Parce que j’ai décidé d’être tout à fait honnête avec moi-même, je suis obligée d’admettre que mon instinct protecteur ferait probablement de moi une mère décente, contrairement à ce que je clame depuis toujours. Non, si j’avais un enfant, je ne le rendrais pas nécessairement malheureux; j’aurais même une chance correcte d’en faire un adulte pas trop névrosé.
En vérité, de tous les arguments que j’assène quand on me demande pourquoi je ne veux pas d’enfants, il n’en est guère que deux ou trois qui me bloquent réellement. 1: je suis une grande douillette et la phase « fabrication » me remplit de terreur. 2: jamais je n’aurai suffisamment confiance en un homme pour en faire le co-responsable de l’éducation de mon rejeton. 3: j’ai déjà du mal à concilier mes deux moitiés, s’il faut en plus que je rajoute « mère de famille » dans le mix…
Quoi qu’il en soit, la question est purement rhétorique. J’ai 35 ans et personne dans ma vie. (« C’est pas comme si tu avais du mal à te trouver des mecs », m’a encore répété Père avant-hier soir. Ce à quoi j’ai répliqué: « Bah, un donneur de sperme, je trouverai toujours. Quelqu’un avec qui j’aie envie de partager ce genre de responsabilité, c’est autre chose. » « T’as qu’à faire comme dans la chanson de Goldman », s’est empressée de dire Mère, qui feint de s’être résignée à ce que je ne me reproduise pas mais se trahit régulièrement avec ce genre de phrase.) J’ai, surtout, envie d’explorer un mode de vie qui ne laisserait pas de place à un enfant. Mais si je peux me débarrasser de mon aversion épidermique pour les mômes et devenir au moins une chouette tatie pour mes neveux, ça ne sera déjà pas si mal.