Conseils à mon Moi futur pour surmonter le stress de ce printemps

Chère Moi de demain, des jours et des semaines qui vont suivre,
Depuis un mois, tu connais pas mal de déboires liés à la gestion de tes déplacements. Il y a d’abord eu la découverte que Chouchou s’était trompé en prenant vos billets de train pour Paris, environ une heure avant le départ. Puis la grève des cheminots qui, bien que tu la soutiennes absolument, t’a obligée à un gymkhana compliqué et stressant au possible, que tu devras recommencer au minimum le mois prochain. Par réverbération, tu as failli faire un malaise en payant les billets d’avion pour Hong Kong et Singapour et en imaginant tout ce qui pourrait merder d’ici fin septembre pour foutre en l’air ce voyage ruineux. D’autant que tu n’es même pas certaine d’avoir encore du boulot après fin mai (tu as de bonnes raisons d’espérer que tu trouveras quelque chose d’ici là, mais tu es du genre à ne pas considérer la peau de l’ours comme vendue avant d’avoir encaissé le chèque). A côté de ça, tu te retrouves cette année dans une situation fiscalement bâtarde qui t’oblige à payer tes charges sociales en double pendant 16 mois, qui t’a donné des sueurs froides en remplissant ta déclaration Agessa et qui t’en donnera de bien pires encore quand tu devras déclarer tes revenus de l’an dernier au Trésor Public d’ici début juin. 
Bref, nerveusement parlant, tu es au bout de ta vie. 

La bonne nouvelle, c’est qu’il existe des moyens de tenir le coup plus ou moins sereinement. Comme tu as tendance à les oublier quand ta tension monte à 58, je m’en vais te faire une piqûre de rappel. 
Quand un problème se manifeste, il est très rare qu’il doive être résolu dans la minute. A moins d’un début d’incendie chez toi ou d’une personne en train de se vider de son sang à tes pieds, tu peux t’accorder le temps de te calmer, de prendre un minimum de recul et de réagir à tête reposée plutôt que sous le coup d’une précipitation souvent mauvaise conseillère. 
Je te connais; tu vas répliquer: « Oui mais justement, je ne PEUX PAS me calmer tant que le problème n’est pas sous contrôle ». En fait, si, tu peux, mais ça te demande un ENORME effort. Le meilleur moyen d’y parvenir (dans la mesure où le Xanax n’a plus aucun effet sur toi depuis 2 ou 3 ans) (ce qui est fort regrettable, je te l’accorde), c’est de détourner ta propre attention le temps que les symptômes physiques du stress s’atténuent d’eux-mêmes. Pour cela, tu peux au choix:
– Te plonger dans un bouquin passionnant, quitte à relire dix fois le même paragraphe au début parce que tu n’arrives pas à te concentrer. Fais-moi confiance, ça finira par venir.
– Te lancer dans une activité répétitive et un peu abrutissante: 50 parties de Candy Crush d’affilée, par exemple. Farm Hero, ça marche aussi. 
– T’absorber dans une activité facile mais productive qui, une fois terminée, te procurera en outre un sentiment d’accomplissement très efficace pour contrebalancer ton stress. C’est le moment de faire un nouveau tri dans ta garde-robe, un grand ménage dans ta boîte mail, d’expédier quelques tâches administratives chiantes mais nécessaires ou encore de prendre de l’avance sur ton quota de pages des prochains jours. 
– Penser à tous les problèmes plus graves que tu N’AS PAS. En cas de panne d’imagination, un petit tour sur le site de n’importe quel grand quotidien ne te remontera pas le moral mais devrait te permettre de relativiser. Parce qu’une galère de train à côté des malheurs du monde, c’est juste ridicule.
– Discuter avec quelqu’un – si possible, quelqu’un de rigolo et/ou de bienveillant – pour te changer les idées. Peu importe le sujet, pourvu que ça ne soit pas la cause de ton stress. 
N’oublie pas que physiologiquement, ton cerveau est une machine conçue pour produire des pensées en continu, mais que ces pensées ne sont pas des faits. Que statistiquement, la réalisation de tes pires craintes est assez improbable, ce que tu as maintes fois pu vérifier d’un point de vue empirique. Les vrais gros problèmes que tu as eus dans ta vie, tu ne les avais pas anticipés. (Et non, flipper pour tout et n’importe quoi ne te mettra pas à l’abri par élimination. L’angoisse n’est PAS une méthode de prévention.) Les images de catastrophe que t’envoie ton cerveau sont juste ça, des images, pas un tigre dans la pièce où tu te trouves. Répète après moi: il n’y a pas de tigre dans la pièce où tu te trouves. En cas de besoin, relis « Le pire n’est pas toujours à venir ! » qui t’a été si précieux l’an dernier à la même époque, et dont les effets bénéfiques se sont peut-être estompés avec le temps. Un petit rafraîchissement ne te fera pas de mal. 
Une fois calmée, tu pourras t’atteler à chercher des solutions. Et en te creusant un peu la tête, tu verras qu’elles ne manquent pas. Pour tes angoisses déclaratives, tu peux te renseigner un maximum avant de remplir les papiers, joindre des explications sur le calcul effectué et bien conserver tous tes justificatifs en cas de contrôle. Pour tes problèmes de train, tu peux utiliser les formulaires en ligne, demander des conseils aux CM de la SNCF et de Thalys sur internet, te rendre dans une gare française, téléphoner en t’armant de patience et en n’oubliant jamais que tes interlocuteurs seront toujours plus disposés à aider une personne polie qu’une autre rendue désagréable par le stress. Si le train ne passe pas et que tu dois absolument te déplacer, il reste le bus – oui, c’est long, très long – ou le covoiturage – oui, c’est long, très long, et en plus, il faut parler à des gens. Mais nécessité fait loi.

