m'avoir donné envie de découvrir The Rosie project, sorti en France avec le titre "Le théorème du homard" – perso je trouve le titre anglais plus pertinent – car j'ai vraiment passé un agréable moment de lecture.