Quand je décris mes conditions de travail et les revenus que je tire de mon activité professionnelle, je sens bien que mes interlocuteurs m’envient. Et je suis la première à reconnaître que j’ai une situation très agréable. Ce que je supporte pas en revanche, c’est qu’on croie que cette situation est le pur fruit de la chance. Du coup, je me retrouve toujours en train de me justifier. Oui, mais j’ai pris un gros risque en me lançant dans une activité indépendante sans aucun diplôme en rapport ni piston dans le milieu de l’édition. Oui, mais j’ai passé presque dix ans à bosser douze heures par jour, six jours par semaine, cinquante-et-une semaines par an, souvent au détriment de ma vie privée. Oui, mais j’ai une sécurité sociale minable et un emploi encore plus précaire que celui d’un salarié. D’un côté, je culpabilise de mener une vie somme toute facile; de l’autre, j’ai envie de dire que je n’empêche personne de faire pareil s’il s’en sent capable.
C’est un peu la même chose qu’en politique. Dans le fond, je ne suis pas plus d’accord avec le « quand on veut, on peut » de droite qu’avec l’assistanat systématique prôné par la gauche. Je trouve un peu facile d’utiliser ses origines et son environnement comme unique excuse pour échouer à obtenir ce qu’on veut. Mais je pense qu’une Beurette issue d’une famille de musulmans traditionnels et ayant grandi dans une cité du 9-3 aura beaucoup plus de mal à devenir candidate aux cantonales à 22 ans qu’un blondinet de Neuilly dont le papa est locataire de l’Elysée. Il serait faux de croire que nous partons tous à égalité dans la vie. Mais il serait tout aussi faux, me semble-t-il, de croire qu’on n’a aucune chance de combler les inégalités par la seule force de son travail, de son talent ou de sa volonté.
Si des circonstances indépendantes de nous – notre patrimoine génétique, la famille dans laquelle nous sommes nés, les capacités intellectuelles ou physiques dont nous disposons – modèlent notre existence pour moitié, ce n’est pas une raison pour baisser les bras et nous laisser entraîner sur le chemin qui semble tout tracé pour nous. En tant qu’occidentaux, nous avons pour la plupart la chance de vivre dans des pays où tout est théoriquement possible, où nous jouissons d’une liberté de parler et d’agir supérieure à tout ce qui a jamais existé par le passé et à tout ce qui existe aujourd’hui dans le reste du monde. Profitons-en de ce que nous avons, battons-nous si nécessaire pour en obtenir davantage, et essayons de ne jamais céder à la tentation méprisable de l’auto-apitoiement.
Alleluia D
Ouais je sais ce post est naze. En fait hier soir pendant que je le composais dans ma tête avant de m’endormir il était super, et puis là j’ai vachement peiné à le reconstituer et il finit pas du tout comme prévu. Bon c’est pas grave je vais pas tarder à refaire une blonditude qui allègera l’atmosphère.