Un anniversaire un peu spécial

Aujourd’hui, ça fait officiellement 17 ans que je suis traductrice littéraire. Je dis « officiellement », parce qu’en réalité, j’avais accepté ma première commande au début de l’été 1994, mais ne sachant pas trop si ça allait marcher, j’avais attendu de voir comment je me débrouillais avant d’effectuer toutes les démarches administratives. Mon premier PC, acheté pour l’occasion, était un monstrueux machin gris qui, imprimante comprise, avait coûté 10 000 francs de l’époque (1 500€). Il devait avoir quelque chose comme 64 mégas de mémoire, et bien entendu, pas de modem intégré puisque je n’ai eu ma première connexion internet que deux ans plus tard. Mon premier boulot, c’était la traduction du Clanbook: Brujah pour le jeu de rôles Vampire: La Mascarade. Ca avait dû me rapporter quelque chose comme 2 000 francs (300€), une misère; mais après trois ans de galère à enchaîner des boulots qui me donnaient envie de me tirer une balle dans la tête le matin au réveil, j’étais si contente de faire enfin quelque chose qui me plaisait!
17 ans plus tard, je suis toujours traductrice. J’ai abandonné les jeux de rôle depuis belle lurette pour passer aux romans de fantasy avec quelques détours par la SF, les guides de série télé, la chick lit ou même le thriller. Je déteste toujours autant la gestion de la partie administrative, mais je me débrouille à peu près, même si je sacrifie généralement trois jours en février pour établir ma déclaration de revenus. Au fil des ans, j’ai appris à ruser (et à mettre des sous de côté…) pour anticiper les inévitables problèmes de trésorerie en août et en décembre, quand il manque toujours une personne au service compta des éditeurs pour signer un chèque ou effectuer un virement. J’ai la réputation de bosser vite, pas trop mal et de toujours respecter mes deadlines. Du coup, je gagne plutôt bien ma vie. Et vu que ça ne m’intéresse pas d’engraisser le fisc, arrivée à un certain stade, j’ai choisi de ne plus chercher à augmenter mes revenus, mais plutôt de diminuer ma charge de travail. Ca fait quelques années que je me débrouille généralement pour prendre mon mercredi de congé. Je suis très heureuse de pouvoir m’organiser à ma guise, me lever à l’heure que je veux le matin et ne pas perdre de temps dans les transports. En contrepartie, il m’arrive de me sentir un peu seule enfermée chez moi, mais on ne peut pas tout avoir! Et bien que je bosse à la maison, j’ai rencontré à travers ce boulot des tas de gens merveilleux – drôles, intéressants et profondément humains -, au contact desquels je me suis sentie devenir meilleure en tant que traductrice et surtout en tant que personne*.
J’aurais pu me planter dix, vingt, cinquante fois. Mais m’installer à mon compte pour faire un métier qui me plaisait et ce, malgré mon absence de diplôme ou de formation, reste sans doute la meilleure idée que j’ai eue de toute ma vie.
*JC, si tu me lis encore: oui, c’est surtout à toi et à Brigitte que je pense en écrivant ça…

Edit 10h58: J’ai reçu depuis ce matin plusieurs demandes de renseignements sur le métier de traducteur littéraire. J’essaie de répondre à tout le monde, mais avant de m’écrire, allez donc lire cette interview réalisée il y a deux ans, vous y trouverez peut-être ce que vous cherchez!

15 réflexions sur “Un anniversaire un peu spécial”

  1. C'est une profession qui m'a toujours intrigué. Je suis surprise que tu ne sois pas diplômée dans ce domaine! J'aurais tellement de questions non seulement sur le comment on se lance, mais aussi sur le comment on traduit.

    Utilises-tu des logiciels particuliers? Tu fais de l'anglais vers le français? Quelles sont les obligations quant à l'exactitude de la traduction par rapport au texte original? Il faut compter combien d'heure pour un roman de 300 pages? Évidemment, t'as pas à me répondre, mais c'est toujours un plaisir de lire sur tes diverses expériences, en particulier sur le travail à la maison, la discipline que ça demande, mais aussi la liberté que ça donne (je travaille aussi de chez moi…).

  2. Arielle: oui, anglais vers français; non, pas de logiciels particuliers juste un traitement de texte; la fidélité à la VO, ça dépend des éditeurs, certains te laissent plus de marge que d'autres; un bouquin de 300 pages me prend environ 3 semaines, mais comme je disais, je suis rapide, et ça dépend de la difficulté du texte.

  3. Avec toutes les difficultés liées au monde du travail que je vis ou que j'entends rapporter par des amis, je suis toujours heureuse de constater que d'autres s'épanouissent dans leur travail, quel qu'il soit 🙂

    Mélusine

  4. Voui 🙂 Comme je dis, mon boulot ne sauve pas le monde, mais je ne crois pas non plus qu'il contribue à le rendre pire…

  5. Tu ne sauves pas littéralement le monde, mais tu fais rêver les gens et ça, c'est les sauver un peu 🙂
    Joyeux anniversaire !
    Peut être que dans un futur pas si lointain je pourrai aussi offrir des mots aux gens. J'en rêve.

  6. hé hé voilà un post qui tombe à pic. Je suis indépendante depuis deux jours 🙂 Félicitations à toi!

  7. Cécile de Brest

    Voilà qui est un chouette anniversaire !
    Moi, mon nouveau boulot ne me permet pas de vivre (heureusement que mon mari est là mais bon, au pire, je peux toujours retourner vers l'enseignement )mais au moins, ça me plaît !

    Et je trouve ça top de bosser depuis chez toi, j'y vois plus d'avantages que d'inconvénients.

  8. je pense que c'est une question de tempérament. Moi, ça me convient très bien, mais beaucoup de mes amis salariés me disent qu'ils pèteraient les plombs s'ils ne devaient voir personne de la journée, ou qu'ils auraient beaucoup de mal à se discipliner sans la structure et les horaires d'une entreprise autour.

  9. Personnellement, je trouve ça plutôt chouette d'exercer un métier qui n'exige pas de diplôme particulier (il en existe, mais c'est une autre histoire). Ne pas devoir passer d'entretiens d'embauche, ne pas devoir justifier de ses études mais simplement montrer concrètement ce qu'on sait faire… C'est pour ça aussi que j'aime ce métier.

    (Neuf ans depuis juillet en ce qui me concerne, le temps passe. ;))

  10. Cécile de Brest

    Je suis comme toi, je bosse depuis chez moi et franchement, je n'ai aucun problème à me "discipliner". De toute façon, j'ai un boulot à rendre pour une date donnée, comme c'est impensable de le rendre en retard,je fais ce qu'il faut !

    Et pour ce qui est de ne voir personne, ben, je voie mes copines (quand je m'aménage des pauses)qui sont des filles que j'apprécie, ce qui n'est pas toujours le cas des collègues de bureau qu'on est parfois obligé de se coltiner !

  11. Bien sûr que je te lis encore… Rien ne meurs jamais, ma grande, et ce mantra vaut pour l'amitié.
    Bises

  12. JC: au cas où, je passe à Paris le mois prochain, juste avant d'aller sur Nantes pour les Utopiales…

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