Hommage aux hommes féministes

Deux « affaires » ont profondément choqué la féministe en moi cette semaine: l’article, dans le magazine Joystick, d’un journaliste faisant l’apologie du viol subi par Lara Croft dans le dernier opus du jeu vidéo éponyme, et les propos d’un sénateur américain qui a déclaré sans trembler qu’en cas de viol véritable, le corps de la femme avait un mécanisme de protection naturel qui l’empêchait de tomber enceinte, et que l’avortement n’était donc pas justifié même pour les victimes d’agression sexuelle. 
Le propos de mon billet n’est pas de prouver à quel point l’attitude du premier relève d’un machisme ignoble et celle du second d’un obscurantisme crasse, ni de me désoler que l’on entretienne ainsi la culture du viol dans nos sociétés pseudo-égalitaires où le féminisme n’a soi-disant plus lieu d’exister vu que toutes les batailles importantes ont déjà été remportées. Ces arguments, vous les connaissez déjà, et si vous aimez me lire pour d’autres raisons que baver devant des photos de chaussures ou récupérer des adresses de resto sympas, vous partagez sans doute mon point de vue. 
Non, ce que je voudrais faire ici, c’est rendre hommage aux hommes féministes qui m’entourent. Ils ne se revendiquent peut-être pas comme tels, mais ils sont faciles à reconnaître. Ils ont choisi de partager la vie de femmes brillantes, drôles, qui parfois gagnent plus qu’eux, et ils ne se sentent absolument pas menacés dans leur virilité pour autant. Ils savent la valeur d’une vraie égalité dans le couple, d’un rapport de partenaires et de complices plutôt que de chef de famille et de femme de ménage gratuite. Ils ne se sentent pas rabaissés quand ils se mettent aux fourneaux ou empoignent l’aspirateur. Ils respectent le droit des femmes à disposer librement de leur corps, qu’il s’agisse de contraception, d’avortement ou d’allaitement. Ils trouvent normal qu’à poste semblable et compétences égales, leurs collègues dotées d’un utérus soient payées autant qu’eux. Ils ne pensent pas que certains métiers sont réservés aux hommes, que les conductrices sont toutes des dangers ambulants, qu’une femme à la sexualité libérée est une salope, qu’une lesbienne a juste besoin d’un bon coup de bite pour changer d’avis ou qu’un « non » n’est jamais qu’un « oui » qui n’ose pas se dévoiler. Ils ont compris qu’il est aussi dans leur intérêt que les deux sexes aient les mêmes droits et les mêmes devoirs – que tout autant que les femmes, ça les libèrera des attentes archaïques qui pèsent sur eux.
A tous ces hommes, du fond du coeur, je dis merci d’exister. Merci de vous dresser avec nous contre le machisme pas mort et le paternalisme encore rampant de ceux avec lesquels vous ne partagez rien de plus qu’un chromosome Y. 
Photo empruntée ici.

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24 réflexions sur “Hommage aux hommes féministes”

  1. Je suis d'accord, ô combien, avec ton article 🙂 Merci de l'avoir écrit !

  2. Tu viens de rendre le sourire à mon chéri qui était un peu bougon ce matin.
    Profondément féministe, il me disait hier encore que les articles tels que celui de Joystick, les élucubrations du sénateur américain et l'interdiction à New York de l'allaitement au lait en poudre le fatiguaient et le rendaient fou déjà en tant qu'homme et qu'il ne comprenaient pas comment on faisait pour ne pas péter un plomb…
    En outre, avec ses origines méditerranéennes, ce n'est pas toujours simple pour lui d'expliquer ses convictions à sa famille ou que oui, aujourd'hui c'est lui qui fait le ménage pendant que je travaille. Sans compter tous ses élèves qui le pensent homosexuel (oui, oui) tout simplement parce qu'il prêche le féminisme en classe.
    Bref, ton article tombait à point aujourd'hui ! Merci de sa part !

  3. Merci à toi pour cet hommage aux hommes qui sont plus féministes que certaines de mes copines… J'ai souvenir m'être insurgée contre une copine qui m'avait dit en parlant de son compagnon "J'ai de la chance, il m'aide à la maison". En disant cela, elle supposait que c'était à elle de prendre en charge les tâches domestiques, lui se contentant de l'aider et en plus, elle avait de la chance !

  4. Cent fois oui!! J'ai suivi aussi les deux affaires dont tu parles et…pas de surprise je suis atterrée, profondément choquée par tant de stupidité humaine, notamment quand ceux qui les profèrent ont le pouvoir, éventuellement, de faire voter des lois qui réduisent à peau de chagrin le droit des femmes (et puis en passant des immigrés, des homos,…).

  5. Tasha Gennaro

    Entièrement d'accord avec toi. Et que dire des députés qui sifflent une ministre en jupe… J'ai la chance de vivre avec un féministe moi aussi, et comme Katell, je suis parfois consternée par certains comportements féminins : mon féministe me signale alors que ces comportements sont le signe de l'aliénation des femmes, donc un nouveau symptôme de domination masculine. Merveilleux de voir à quel point les machos ont triomphé en nous faisant intégrer leur prétendue supériorité. Je fais partie d'une génération (40 ans) qui a eu la chance de vivre une parenthèse non pas enchantée mais presque : au collège, pas de tensions entre sexes, du moins rien par comparaison avec ce que j'observe aujourd'hui dans les cours de récré et dans les classes où je me rends souvent…

  6. Un jour un type m'a dit "d'accord, c'est bien joli tout ça, mais tu penses vraiment qu'il est heureux?" (sous-entendu "d'être à ce point dominé par une féministe qu'il en a intégré la propagande") en parlant de mon compagnon féministe.

