Call me Madeleine

Je ne suis pas quelqu’un qui pleure beaucoup. Quand on me fait du mal, je me ferme; je deviens monosyllabique et cassante, voire lourdement sarcastique. Je ne veux pas donner à la personne d’en face la satisfaction de savoir qu’elle m’a blessée. En situation professionnelle, je me force à respirer profondément et à garder mon calme parce que je veux qu’on me prenne au sérieux, et qu’une fille qui pleure est toujours considérée comme une petite chose fragile incapable de supporter la moindre pression. Si j’ai du chagrin, je ne sanglote pas sur l’épaule de mes amis parce que je ne veux pas les embarrasser et m’embarrasser aussi du même coup. La plupart d’entre eux vous diraient sans doute que ça ne les dérange pas, mais je préfère jouer le brave petit soldat, voire faire dans l’humour noir plutôt que de craquer devant eux. Les vannes, je les ouvre quand je suis toute seule, et pas souvent. Il paraît que pleurer fait du bien; ça me donne surtout l’impression de perdre les pédales à un moment où il faudrait, au contraire, que je garde la tête froide pour surmonter l’épreuve à laquelle je suis confrontée.

Mais là, depuis quelques mois, je ramollis distinctement. Je pleure dans la douche après les coups de fil à mon père; je pleure le nez dans la fourrure de Scarlett en pensant qu’elle ne sera bientôt plus là. Je pleure parce que je n’ai pas eu de cadeau d’anniversaire et que ça me rend affreusement triste d’être considérée comme une personne trop difficile pour qu’on tente de lui offrir quoi que ce soit. Je pleure sur la mort d’un personnage de série télé auquel je n’étais même pas particulièrement attachée. Je pleure en nourrissant des fantasmes macabres (et a priori injustifiés) de séparation avec Chouchou. Je pleure sur la marche implacable du temps et les rangs des proches qui s’éclaircissent au fil des ans. Je pleure pour des choses qui en valent la peine et d’autres qui sont parfaitement ridicules. Jamais de gros sanglots, juste les yeux qui débordent malgré moi, mon chagrin et mes angoisses qui s’échappent en gouttes d’eau salée que je n’essaie pas de contenir. Il faut bien évacuer la pression d’une façon ou d’une autre, et verser quelques larmes en privé vaut toujours mieux que se mettre à hurler sur son entourage ou développer des comportements auto-destructeurs. Pour l’instant, je suis en paix avec mon nouveau statut de madeleine.

17 réflexions sur “Call me Madeleine”

  1. *Câlins. Plein*
    Je ne sais pas pour toi, mais je trouve à titre personnel des périodes plus propices à être à fleur de peau que d'autres. Tu en traverses peut-être de plus complexes ces derniers temps.
    Des gros bisous.

    Mélusine, qui aurait sans peine pu changer de prénom

  2. Miss Sunalee

    Tu n'es pas la seule… Madeleine devrait aussi être mon deuxième prénom (sauf que ça a toujours été comme ça chez moi).

  3. Je suis une grande pleureuse. J'ai appris à ne plus pleurer en public, enfin, j'essaie, je n'y arrive pas toujours. Il y a en effet des périodes plus larmoyantes que d'autres mais j'ai toujours beaucoup pleuré. Cela fait partie de ma sensibilité, sans doute. J'aurais vraiment dû m'appeler Madeleine. Je pense à toi.

  4. Si ça peut te rassurer. Je pleure assez souvent moi aussi depuis un an et demi. Un rien et hop ça monte en pression. Je viens tout juste de chialer en regardant un épisode d'une série où un des personnages meurt (vous remarquerez que je ne précise pas quelle série pour ne pas faire de spoiler. ça vous tire une larme ?!)

  5. Je pense que c'est la même série, car je sais que tu la regardes aussi ^^

  6. Moi aussi,je suis assez pudique et je pleure rarement devant les gens car je crains de les mettre mal à l'aise,et moi avec.En règle generale,j'évite de trop montrer mes émotions,par exemple je me mets très peu souvent en colère car je crains de ne pas maîtriser mon image,c'est assez frustrant finalement et ça me laisse un sentiment d'insatisfaction.

    ANNESO

  7. Emilie Sunny

    Je continue à penser que pouvoir pleurer, c'est une force en soi, (quand ça ne devient pas trop).
    Et dans des périodes sombres où on est plus fragile, c'est juste….normal pour moi!

    Gros bisous de soutien !

  8. Moi ce n'est pas madeleine, c'est Niagara. Carrément. J'ai toujours été sensible mais depuis deux ans, c'est une catastrophe. Ce midi, pendant le lunch, un article dans Gala sur le Titanic et hop, j'en verse une petite. Une collègue frustrée qui vient dans mon bureau clamer sa colère et hop je mords mes joues, je reste calme mais pffff. J'ai déjà failli me noyer à la piscine à cause d'un gros chagrin. Je pleure au yoga. Cependant, j'ai appris à l'accepter à me dire, que ça fait partie de mon acceptation de faiblesse, d'une certaine bienveillance envers moi-même. Parfois, ça fait juste du bien de lâcher un peu de pression.

