
Quand vous allez mal, à quel genre d’ami(e) vous adressez-vous, et qu’attendez-vous de lui ou d’elle? Probablement une épaule compatissante, une écoute attentive, des paroles de réconfort.
Ce que j’appelle de la « bienveillance douce ».
Or, moi, face à quelqu’un qui souffre, j’ai plutôt tendance à chercher des solutions à son problème, à l’encourager à se bouger pour s’en sortir au plus vite, à le pousser à l’arrière-train en lui certifiant qu’il peut le faire, bien sûr qu’il peut le faire!
Ce que j’appelle de la « bienveillance dure ».
Je ne parle pas des grandes tragédies de la vie, des maladies graves, des décès: il est hélas des soucis contre lesquels on ne peut rien, même avec la meilleure volonté du monde. Face à ceux-là, je tâche juste d’être présente, de dire « Je ne sais pas quoi dire, mais je suis là ».
Mais pour tout le reste? Mes réserves de compassion sont ultra-limitées, et plus je vieillis, plus elles s’amenuisent. A ce stade de mon existence, j’ai vu trop de choses pour ne pas savoir faire la distinction entre vrais et faux problèmes. Or, de toutes les choses dont mon entourage et moi nous plaignons régulièrement, 95% relèvent de la seconde catégorie. Ce sont juste des irritations passagères dont nous ne souviendrons même pas d’ici l’année prochaine.
« Quand même. Et les chagrins d’amour? », objectait une amie le week-end dernier. Oui, je sais, ça fait super mal. Sur le coup, on croit qu’on va en crever. Mais après un divorce et un dépacsage, je suis bien placée pour savoir qu’on survit (et que souvent, on est plus heureux après). La rupture, c’est l’équivalent affectif du calcul rénal: une souffrance aussi abominable que bénigne. Si ça n’a pas marché avec cette personne, vous êtes mieux sans elle; plus vite vous la laisserez derrière vous, plus vite vous retrouverez le bonheur seul ou avec quelqu’un d’autre. En tout cas, tel est le message que vous recevrez de ma part. Et je peux concevoir que vous n’ayez pas envie de l’entendre, que vous préfériez qu’on vous murmure des paroles de sympathie, qu’on ne vous bouscule pas à un moment où vous vous sentez fragile.
Mais pour ma part… Un point de vue qui relativise. L’énoncé de vos capacités. Une vision de votre avenir quand vous aurez repris du poil de la bête. Une poussée, un élan. C’est tout ce que j’ai à vous offrir.
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J'ai la compassion douce pour ceux qui n'ont pas la force de me prendre de face 🙂 Pour ceux qui ont la force et le courage, je peux être beaucoup plus volontariste. Je te comprends donc aisément.
La compassion que je peux offrir dépend du type de personne que j'ai en face de moi : s'il s'agit d'une personne qui d'ordinaire est forte, volontaire, et qui craque d'un coup, je saurai prendre le temps d'essayer de la réconforter, car peu importe la raison, je sais que le "craquage" sera un réel signe de mal-être. En revanche, s'il s'agit de quelqu'un qui se plaint sans arrêt, se dévalorise, et n'a besoin que d'une personne qui l'écoute chouiner, je n'aurai aucune patience et je laisserai ce boulot ingrat pour quelqu'un d'autre, tout simplement parce que je risque au mieux de l'écouter en silence, et au pire de lui balancer ses quatre vérités pour qu'elle se bouge.
Je crois que tu n'es donc pas la seule à avoir une compassion limitée 😉
Il y a ce que je cherche : Mes amies très proches sont à l'écoute mais n'hésitent pas à me faire voir les choses en face en m'assénant des vérités pas toujours évidentes à entendre.
En ce moment je traverse une période difficile, et même si une séparation n'est la fin du monde, c'est tout de même la fin d'un petit monde, le mien ( celui des enfants aussi). Même si c'est moi qui ai envie d'y mettre un terme, ce n'est pas facile. Dans ces moments là j'ai besoin de partager mes doutes, mes angoisses et de surtout de ne pas sentir de jugement sur mes choix. Mais pleurer sur l'épaule de quelqu'un pendant qu'on me tapote le dos ce n'est pas trop mon truc.
Ce que je donne, je l'adapte à la situation et à la personne, je donne mon opinion sur la façon dont je perçois le problème et je propose des "remonte-moral" : Hammam, resto…Mais c'est vrai que je n'ai pas une patience folle pour les gens qui ne font que "geindre" ( mais curieusement, je n'en ai quasiment pas dans mon entourage proche…) Et puis toujours, j'essaie de ne pas porter un jugement.
