Soeur cadette

Elle a épousé son premier mec (pour autant que je sache).
J’en suis à quelques dizaines de partenaires, tous sexes confondus, et actuellement célibataire sans aucune intention de me remarier, ni même de faire adresse commune avec quelqu’un.

Elle a deux enfants et en fera peut-être un troisième si mon beau-frère sait se montrer convaincant (il a intérêt: je veux une nièce!).
Je fais un rejet absolu de la maternité.

Elle est responsable du service d’analyse financière dans une boîte américaine qui fabrique de l’électronique de pointe, et où elle se tape régulièrement des semaines de 60-70 heures.
Je bosse en free-lance comme traductrice de romans fantastiques, et dès que je dépasse les 30 heures par semaine, je hurle à l’esclavage.

Elle habite une grande maison familiale à la campagne.
J’habite un appartement de poupée, une bonbonnière pour fille célibataire.

Elle conduit une Passat noire légèrement moins grande que le Titanic.
J’ai une Twingo vert chelou qui prend à peine une demi place de parking.

Elle a un chien – un vieux berger allemand.
J’ai deux chattes – des Sacrées de Birmanie.

Dans sa garde-robe, il y a du noir, du beige, du blanc, du marron, du gris, du bleu marine et un peu de bleu clair pour la couleur, plus des chaussures plates qui vont avec tout.
Dans ma garde-robe, il y a du rouge, du fuchsia, du turquoise, de l’orange et trois catégories de pompes: bout pointu/talons vertigineux, ballerines de gamine, Doc Martens dans toutes les teintes de l’arc-en-ciel.

Elle trouve le body art débile et racoleur.
J’ai deux tatouages et bientôt un piercing à la figure.

Pourtant, nous avons été élevées peu ou prou de la même façon.
Pourtant, nos voix sont si semblables que les gens nous confondent au téléphone.
Pourtant, nous avons les mêmes mimiques, les mêmes expressions, la même façon de nous emporter pour ce qui nous importe.

Je l’aurais volontiers étripée à mains nues quand nous étions ados. Aujourd’hui, je l’aime tellement que quand elle avait des difficultés à tomber enceinte de son premier enfant, j’ai envisagé, si cela s’avérait la seule solution, de porter un bébé pour elle – moi qui ai une sainte phobie de la grossesse et de l’accouchement.

Je la regarde sur son canapé, en train de bercer son fils de trois semaines. Je la trouve drôlement belle. Je suis fière que le même sang coule dans nos veines.

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