Ce que j’ai fait à Paris au lieu d’aller voir l’expo Hockney

Levons-nous à 6h30 pour aller à Paris voir des expos dans des musées fermés ce jour-là. / Soyons raisonnables, je vais juste prendre un chausson aux pommes pour tenir jusqu’à 13h. / C’est bon Chouchou, la place à côté de moi est libre, tu peux me rejoindre en voiture 5. / 70 pages de considérations techniques pour commencer une histoire de voyage dans le temps qui en fait à peine 300, était-ce bien nécessaire? / J’ai bien fait de mettre des collants fins et la robe King Louie récupérée à la dernière troc party plutôt que de rester jambes nues sous une robe d’été: il ne fait pas si chaud que ça. / Rhâ, j’aurais dû écouter mon instinct: la partie de la rue Bonaparte où se trouve Lupicia est de l’autre côté de l’église. / Deux boîtes et deux sachets de 50g, ce n’est pas tant que ça, surtout si on considère que je n’ai acheté aucune nouvelle variété de thé depuis des mois. / Même en regardant l’étiquette du prix, comment résister à un dentifrice menthe-coriandre-concombre? Surtout quand le packaging est aussi sublime? / Le soleil tombe du mauvais côté pour mon selfie de pieds, quel manque de considération.

Quand soudain, dans la vitrine du Monoprix juste avant le musée Maillol, la collection Make Lemonade me fait de l’oeil. La mignonne robe crème à pois jaune aura l’air d’un sac sur moi, mais le sweat-shirt avec son coeur en relief sera parfait pour traîner à la maison cet hiver. / Encore une expo où les photos sont interdites? Vous faites chier, les gens. A 13€ l’entrée, je voudrais pouvoir instagrammer ma visite tranquillement plutôt qu’en dégainant mon Lumix en douce – mais si je n’ai pas le choix, je dégainerai mon Lumix en douce entre deux passages des gardiens. / OK, moi je vais déjeuner avec mon Editrice Chérie, et on se retrouve à 15h30 à la sortie du métro Belleville pour un shooting devant le street art de la rue Dénoyez.

Vu mes griefs contre Gallimard, je ne suis pas spécialement motivée pour leur filer des sous, mais j’ai trop envie du dernier Sophie Fontanel. Oui, là tout de suite. Et aussi de ce roman de Christophe Boltanski dont je n’ai jamais entendu parler malgré son prix Femina 2015. / J’ai bien fait d’emporter un tote bag « juste au cas où »: en plus du bouquin que je lui avais demandé, mon Editrice Chérie me file le roman de Maureen Wingrove dont elle a pensé qu’il pourrait me plaire. Je vais mourir de l’épaule droite d’ici ce soir, mais j’aurai de la lecture pour un moment. (Genre, une semaine.) / Les anecdotes incroyables, et malheureusement irracontables ici, du milieu de l’édition. / La comète biscornue hésite comme moi entre le poulet aux morilles et le sauté de veau aux artichauts; elle se décide pour le poulet aux morilles et j’en fais autant histoire d’être certaine de ne pas regretter – j’ai l’habitude solidement ancrée de choisir toujours le truc le moins bien et de passer ensuite le repas à lorgner sur l’assiette de mon voisin. / Même après avoir été mise au courant de la débâcle mailesque de cet été (« Vous aurez cinq mois pour traduire ce livre. » « Vous rigolez? Cinq semaines suffiront largement. » *silence infini à l’autre bout d’internet*), mon Editrice Chérie m’engueule de n’avoir pas contacté davantage de ses collègues pour leur réclamer du boulot. / Il a l’air vraiment pas terrible ce millefeuilles aux framboises, mettez-m’en un que je vous aide à le finir par pur esprit de sacrifice.

Les fresques de la rue Dénoyez viennent d’être démolies – circulez, il n’y a plus rien à voir. / Pas d’agenda 2018 intéressant dans l’ex-librairie anglaise de l’avenue de l’Opéra, mais un savon parfum mojito qui sent délicieusement bon. / Ah, chic, le tome 7 de « The ancient magus bride » est dispo chez Komikku! / Par contre, l’épicerie japonaise d’en face n’a plus de biscuits en forme de panda, c’est scandaleux. / Oui, je sors à peine de table, mais comment résister aux fabuleux dorayaki de Tomo? Je vais prendre celui du chocolat blanc et au matcha, pour changer un peu. Avec un cocktail frappé matcha-menthe histoire de me rafraîchir, parce que la température a bien monté en cours de journée et que je bous dans ma robe King Louie. / Un petit tour dans les passages couverts en attendant l’heure d’aller chez Juji-ya. / Le loup empaillé avec des ailes et une rivières de diams autour du cou, c’est un concept. On n’a pas dit que c’était un *bon* concept. / Le problème, c’est que j’ai passé la journée à bouffer et que là, je n’ai plus du tout faim, même pour ce délicieux poulet frit. Pas grave, je vais demander qu’on me l’emballe et je le mangerai dans le train. / Euh, sauf si Chouchou engloutit tout mon bento en plus du sien. / Passage aux toilettes pour retirer mes collants en nylon qui m’ont littéralement brûlé l’arrière des cuisses. / Tuons la dernière demi-heure chez Junku, où tout le rez-de-chaussée a été réorganisé depuis ma visite précédente. 
J’ai failli réussir à passer une journée entière à Paris sans qu’un accordéoniste vienne jouer dans mon wagon de métro, mais finalement non. / Profiter des quelques minutes qui restent avant le départ du Thalys pour appeler ma mère qui s’est fait opérer en ambulatoire cet après-midi. / C’est bon Chouchou, la place à côté de moi est de nouveau libre, tu peux encore me rejoindre en voiture 5. / « Grouik », fait mon estomac sur le coup de 21h. J’aurais bien mangé un bento, moi. / Le parapluie que j’ai trimballé pour rien toute la journée révèle son utilité quand nous arrivons à Bruxelles noyée sous une pluie battante. Laissons tomber la Zen Car, on se fera moins mouiller en métro + bus. / Bilan: 22 000 pas mais beaucoup trop de calories ingurgitées; mort de la pile de mon podomètre ainsi que de mon épaule droite et de plusieurs centimètres carrés de la peau de mes cuisses; deux compliments sur la fameuse robe King Louie dont je suis décidément très contente; de quoi lire, boire et me laver pendant un moment; pas d’expo Hockney, de rétrospective Irving Penn ou de fresques de street art, mais tout de même une bonne journée dans l’ensemble. 

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