La fin de l’année approchant, et mes tendances naturelles étant ce qu’elles sont, j’ai commencé à dresser un bilan de 2017. Et au premier abord, il n’était pas très excitant. Je me suis dit que ça avait été une année où rien n’avait bougé dans ma vie. Je fais le même métier depuis 23 ans; je vis dans les mêmes apparts depuis respectivement 15 et 9 ans; je suis avec le même mec depuis 11 ans. Entre le 1er janvier et le 31 décembre, tout ce que j’aurai réussi à faire, c’est gagner quelques kilos surnuméraires, perdre quelques centimètres de cheveux et m’éloigner encore davantage de ma famille. Tu parles d’un accomplissement.
Puis j’ai poussé ma réflexion un peu plus avant. D’accord, je fais le même métier depuis une éternité, mais c’est un métier parfait pour moi comme aucun autre ne pourrait l’être. Et si je n’ai pas décroché de nouveau client majeur cette année malgré de timides tentatives, j’ai reconnecté avec mon plus vieux client qui ne me donnait plus de boulot depuis deux ans (et qui m’a augmentée au passage sans que je lui demande rien); je suis sur une piste qui m’en apportera sans doute un autre en 2018, et surtout, à l’intérieur de mon pool d’éditeurs actuels, j’ai pu réorienter mon travail vers des genres contemporains – thriller, jeunesse, feel-good – en consacrant moins de temps à la fantasy et à l’urban fantasy dont je me suis lassée. Si ce n’est pas spectaculaire, c’est tout de même une évolution dans le bon sens. Et puis je suis terriblement reconnaissante de n’avoir toujours connu aucune période de chômage technique en ces temps difficiles pour toute ma profession. En somme, je n’ai que des raisons de me réjouir.
Etre avec le même mec depuis 11 ans, en dépit des hauts et des bas de notre relation, ça aussi, c’est un point très positif. J’apprends à construire dans la durée, en un choix mûrement réfléchi. A ne plus être esclave de mes instincts d’évitement et de fuite. Et si mes lieux de vie ne me donnent pas entière satisfaction, je ne suis pas du tout disposée à investir l’argent, le temps et l’énergie nécessaires à un déménagement. D’autant que, les problèmes de ces appartements n’étant apparus qu’au fil du temps, je pourrais très bien me retrouver dans un endroit a priori mieux mais où, à terme, les choses seraient pires! Donc au final, ce que je considère comme de l’immobilisme est juste dû au fait que… je suis bien où je suis, géographiquement, affectivement et professionnellement parlant – alors pourquoi changer?
Je me trouve aussi un peu culottée de penser immobilisme alors que nous n’avons jamais autant bougé en l’espace d’une année. D’accord, nous ne sommes pas allés très loin, mais nous sommes partis souvent: Lisbonne en mars, la Suisse en avril, Oslo en juin/juillet, Galway et Dublin en octobre, et nous passerons le Jour de l’An à Cologne. Quant au grand voyage à l’autre bout du monde, ce sera pour l’automne 2018, et j’en trépigne d’avance.
Et puis… Si peu de choses ont changé à l’extérieur, j’ai quand même subi une vraie révolution positive à l’intérieur. Je maîtrise désormais les angoisses qui m’ont pourri la vie pendant plus de dix ans. Quand elles pointent le bout de leur nez, j’arrive en utilisant plusieurs des techniques de ce bouquin à mettre de la distance entre elles et moi, ou à les ignorer jusqu’à ce qu’elles disparaissent. J’ai fini par assimiler réellement le fait que mes pensées n’étaient pas la réalité mais juste le produit automatique de mon cerveau, et que je devais pas leur accorder de crédit indu. Si elles commencent à s’engager dans la pente glissante du catastrophisme, je leur ris au nez; je chante très fort et très faux dans ma tête pour les ridiculiser; j’ouvre les yeux et constate qu’il n’y a PAS de tigre à dents de sabre devant moi; je me récite la liste de toutes les fois où j’ai cru être en train de mourir et en fait pas du tout; je m’absorbe dans une occupation prenante qui permet à mon esprit rationnel de reprendre les commandes. Et ça marche.
Au final, cette année 2017 n’aura comporté que deux points noirs: mes relations de plus en plus ténues avec ma famille (un problème que je ne détaillerai pas ici parce qu’il ne concerne pas que moi), et une actualité mondiale hyper préoccupante. J’ai fini par admettre que je ne pouvais pas remédier aux premières et n’avais aucune influence sur la seconde. Alors, malgré ma tristesse et mon inquiétude, je n’ai pas d’autre choix qu’accepter cet état de fait et profiter un maximum du reste. Et croyez-moi: je profite bien.
Elle est plus "stable" qu'immobile 🙂 Et comme tu écris toi-même que tu as progressé, et qu'il t'est arrivé de bonnes choses inattendues, c'est une année stable et qui avance : la tortue de La Fontaine : lentement, calmement, mais sûrement !
@TheEverydayFrenchGirl: C'est une bonne remarque, parce que comme je m'ennuie vite, je confonds facilement stabilité et immobilité, en effet!
Je suis aussi d'accord, ton idée est un peu faussée, mais c'est bien de le reconnaitre 🙂 Parfois, je me dis que je suis comme toi, peut être impatiente, je voudrais que ce soit une sorte de mini révolution permanente. Mais au fond, qu'est ce donc qu'un changement permanent, si ce n'est une simple fuite en avant ? La stabilité, la construction dans le temps… malgré ce monde qui va trop vite, qui nous incite à, c'est cela qu'il faut qu'on prenne le temps de retrouver et bâtir, jour après jour 🙂 Patience est mère de vertu parait-il 🙂