    J'étais atterrée… de l'absence totale de crédit qu'il accordait aux positions de mon compagnon qui s'est formé tout seul sur le sujet, et de la position de castratrice qu'il me faisait endosser…

    J'ai coupé court à la discussion… il y a des gens qu'on ne peut pas sauver de la bêtise.

  7. Je viens de lire l'artle de Joystick…mmh…oui,quand même…au moins les lecteurs du mag réagissent et ça fait polémique et ça c'est pas mal,ils feront gaffe dorénavant,vu le buzz négatif.
    Je ne parle même pas du débile américain,Barack lui a mis un taquet.

    ANNESO

  8. Je garde toujours en travers de la gorge une phrase de ma sœur, qui me choqua alors que je devais avoir 13 ou 14 ans : "pas étonnant qu'elles se fassent violer si elles s'habillent comme des putes".

    Même des femmes excusent le viol dans certaines conditions, et certaines sont très contentes du "slutshaming".

    Comment se mettre soi même des bâtons dans les roues pour notre liberté….

  9. Disons que de la part d'une ado, parler sans avoir vraiment réfléchi est excusable. De la part de femmes adultes, ça l'est nettement moins…

  10. C'est étrange de constater désormais que lorsque l'on parle de féminisme, on attend bien souvent glousser. Je constate en tout cas qu'on n'a de cesse de revenir en arrière, et que la société ne nous encourage pas réellement et sincèrement à nous assumer pleinement. Oui, des victoires ont été remportées, mais les celles qui nous permettront de vraiment de faire face aux défis auxquels nous sommes confrontées aujourd'hui (mener de front carrière, vie familiale et vie de femme) sont loin de l'être aujourd'hui. Sinon, merci à certains mecs de nous rappeler que les années 50 sont derrière nous. Parfois.

  11. Gloups… Je trouvais vraiment sympathique le concept de la Lara qui se forme pour devenir l'icône qu'elle est aujourd'hui. Quelle naïveté de ne pas avoir vu que ça allait réjouir plein de personnes qui la verraient "enfin faible" (tout est relatif, je veux bien être faible comme ça).

    Enfin, c'est pas vraiment le propos… quand j'ai glissé à des ex-collègues que j'étais féministe, elles ont gloussé d'un air gêné. Et c'est mon copain féministe qui m'a dit que c'était un mot fort. J'ai pourtant cru que c'était une évidence, de l'être…

  12. En théorie, je sors avec un macho, un ingénieur devenu officer pompier. Et pourtant, il correspond à ta définition du féministe. Je ne pense pas qu'il se définirait comme cela, je crois que pour lui, c'est naturel… merveilleux, n'est-ce pas?

  13. Pour revenir sur ta remarque de paroles venant de la part d'une ado, ma sœur a 9 ans de plus que moi, elle avait donc 22 ou 23 ans à l'époque… Elle en a plus de 30 maintenant et n'a pas changé d'avis.

    Mais malheureusement je remarque juste au quotidien que bon nombre de femmes font tout pour ne pas avoir cette égalité, et c'est ce qui me désole le plus.

  14. Élevée par une famille communiste ET feministe, je n'aurai jamais compris ne pas trouver chez mon compagnon ce que j'avais toujours vu chez mon père et considéré comme normal. J'ai mis longtemps a me rendre compte que ça n'était pas "normal" pour tout le monde…

  15. Princesse Audrey

    L'article sur Lara Croft m'a autant écoeurée que la version du jeu qui l'a motivé… Je ne savais pas qu'un sénateur avait balancé une bouse semblable…

    Mon amoureux est féministe, et c'est tellement naturel pour moi, qu'avant de lire ton article, je ne m'en étais même pas aperçue 😀

  16. Certaines anecdotes dans les commentaires ci-dessus sont assez affolantes…
    Je remarque aujourd'hui la chance que j'ai eu d'être élevée dans une famille saine, où les femmes fortes ne s'étaient jamais posé la question d'être des femmes ou de ne pas l'être, et ont pris toutes les initiatives qu'elles voulaient, bonnes comme mauvaises, sans réfléchir à ce qu'elles auraient du faire – en tant qu'êtres dotés d'ovaires.
    Mon ami est donc un féministe également. A moi de l'aider aussi à ne pas subir le carcan de la virilité imposée.
    Je ne sais pas si c'est pire aujourd'hui qu'il y a 20 ans ; mais je sais que tant que nous avons tous la force de garder les yeux ouverts sur tous ces problèmes, et d'être vigilants sur chaque chose, nous pourrons peut-être continuer à faire des émules.
    Hauts les coeurs !

  17. "Élevée par une famille communiste ET feministe, je n'aurai jamais compris ne pas trouver chez mon compagnon ce que j'avais toujours vu chez mon père et considéré comme normal. J'ai mis longtemps a me rendre compte que ça n'était pas "normal" pour tout le monde…"

    J'aurais pu écrire exactement ce commentaire 🙂

  18. Oh oui merci merciiii aux hommes de nous considérer parfois comme des êtres humains. Ca mérite bien une petite pipe.

  19. En l'occurrence, je parle justement des hommes qui nous considèrent toujours comme des êtres humains. Et ça me semble plus digne d'un remerciement que d'un sarcasme, vu que c'est hélas encore loin d'être automatique.

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