Depuis que sept jeunes gens ont péri au cours d’une tempête durant l’hiver 1914, les habitants de la petite île d’Hustrun, au large des côtes suédoises, vouent une haine tenace à la famille Engström qu’ils tiennent pour responsable du drame. Aujourd’hui, ils ne sont plus très nombreux à vivre encore là toute l’année. Mais Ellinor Ingman, elle, n’a jamais pu partir. Suite au décès de son petit frère et au suicide de sa mère, elle s’est retrouvée coincée là avec son vieux père infirme.
Elle est l’âme d’Hustrun, celle qui conduit le bateau-taxi assurant la liaison avec la côte, celle à qui les estivants envoient leurs enfants pour les occuper, celle à qui tout le monde vient emprunter ce qui lui manque. Celle que personne n’aide jamais et qui doit toujours se débrouiller seule. Jusqu’au jour où Hermann Engström, devenu un célèbre peintre d’oiseaux, revient à Hustrun pour la première fois depuis près de 40 ans. Ellinor est son grand amour de jeunesse, et il ne l’a jamais oubliée. En revanche, c’est à peine si elle semble se souvenir de lui…
C’est un roman lent et contemplatif que « Par-delà les glaces« , qui s’attache à décrire la difficulté de la vie sur Hustrun – une île qui ne possède même pas l’électricité! – mais aussi l’âpre beauté de la nature sous ces froides latitudes. « Femme tout-terrain », Ellinor mène une existence ingrate, avec ses bêtes pour seule compagnie et la poésie pour seul réconfort. Elle a refoulé tous ses désirs et même une partie de son passé afin de se plier docilement aux caprices d’un père tyrannique. L’arrivée d’Hermann signale pour elle le début du dégel. Des flashbacks poignants dévoilent peu à peu ce qui s’est passé en 1914, plantant la toile de fond des événements actuels. Au passage, l’auteure souligne en filigrane combien l’histoire est écrite par les hommes, combien le rôle pourtant essentiel des femmes est longtemps demeuré invisible.