« The versions of us »

Version Une: En 1958, Eva et Jim sont tous deux étudiants à Cambridge lorsqu’un jour, cherchant à éviter un chien, la jeune fille qui circulait en vélo roule sur un clou et crève. Le jeune homme qui passait justement par là, un livre de poche à la main, s’approche pour lui proposer son aide. Très vite, ils tombent amoureux et se marient dès l’obtention de leur diplôme.
Version Deux: Le chien s’écarte au dernier moment, et la rencontre n’a pas lieu. Eva et Jim font tous deux leur vie avec quelqu’un d’autre, mais se croisent périodiquement grâce à des amis communs et à chaque fois, éprouvent une connexion inexplicable…
Version Trois: La rencontre a lieu, mais Eva se découvre enceinte de son ex et décide de retourner avec lui – sans pour autant cesser de penser à Jim. 
Parfois, il suffit d’un instant, d’un détail en apparence insignifiant pour changer le cours de notre existence. Dans cette uchronie personnelle, Laura Barnett choisit d’explorer trois des chemins alternatifs que pourraient emprunter ses héros – en partant du principe qu’ils sont faits l’un pour l’autre et que leur amour doit s’accomplir d’une façon ou d’une autre, à un moment ou à un autre. Je ne crois pas à la prédestination ni aux âmes soeurs, mais en tant que prétexte littéraire, ici, cela fonctionne très bien. J’aime aussi le fait que, si la Version Une pourrait d’abord être considérée comme « la bonne », et les autres comme de regrettables erreurs de parcours, il apparaît assez vite que pour Eva et Jim, il n’existe pas de moyen de réussir sur tous les plans. Aucun choix ne leur permet de cocher toutes les cases: heureux en amour et en famille, accomplis sur le plan créatif et professionnel… Dans chaque version, les écueils sont différents, mais il est impossible de les éviter tous. On pourrait trouver cette vision des choses un peu décourageante; personnellement, elle me semble juste réaliste et touchante. 
D’habitude, j’accroche fort à un roman quand je reconnais certains de mes traits de caractère ou de mes préoccupations personnelles chez les héros; ici, ce n’est pas franchement le cas. Ce dans quoi je me suis reconnue – ce dans quoi tout lecteur devrait se reconnaître -, c’est dans l’universalité des situations, la valse perpétuelle des choix décisifs, des satisfactions et des regrets, des triomphes et des erreurs, des anniversaires en famille et des deuils successifs. Laura Barnett évoque nombre de sujets douloureux: ici, la maladie mentale et le suicide, là, l’échec et l’alcoolisme; ici, le sentiment que la vie s’écroule quand un conjoint tombe amoureux de quelqu’un d’autre, là, la difficulté de devenir le soignant de l’être aimé dont l’état se dégrade un peu plus chaque jour. Elle réussit à mettre des mots très justes sur toutes les formes de chagrin, sans jamais tomber dans le misérabilisme ou la dramatisation. Bien que je l’aie terminé en larmes, « The versions of us » n’est pas un roman que l’on referme en voyant la vie en noir; il donne, au contraire, le sentiment libérateur que quoi que l’on fasse, on n’aura jamais tout bon – mais jamais tout mauvais non plus, et qu’au final, aucun chemin ne vaut réellement mieux que les autres: ils sont juste tous différents.

2 réflexions sur “« The versions of us »”

  1. Ce roman a l'air très intéressant, j'ai bien aimé ta phrase de conclusion!

  2. Il manque à mon goût une version 4 … Celle où leurs chemins se séparent leur permettant de s'accomplir pour mieux se retrouver … l'histoire de ma vie 🙂 rien à regretter de belles expériences vécues l'un sans l'autre mais pourtant une évidence 15 ans plus tard … c'était bien lui 🙂 Merci pour la découverte de ce livre 😉

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