Si j’étais un homme, je me ficherais que les toilettes des trains, des bars et des restos soient propres ou pas puisque je n’aurais pas besoin des abdos de Schwarzenegger et du sens de l’équilibre d’une acrobate chinoise pour faire pipi en position de squat sans toucher la cuvette.
Si j’étais un homme, j’aurais perdu ma virginité en deux minutes chrono vaguement honteuses au lieu de batailler avec un hymen en titane pendant des mois.
Si j’étais un homme, j’aurais eu la pression d’arriver à bander et à maintenir mon érection assez longtemps à chaque rapport sexuel, mais jamais l’ennui de devoir feindre l’orgasme pour en finir avant que le caoutchouc du préservatif ne commence à fondre.
Si j’étais un homme, moi aussi, j’aurais pu me contenter de demander « Et tu comptes faire quoi? » au lieu de devoir subir une IVG la veille de Noël. Et la peur de retomber enceinte malgré la contraception n’aurait pas hanté toute la suite de ma vie sexuelle. Par contre, je me serais peut-être demandé si je n’avais pas un enfant quelque part à l’insu de mon plein gré.
Si j’étais un homme, je n’aurais jamais connu les douleurs paralysantes de l’endométriose et le défilé de gynécos qui m’ont traitée de chochotte pendant vingt ans avant que l’un d’eux ne finisse par me diagnostiquer.
Si j’étais un homme, j’aurais été objecteur de conscience et j’aurais sacrifié deux ans de ma vie au lieu d’un pour ne surtout pas faire l’armée.
Si j’étais un homme, j’aurais sans doute eu des rapports plus faciles avec ma mère, mais encore plus conflictuels avec mon père.
Si j’étais un homme, on ne m’aurait jamais conseillé de mettre mon intelligence et ma personnalité en veilleuse pour ne pas faire fuir un(e) partenaire potentiel(le). Et le fait que je gagnais plus d’argent que l’autre n’aurait pas été un énorme problème dans mes deux premières relations sérieuses.
Si j’étais un homme, personne ne m’aurait reproché de manquer d’empathie ni n’aurait été surpris par mon absence totale de romantisme. Quand j’aurais dit que la Saint-Valentin, je n’en ai rien à foutre, on m’aurait pris au mot au lieu de commencer par soupçonner que je disais ça tout en espérant que ma moitié me fasse une surprise et marque le coup quand même.
Si j’étais un homme, j’aurais très mal vécu ma petite taille (comme mon père qui ne dépassait pas 1,60 m et qui en a été complexé toute sa vie). Et j’aurais encore plus galéré pour trouver des chaussures à ma pointure.
Si j’étais un homme, je n’aurais jamais claqué des fortunes en fringues, en maquillage et en coiffeur, ni passé tant de temps à me soucier de mon apparence. Tous les matins, j’aurais enfilé un jean et un T-shirt de geek, et basta. Je serais devenue riche avec l’argent économisé, et probablement maître du monde en mettant à profit le temps et l’énergie que je n’aurais pas gaspillés bêtement. Du coup, personne n’aurait osé se moquer de ma petite taille.
Si j’étais un homme, j’aurais bataillé avec les poils de ma figure au lieu de batailler avec ceux de mes mollets. Et je me serais inquiété de voir mes cheveux tomber au lieu de devoir les dompter tous les matins.
Si j’étais un homme, plus jeune, je ne me serais jamais demandé comment m’habiller et par où passer quand je sortais seule le soir. Aujourd’hui encore, je ne me raidirais pas en cherchant instinctivement les chemins de fuite lorsque je croise un inconnu dans une rue sombre.
Si j’étais un homme, je n’aurais pas eu peur de voyager seule hors d’un environnement aussi sécurisant que possible.
Si j’étais un homme, on ne dirait pas de moi que je suis peu commode, voire désagréable ou hystérique quand je refuse de me laisser marcher sur les pieds: on me respecterait de toujours défendre mes propres intérêts.
Si j’étais un homme, je pourrais me permettre de soutenir mollement les féministes sans que leur combat ne me paraisse essentiel ni ne me préoccupe outre mesure, puisqu’il ne me concernerait pas. Par exemple, je ne comprendrais pas pourquoi ma compagne se met en rogne quand il n’y a aucune artiste femme dans l’expo qu’on va voir, et j’aurais sans doute du mal à saisir l’importance de la représentation.
Si j’étais un homme, ni biologiquement destiné à les porter pendant neuf mois ni socialement pressurisé à faire passer leur bien-être avant le mien et perpétuellement jugé pour la façon dont je me comporte vis-à-vis d’eux, j’aurais peut-être voulu des enfants. J’aurais été un père comme le mien, sévère et émotionnellement distant.
Ce n’est pas que je déteste être une femme – en vérité, mon sexe et mon genre, je m’en fous complètement en soi. Mais ma vie serait tellement plus simple si j’étais un homme.
Ton texte me parle énormément…
Bisous Nad
C'est si justement dit !
J'avais aussi beaucoup aimé cet article de Baptiste BEAULIEU:
http://www.aufeminin.com/news-societe/baptiste-beaulieu-sexisme-s1638030.html
Pimprenelle
En soi on s'en fout d'être des femmes.
On voudrait juste que le reste du monde s'en foute aussi…