Ca ne serait jamais arrivé sans le confinement

J’ai pris une photo de moi uniquement vêtue de mon oreiller. Elle est ridicule et c’est mon Instagram le plus liké de tous les temps. Puis j’ai imaginé une reproduction de tableau façon @tussenkunstenquarantaine en mettant Régis à contribution. (Si vous savez qui est Régis, félicitations, vous êtes un très vieux lecteur ou une très vieille lectrice!)

J’ai pris l’habitude de laver tout mon linge de maison à 60°, histoire de ne pas faire tourner une machine juste pour deux masques en tissu. Hé ben effectivement, les draps sont beaucoup plus propres à la sortie. Du coup, sur ma lancée, j’ai nettoyé notre couette.

Pour la première fois de ma carrière, j’ai refusé une trad que j’aurais théoriquement eu le temps de faire parce que j’avais trop de mal à me concentrer et trop besoin de souffler. Incroyable: le ciel ne m’est pas tombé sur la tête. 

J’ai adopté le casque anti-bruit, génial quand on est deux free lance à bosser dans un espace réduit et que l’un passe sa vie en vidéo-conférence tandis que l’autre a besoin de silence pour se concentrer. Quand je pourrai de nouveau prendre le train, je suis certaine que ça rendra mes voyages bien plus agréables.

J’ai souscrit un abonnement annuel à l’app Breethe, un peu pour ses méditations guidées à thème (dont un spécial coronavirus!) mais aussi pour ses playlists de sons de nature ou de musique apaisante – la seule chose qui ne m’empêche pas de travailler ou de lire en même temps.

Je regarde des concerts improvisés par des artistes confinés comme tout le monde. J’ai ainsi découvert la musique sautillante de M (que, OK, je devais être la seule à ne pas connaître) mais aussi le joli folk de The Bookshop Band.

Je me suis mise à fréquenter le magasin bio Sequoia de la place Jourdan, où tout coûte un rein mais où il y a des trucs vraiment sympas qu’on ne trouve pas chez Delhaize (genre les Cracotte à la châtaigne, au maïs ou au riz noir). J’ai aussi testé le Drive Carrefour, et ça par contre, je ne recommencerai jamais.

Mes commerçants préférés sont venus sonner à notre interphone pour m’apporter des livres et des cocktails. Une lectrice jamais rencontrée en vrai est également passée récupérer un puzzle dans le hall de notre immeuble, et j’étais bien contente de lui rendre ce petit service.

Je me suis mise à FaceTime: d’abord pour une téléconsultation avec mon généraliste, puis pour montrer ma tête à ma mère qui ne m’a pas vue depuis juillet dernier. Avant ça, je ne savais même pas que je pouvais l’utiliser avec mon iPad…

J’échange des petits mots de soutien avec des inconnus du monde entier qui publient une photo de la vue par leur fenêtre sur un groupe Facebook très vite devenu viral. J’ai notamment discuté avec une dame qui habite tout près des Jardins de la Baie à Singapour, et à qui j’ai expliqué que c’était mon Endroit Heureux sur Terre.

Pour la première fois de ma vie, je pleure non pas de tristesse ou d’épuisement nerveux, mais juste d’émotion devant la bienveillance de certains. L’amie qui m’a envoyé des masques en tissu depuis la Suisse à l’époque où on ne pouvait rien acheter nulle part. La dame de Sobica qui a joint un cadeau et un mot adorable à ma commande de thé, en me laissant la payer quand j’aurais reçu le Colissimo International. 

Je me suis décidée à parler d’anxiété sans fard sur le blog, ainsi qu’avec d’autres gens de mon entourage qui souffrent de troubles mentaux handicapants. J’ai aussi accepté l’idée que j’avais sans doute besoin de reprendre des anti-dépresseurs, peut-être à très long terme.