  9. La Princesse

    Oooh, mon petit canard, si, si tu as un cadeau d'anniversaire. il est posé à coté de Jean-Foxois, même. Il attend juste l'occasion qu'on se voie ^^

    Ton premier paragraphe, j'aurais pu l'ecrire mot pour mot. Et je pleure beaucoup ces temps pour des raisons tout à fait indépendantes de ma volonté (enfin je pleure beaucoup selon mes critères) . Je deteste ça, et ça me fait pleurer encore plus.

    J'aimerais bien avoir ta sérénité du coté de la madeleine, mais j'ai encore des progrès…

  10. Le syndrome du cadeau d'anniversaire je connais, et j'ai passé un anniversaire affreux l'année dernière à tout remettre en question pour des broutilles. Je comprends ce que tu ressens mais en fait il ne faut pas s'inquiéter. Tu traverses une période difficile, et ne pas craquer serait surprenant, et sans doute plus mauvais qu'autre choses à long terme. La vie est pleine de hauts et de bas et tu reprendras le dessus car tu es quelqu'un de fort, et de précieux. <3

  11. J'aurais du m'appeler Madeleine aussi. Je suis assez sensible et je pleure relativement facilement, même si je me retiens au bureau (crédibilité oblige). Parfois c'est pour des raisons parfaitement ridicules, parfois pour de bonnes raisons. Parfois je m'en veux de me laisser submerger dans des moments où je voudrais garder la tête froide (et m'en vouloir ne fait que redoubler mes pleurs… le cercle vicieux !), d'autres fois ça me permet d'évacuer le stress et la pression. J'aimerais avoir un peu plus de self control dans certaines situations, mais en tant que Madeleine, ça n'est pas toujours facile.

    Des bises et des câlins.

  12. Princesse Audrey

    Je suis comme ça depuis deux ans, la moindre chanson qui me touche (même joyeuse et pleine d'espoir) me fait pleurer. J'ai appris à gérer : je ne m'expose plus aux situations qui peuvent provoquer ça devant les gens avec lesquels ça m’embarrasserait, sinon, je me laisse pleurer. Il y a même des jours où je ne me maquille pas, car je sais que ce jour-là, quelque chose de précis me fera pleurer, et que je ne veux pas que mon mascara me transforme en panda.
    Depuis que j'ai appris à accepter ces larmes, je suis vraiment moins triste qu'avant. Et pourtant, jusqu'à il y a deux ans, je ne pleurais jamais, j'avais l'impression d'être un char d'assaut blindé, une machine de guerre, depuis toujours. Mais à force d'avancer et de mener cette politique, j'ai fini par engranger plein de trucs, sur lesquels je refusais de pleurer pour ne pas me ralentir. Alors, il y a deux ans, j'ai eu 25 ans de larmes à lâcher. C'est ce que je fais depuis, et ça fait du bien. J'espère que tu vas aller mieux, et que tu réussiras à gérer cela. Si tu viens à Toulouse, je serai heureuse de te voir. Bon, je me mets des coups de pieds aux fesses pour te mailer. Bisous ! (je te tends un mouchoir… J'ai aussi appris à acheter de jolis mouchoirs en papier, pour que mes larmes soient moins tristes, aussi… j'ai plein de beaux mouchoirs en papier tous doux à motif… Je t'en tends une boîte. Bisous)

  13. Je pense qu'il y a des périodes où on a le sentiment que tout part en live et que rien ne va… Et dans ces périodes là, pleurer fait du bien, ça évacue, il faut laisser "couler ses larmes", surtout quand les évènements qu'on traverse sont grave et importants (ton père, Scarlett…)
    Je pense que du coup tu reportes sur ta série préférée et le coup du "non cadeau d'anniversaire", tes larmes… histoire de répartir un peu 😉
    allez je t'envoie la cargaison d'ondes positives (comme je l'ai reçu à une époque…)

  14. ElanorLaBelle

    En dehors du cercle familial, je montre rarement mes sentiments profonds. J'arbore souvent cette façade souriante que tout le monde connait (même si je suis une grande stressée et que mes amis proches le savent très bien). Je n'aime pas montrer cette faiblesse que pleurer sous-entends pour beaucoup. Mais il y a des périodes, plus ou moins longues, où c'est plus fort que moi, où tout (et rien) me fait verser ma larme. Lorsque l'angoisse devient trop forte. Il y a dix ans, c'était des décès autour de moi. Depuis un an c'est une vie perso/scolaire/pro, tellement chaotique que par vagues je craque. Tout ça pour dire que ce que tu décris me parle tout à fait. Je crois qu'on est toutes un peu comme ça, au bout d'un moment ça craque, même pour des trucs aussi futiles qu'une série tv 😉

  15. Les larmes… pas facile à gérer, l'important c'est qu'elles puissent sortir il paraît que ça soulage et apaise.
    Pour le cadeau d'anniversaire je comprends que ça soit dur rien reçu pour mes 40 ans…) mais le tien t'attend sagement à l'appartement puisque tu viens bientôt ^^

  16. Sophie et la Princesse: vous êtes gentilles, mais ce n'était pas un appel du pied façon "offrez-moi un truc et vite!", juste un constat par rapport à une personne précise que je ne voulais pas nommer.

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