Et puis si ça se trouve, tu vas mourir d’une rupture d’anévrisme pendant la nuit et tu te seras inquiétée pour que dalle. Alors fais tout ce que tu peux raisonnablement faire pour prévenir les problèmes: l’assurance annulation sur les billets d’avion pour Hong Kong et Singapour, franchement, c’était 130€ bien dépensés pour te tranquilliser, et quand tu chercheras tes hébergements sur place, utilise « conditions d’annulation flexibles » comme critère n°1 sur Air B’n’B. Ensuite, vis un jour après l’autre. Affronte les problèmes au fur et à mesure qu’ils se présentent dans la réalité et non pas au fur et à mesure qu’ils jaillissent dans ta tête. Etre prévoyante, c’est bien. Retenir ton souffle en attendant une catastrophe qui ne se produira peut-être sans doute pas, c’est te faire beaucoup de mal pour rien.

Dernier conseil pratique: au cas où tes voyages en train des deux prochains mois se révèleraient chaotiques, n’oublie pas que tu les vivras d’autant mieux que tu auras sur toi tout le nécessaire pour prendre ton mal en patience, et rien d’autre que le nécessaire afin de ne pas t’alourdir. Le petit sac à dos Fjällräven pour remplacer ta valise à roulettes, c’était une super idée. Mets-y ton MacBook et ton iPad avec 2-3 bouquins Kindle pas encore lus, ta petite bouteille isotherme et quelques trucs pas fragiles à grignoter; un grand foulard à tout faire; une culotte de rechange et tes médicaments au cas où tu te retrouverais coincée hors de chez toi pour une nuit. Après… dis-toi que d’une façon ou d’une autre, tu finiras par arriver à destination, et tâche de considérer tout ce qui se passera d’ici là comme une aventure.

J’ai confiance en toi, tu peux le faire.

9 réflexions sur “Conseils à mon Moi futur pour surmonter le stress de ce printemps”

  1. Cela fait quelques années maintenant que j'essaie d'appliquer cette technique: à chaque angoisse, il y a une réponse sensée. C'est grâce à elle d'ailleurs que j'arrive à partir seule en voyage par exemple. Après ça ne fonctionne pas toujours, il y a toujours des moments plus compliqués.

    Je me dis aussi que s'il y a une tuile, je trouverai des solutions, même dans le pire des cas. Je me suis toujours sortie de toutes les situations pénibles jusqu'à présent.

    Autre chose qui aide aussi, c'est le temps, mais c'est dur quand on est impatiente 😉 (là, j'aimerais être quelques mois plus loin, avec un compromis signé pour la vente de la maison).

  2. A afficher en gros et à relire régulièrement, non ?

    J’y ajouterais ma technique perso : «  Bon, maintenant que j’ai envisagé le pire, si ce « pire » arrive, quelles en sont les conséquences ? Sont-elles vraiment graves ? Vont-elles faire s’écrouler le monde, ma vie ? Ou sont-elles réparables ? Ou même ne sont-elles qu’un simple moment d’inconfort ou de déception ?  »
    Eh bien, 9 fois sur 10 au moins, ça se traduit par la dernière réponse … Un truc pénible à gérer, mais sûrement pas une véritable catastrophe. Une fois admis qu’en plus je pourrais sûrement trouver de l’aide pour gérer ce truc, ça passe beaucoup mieux.

    Mais bon, à 4h du matin, j’ai un peu de mal à appliquer cette méthode, j’avoue.

  3. @elmaya: Ah oui, le pire, c'est le soir, quand tu es dans ton lit, qu'il fait noir et que tu n'as rien pour te distraire de la spirale anxiogène de tes pensées. J'essaie de faire des exercices de respiration ou de méditation, ou je me force à réfléchir à tout autre chose: un problème de traduction, un projet qui n'a rien à voir…

  4. Bonjour Armalite,
    je suis une fidèle lectrice qui ne commente que très rarement. Bref, concernant les angoisses, j'ai remarqué un pic assez alarmant depuis que je prends un traitement hormonal contre l'endométriose… Cette explication n'est pas une solution mais elle peut aider à relativiser peut-être? Bon courage! (bonne chance?^^)

  5. @Clo: j'étais déjà angoissée longtemps avant qu'on ne découvre mon endométriose, ça fait juste partie de mon caractère je pense!

  6. oui, moi aussi, mais justement, ça amplifie le truc (enfin chez moi en tous cas c'est assez flagrant)

  7. Chère Armalite,

    Je ne commente quasiment jamais, j'ai du le faire 2 fois en 10 ans, mais là, en fait, il faut que je te dise que viens d'imprimer ton billet. Oui, oui, il est là, prêt à être relu le nombre de fois qu'il faudra. Je le mettrai ce soir sur ma table de nuit.

    Et tiens, hop, les commentaires aussi tant qu'on y est!!

    Tu arrives à gérer de la même façon les anxiétés de santé? (mon pb numéro 1 à l'heure actuelle).
    L'ouvrage que tu mentionnes peut être utile dans ce cas là?

    Bon printemps!!

  8. @Mâche: Je suis toujours ravie que l'exploration de mon propre nombril puisse être utile à quelqu'un d'autre 😀 Je n'ai plus d'anxiétés de santé, ou disons très peu et gérables, depuis un an et demi, et ce bouquin est l'un des trucs qui m'a fait un déclic crucial. Mais c'était aussi parce que j'avais beaucoup préparé le terrain avant, je pense. J'avais écrit un billet là-dessus:
    http://leroseetlenoir.blogspot.fr/2017/09/la-fin-de-lanxiete.html#more

  9. Utile à d'autres, je confirme. En tout cas je vais faire en sorte que ça le soit. Merci !

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