« J’ai survécu à la soirée d’inauguration de Livre Paris », un témoignage poignant de notre envoyée spéciale

Jeudi midi, une heure avant le départ de l’Izy qui doit nous emmener à Paris où j’assisterai le soir même à l’inauguration de Livre Paris, je vérifie les billets achetés par Chouchou mi-janvier et imprimés la veille. 
Ils sont au départ de Paris Nord et à destination de Bruxelles. Bien entendu, non échangeables et non remboursables. 

Tout en faisant une crise de nerfs doublée d’une attaque de panique à peine rentrée (et en m’insultant pour ne pas m’être aperçue du problème plus tôt), je me rue sur internet en quête de solutions alternatives. L’Izy du jour au départ de Bruxelles s’en est allé à 10h et des poussières. Le Thalys? Coup de bol, il reste des places dans celui de 14h43. Mais elles sont à 99€. Glups. 
Comme je ne veux absolument pas manquer cette soirée, je fais péter la carte Visa en résolvant d’annuler la séance de réflexologie bookée depuis un mois et demi avec M. Oh la semaine prochaine pour compenser. Quant à Chouchou, vu qu’il n’est pas censé m’accompagner à Livre Paris et se fiche de l’heure à laquelle il arrivera à Paris, il se prend un ticket de bus Oui SNCF, Bruxelles-Lille, 2 heures d’attente, Lille-Paris pour 17€. Mais il est 12h, le bus part de la gare du Midi à 12h50, Chouchou n’a pas fini ses bagages et l’imprimante ne se décide pas à cracher son billet. Il part en courant et, la porte à peine refermée derrière lui, je lâche une bordée de jurons à faire rougir le capitaine Haddock.
Plus tard, je reçois un texto m’informant qu’il a réussi à avoir son premier bus. La suite n’est plus de mon ressort. 
Je suis tellement anxieuse que de mon côté, j’arrive à la gare une heure et demie avant le départ de mon Thalys. J’embarque dès qu’il arrive à quai et… il ne démarre pas. Dix minutes passent. Puis vingt. Personne ne nous dit pourquoi ce foutu train ne part pas ni quand il espère partir. Au bout d’une demi-heure, il se met enfin à rouler. Ma tension est à 49. Je n’ai pas de siège réservé et tous les fauteuils sont occupés; de plus, mon iPad décroche systématiquement du wifi au bout de dix secondes. De toute évidence, les dieux du voyage estiment qu’ils ne m’ont pas embêtée depuis trop longtemps, et ils mettent le paquet pour se rattraper en une fois. 
J’arrive gare du Nord en retard de 29mn (juste pas assez pour avoir droit à une quelconque compensation). Je me dirige vers la ligne 4 du métro. Dans cette station, elle est fermée pour travaux depuis 3 jours. OK OK OK. Je prends la 5 jusqu’à gare de l’Est, récupère la 4 jusqu’à Montparnasse et change pour la 12 jusqu’à porte de Versailles. Là, une petite foule se masse au bas des escaliers du métro, attendant la fin d’une averse diluvienne. Tous les gens sont là pour l’inauguration, et je surprends une conversation entre deux éditeurs: « De toute façon, là, si t’as pas de badge mais juste une invitation, bon courage avec les centaines d’autres pékins qui doivent déjà attendre l’ouverture des portes ». 
Il est 17h30, les portes ouvrent à 18h, je passe une demi-heure délicieuse plantée devant l’entrée à contenir le début d’un AVC au milieu de gens qui clopent ou racontent des conneries d’une voix très forte histoire que personne n’en perde une miette. Je hais le reste de l’humanité. 
…Ce qui est fort dommage pour moi, car l’humanité est effectivement venue en très grand nombre pour cette soirée. Je n’avais pas mis les pieds à Livre Paris depuis 2011 et je ne me souvenais pas d’avoir dû affronter une marée pareille à l’époque. Je passe la soirée à jouer des coudes pour me frayer un chemin parmi les allées bondées à la recherche de gens que je ne réussirai jamais à trouver (Anne-France, Maëlle, Hania – si vous me lisez: je vous jure que j’ai essayé!). J’arrive à attraper deux verres de mousseux mais pas le moindre truc à grignoter, et mon estomac proteste vigoureusement. 
Au passage de Micron, je me retrouve coincée par le service d’ordre à côté d’une dame d’un certain âge qui roucoule: « Pour une fois qu’on a un président qui lit… Et puis il est si mignon! ». Et pas la moindre tomate pourrie sous la main, juste des piles de pauvres bouquins innocents que le service d’ordre bouscule sans le moindre égard. Le monde est mal fait, je vous jure. 
Entre deux bains de foule, je parviens néanmoins à discuter avec des gens pas vus depuis longtemps. Barbara se plaît beaucoup dans sa nouvelle maison et commisère avec moi sur le thème de la charge mentale. Elvire colle un sticker #AuteursEnColère sur mon sac. Leslie a toujours le pendentif poulpe rose un peu moche que je lui avais offert il y a… dix ans? Alain paraît étonnamment en forme et heureux; je le tanne pour qu’il me file des trads bien payées histoire de financer mes vacances d’automne en Asie. Claire a un nouveau tatouage sublime, fait par un artiste londonien qui l’a créé en s’inspirant du récit de sa vie. Céline quitte bientôt Bruxelles pour rejoindre son chéri aux Pays-Bas. Yoann est rentré du Brésil. Je suis hyper contente d’échanger des nouvelles – même si le bas de mon dos commence à hurler silencieusement qu’il n’en peut plus de piétiner depuis des heures. Quand le service d’ordre nous met dehors un peu avant 23h, je suis partagée entre « Quoi, déjà? » et « Merci mon Dieu, je vais pouvoir rentrer m’allonger ». 
…Enfin, je vais pouvoir rentrer, c’est vite dit. Car la circulation sur la ligne 12 du métro (la seule qui dessert le Parc des Expositions) est interrompue pour une raison inconnue. Même chose sur le tram 3a, avec un prochain passage estimé dans « +60 », soit plus d’une heure. Les dieux du voyage font des heures sup’ rien que pour moi, je suis flattée (ou pas). Heureusement, Super Gérard aux basques de qui je me suis accrochée tel le boulet moyen repère un bus de substitution bondé où je fais de gros efforts pour ne pas me mettre à hyperventiler. Il nous emmène Porte de Vanves, où on chope la 13. Après ça, je n’ai plus qu’à changer à Montparnasse pour reprendre la 4 jusqu’à Strasbourg-Saint-Denis. 
Minuit est passé depuis belle lurette quand j’arrive à l’appartement Air B’n’B où Chouchou m’attend depuis 20h20 – son voyage a été moins mouvementé que le mien, mais considérablement plus long. Entre mon énervement qui ne retombe pas, mon estomac qui fait grouik et le lit de notre hôtesse, bien trop mou pour moi, je ne ferme pas l’oeil de la nuit. Or le lendemain, j’ai un rendez-vous pro hyper important à 11h. Y’a des jours où je donnerais TELLEMENT cher pour un Xanax.

1 réflexion sur “« J’ai survécu à la soirée d’inauguration de Livre Paris », un témoignage poignant de notre envoyée spéciale”

  1. Je crois que les angoissé(e)s ont en commun de savoir faire rire de leurs angoisses.
    Et j’adore Micron, vraiment.

    Ariane

Les commentaires sont fermés.

Retour en haut