[SINTRA] Quand l’esprit de Fangio veut nous retenir au Portugal pour toujours

Après un dernier petit-déjeuner accompagné de délicieux pastéis de nata très vanillés, nous faisons notre check out et laissons nos bagages à la réception de la Villa. Puis nous allons prendre le bus 1253 pour nous rendre au Parque de Monserrate, situé un peu plus loin sur la même route que la Quinta da Regaleira. Moins de dix minutes de trajet plus tard, nous descendons devant le site qui vient juste d’ouvrir.

Le contraste avec les deux palais visités précédemment est énorme. Ici, pas de file d’attente et pratiquement personne dans les allées. Ce qui nous arrange fortement. Un parcours balisé est prévu, et même accompagné d’un jeu de piste auquel nous nous prêtons volontiers. Nous déambulons le long des chemins pavés, toujours en pente mais agréablement ombragés, sans autre bruit que le gazouillis des cascades et le pépiement des oiseaux.

Le parc est luxuriant, plein de recoins secrets qui invitent à la méditation. J’aime particulièrement le jardin des fougères si foisonnant, et la ruine romantique surplombé d’un arbre immense qui l’enserre dans ses racines. Le jeu nous demande de quelle espèce il s’agit. « C’est un banian », affirmé-je avec assurance. Le jeu valide ma réponse. « Mais comment tu sais ça? » demande Chouchou, stupéfait. « Je lis », lâché-je sur un ton hautain. Alors qu’en vérité, je le reconnais pour l’avoir vu dans un de mes jeux vidéo. Mais c’est ça qui est fabuleux avec la connaissance: peu importe d’où tu la tires. Une fois que tu l’as, tu l’as.

Plus tard, nous nous perdons un peu aux alentours de la roseraie avant d’achever le parcours dans le palais où vivait autrefois Francis Cook. Ce philanthrope qui avait épousé une suffragette fut anobli pour sa restauration du site, ainsi que pour ses nombreuses contributions à de bonnes oeuvres. Le mobilier a malheureusement disparu, mais le style néomauresque du bâtiment est très plaisant.

En sortant, nous voulons reprendre le 1253 en sens inverse. Mais bien sûr, il n’y a pas de sens inverse: juste une continuation de la boucle. Rentrer ainsi à l’hôtel prendrait… 1h10. Nous appelons donc un Uber qui arrive rapidement, et qui pouvant emprunter des raccourcis ne met qu’une demi-heure à nous amener à bon port. Mais une demi-heure durant laquelle il nous secoue tellement que j’ai le coeur au bord des lèvres quand je finis par descendre de sa voiture.

Nous avons le temps de faire un dernier repas dans le centre historique de Sintra. Malheureusement, le Tascantigua où nous serions bien retournés est fermé ce midi, et le Romaria de Baco déjà complet. Après avoir écarté plusieurs restaurants pas très bien notés sur les sites de consommateurs, nous atterrissons dans une ruelle un peu à l’écart, sur la terrasse d’un bar à tapas nommé Tasca do Xico. Rien d’extraordinaire, mais les plats sont corrects. Puis nous faisons un arrêt précipité chez Piriquita pour engloutir les gâteaux habituels dans le quart d’heure qui nous reste.

Nous retournons à la Villa pour récupérer nos bagages et attendons l’Uber commandé pour 14h30. Il nous téléphone à 14h15 pour nous dire qu’il approche, mais qu’il y a énormément de circulation et que ce serait bien si on pouvait venir à sa rencontre. Super pas pratique avec nos bagages et sur une route à peine assez large pour laisser passer les voitures, mais soit. Sauf qu’apparemment, on le croise sans le voir, et réciproquement. Du coup, le voilà parti dans la fameuse boucle. Pour revenir à notre niveau, il lui faudrait probablement trois quarts d’heure. Chouchou annule la course pendant que je passe frénétiquement nos options en revue.

On pourrait reprendre le train jusqu’à Lisbonne puis le métro jusqu’à l’aéroport comme initialement prévu, mais atteindre la gare de Sintra s’annonce très long et très compliqué. Je saute sur un tuk-tuk dans lequel il y a déjà trois passagers pour lui demander si par hasard, il n’irait pas là-bas. Il me répond que non, mais quand je lui expose mon problème, il a la gentillesse de me suggérer une solution: descendre prendre un taxi au bas du centre historique, à l’endroit où le bus nous a déposés hier, car de là on peut quitter la ville sans passer par la maudite boucle. Je le remercie chaleureusement, et nous fonçons.

Je débouche sur la place avec dix mètres d’avance sur Chouchou qui se coltine notre valise. Un taxi roule lentement vers moi. Ses vitres teintées m’empêchent de voir s’il est occupé, mais celle du conducteur est baissée. Je bondis. « Hello, are you free? » « Yes. » « Can you take us to Lisbon airport? » « Yes ». Je pousse un immense soupir de soulagement. Chouchou fourre la valise dans le coffre, et le chauffeur démarre sans attendre qu’il me rejoigne sur la banquette arrière. « Hey, wait for my husband! »

S’en suit un trajet assez sportif. Teint buriné, lunettes de soleil miroir et casquette à carreaux, le chauffeur doit avoir plus de 70 ans et être possédé par l’esprit de Fangio. Il roule comme un dingue, et je regrette de ne pas avoir précisé qu’il devait nous amener jusqu’à l’aéroport vivants et en un seul morceau. Néanmoins, à peine une demi-heure plus tard, il nous dépose devant le terminal 1. Son compteur affiche 42€. Avec les transports en commun, le même trajet n’aurait coûté que 15€ pour nous deux, mais aurait pris pas loin de 2h. Malgré ma frayeur en cours de route, c’est donc de l’argent bien dépensé, auquel j’ajoute un pourboire généreux à rentrer en compta sous l’intitulé « prix de mon anxiété ».

Nous avons au final deux heures et demie à tuer avant le début de l’embarquement de notre vol. Après avoir passé la sécurité, nous débouchons dans un grand espace rempli de chouettes magasins, infiniment plus sympa que le hall des départs de la plupart des autres aéroports que je connais. Nous cherchons vainement de l’huile de foie de morue pour Chouchou avant de nous poser à l’une des tables rondes du food court pour nous désaltérer. Pendant que Chouchou trie les photos des derniers jours, je fais le tour des boutiques. J’essaie un blouson en fausse fourrure archi doux, mais d’une couleur vert pâle dont je ne vois pas trop avec quoi je l’assortirais. Pas grave, j’ai bien assez de vêtements comme ça.

Notre vol de retour est archi-plein. Nous atterrissons à Zaventem à 22h30. Le ciel est plombé et le thermomètre affiche 3°. Welcome to Belgium. Aujourd’hui, j’ai fait 19 000 pas et monté l’équivalent de 45 étages. Je suis épuisée, mais ravie de cette escapade ensoleillée qui clôture à merveille une année globalement très bonne.

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