Depuis quelques années, j’avais perdu le plaisir de bosser. Marre des histoires de preux chevaliers accablés par le destin, de voleurs roublards au grand coeur, de magiciens névrosés qui traînent une blessure d’enfance secrète, d’elfes hautains, de nains bougons et de damoiselles-pas-tant-en-détresse-que-ça dotées d’une langue hyper bien pendue. Marre des descriptions de villes médiévales qui se ressemblent toutes (des auberges pleines d’autochtones méfiants, un quartier du port où il ne fait pas bon traîner seul après minuit, une place du marché aux étals colorés et odorants, un château à l’architecture improbable). Marre des monstres hideux qui ont immanquablement une haleine méphitique, des crocs acérés et des griffes aiguisées comme des couteaux, et encore plus marre des grandes scènes de bataille finale dont on connaît le déroulement à l’avance (les gentils manquent se faire écraser mais réussissent miraculeusement à retourner la situation en leur faveur au dernier moment). J’exagère à peine. A côté de ça, je faisais bien quelques guides de séries télé, mais trop peu pour me distraire de mon ordinaire.
J’avais donc décidé de me réorienter peu à peu sur un autre créneau, a priori la chick lit (littérature de fifilles à la Bridget Jones et autre Le Diable S’Habille En Prada, pour les non-connaisseurs). Parce que j’avais une ouverture et parce que le genre est assez porteur en ce moment. Le problème c’est qu’il y a quand même beaucoup, beaucoup de daubes dans la publication pléthorique de ces dernières saisons. Probabilités obligent, j’ai donc commencé par quelques romans pour ados qui allaient du « je m’endors sur mon bouquin » au « c’est pas de la grande littérature mais ça se laisse lire ». Encore bien contente de sortir un peu de mes univers médiévaux-fantastiques.
Et puis soudain… Le miracle. Depuis le début de la semaine, je bosse sur un roman tellement bien écrit qu’il mériterait d’être classé en littérature générale. Avec une héroïne psychologiquement très atteinte et des personnages secondaires merveilleusement vivants. Je retrouve l’envie de connaître la suite de l’histoire, l’admiration pour la fine sensibilité de l’auteur et l’attention qu’elle porte aux détails, la jubilation de réussir à adapter une référence culturelle un peu pointue ou l’humour d’un jeu de mots sans équivalent français, la satisfaction de me relire et que tout coule de soi, l’excitation à la pensée de distribuer mes SP à des gens qui passeront un bon moment à les lire. Ca faisait longtemps que ça ne m’était pas arrivé, et c’est vraiment bon.
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Comme quoi tout arrive dans la vie ^^
Est-ce que cela sous entend par le bon entedement que par conséquent, et en tenant compte de la conjoncture socio-politico-casino-culturelle, tu ne verras plus de troll arréter à un feu juste devant toi ?
Oh un conditionnement mental vieux de vingt ans, ça ne s’efface pas si vite… Et puis même sans bestioles fantastiques, je te rappelle que je vois des hommes invisibles en moto et qu’il m’arrive de croire que le Père Noël existe et sponsorise Coca-Cola…
Tiens, tu lis le tout avant de traduire ou tu t’y mets direct ?
Non, je ne lis jamais avant, j’aime découvrir au fur et à mesure (c’est parfois le seul « plaisir » que j’ai sur certains bouquins vraiment chients – s’il fallait en plus que je me cogne l’histoire deux fois je me tirerais une balle). Ca m’oblige parfois à revenir en arrière pour corriger de petites choses que j’avais mal interprétées, mais au final je perds moins de temps comme ça.