Et pour moi comme pour amies, j'essaie de relativiser et de me projeter dans la vision d'un avenir meilleur, après l'orage pour ainsi dire.
C'était également ma manière de fonctionner jusqu'à ce que je réalise quelque chose face à ma soeur qui a la bienveillance assez dure aussi, et que je trouvais un peu rude avec moi.
Je vais parler pour moi, mais je pense que cela s'applique aussi à pas mal d'autres personnes:
Quand il m'arrive de me plaindre d'un problème auprès d'un proche, souvent ce n'est pas un problème que je demande à la personne de résoudre. En effet, 9 fois sur 10, la réponse au problème je la connais! C'est plus un refuge, une zone bienveillante où on me consolera, on me plaindra un peu, et qui m'aura permis de décharger un peu mon "mal-être" (une soupape de sécurité, d'une certaine façon).
Cela peut même être vexant de se voir proposer une solution qui est évidente, comme si on n'avait pas été capable de la trouver toute seule!
Je le reconnais et l'assume même si je n'en suis pas fière, parfois j'aime me plaindre "juste pour me plaindre", et après ça va déjà beaucoup mieux!
Bien entendu c'est à utiliser avec parcimonie, je suis bien sûr moi aussi excédée par les gens qui ne font que se plaindre tout le temps. Mais j'ai admis que moi aussi je pouvais servir de "décharge à frustration" de temps en temps à mes proches, que parfois il ne faut rien de plus qu'une oreille, pas forcément besoin de participer plus que ça.
En général la bienveillance dure c'est déjà quelque chose qu'on pratique envers soi-même (enfin pour ceux comme moi qui ont un gimini cricket très exigeant derrière l'oreille), d'où un besoin de douceur plutôt que de dureté quand ça va pas fort..
Je suis du genre à chercher la solution. Mais je ne brusque pas (du moins j'essaye). Je pense que prêter une capacité qui semble être la mienne (apparemment) de mettre en mots est ce que je peux faire pour les gens autour de moi. Quand parfois ça marche, ça permet d'effacer une contrariété basique ou ça devient une étape vers l'action.
Pour moi, il n'y a pas d'un côté "souffrir en ne faisant rien" et de l'autre l'action. il y a les étapes entre et le moment où la personne se tourne vers moi. Et je n'ai pas l'impression d'être entourée de personnes geignardes qui ont un absolu besoin de se faire botter les fesses. Chacun a ses moments hauts et bas 🙂
Quand je vais mal, j'ai besoin d'un mélange de douceur et de concret (ne pas me dire "ça ira", parce que c'est du vent pour moi. Décortiquer comment et pourquoi ça ira).
Mais pour le moment, je vis des choses particulières qui ont plutôt créé le besoin que les gens entendent juste que c'est dur. Et je remarque à quel point c'est difficile de faire ça. Les difficultés que je rencontre me font prendre toute relativisation comme une minimisation de l'effort que je suis en train de fournir (ou comme une forme de jugement de type "tu devrais quand même le vivre mieux que ça", jugement – parfois ressenti, parfois réel – qui est selon moi un manque d'humilité car une confidence, même lorsqu'elle semble détaillée, ne donne pas toutes les cartes en main pour émettre un avis). Et je ne peux pas me permettre d'expérimenter une mauvaise image de moi au moment où je dois faire preuve de courage et affronter des choses qui m'inquiètent. Alors je me protège.
Le cas est particulier, mais du coup, ça m'a fait réfléchir à ma façon de réagir aux soucis de mes amis. La différence entre recueillir une parole et avoir un avis et des mots sur tout (est-ce que j'ai besoin de faire preuve de tant personnalité, d'"exister" par des avis, en toutes circonstances ?) et la marge de manoeuvre productive entre les deux. Bien sûr, il y a les moments où les amis viennent chercher chez nous qui on est et notre façon d'aborder les choses. Mais parfois pas.
Julie: oui, tu as raison – spontanément je nuance aussi selon à qui je m'adresse. Si une amie très solide d'habitude craque devant moi, clairement, je vais lui prêter une oreille plus attentive qu'à quelqu'un qui se plaint tout le temps pour tout et pour rien.
Dola: je suis désolée pour ta séparation, je sais que même quand on en a pris l'initiative ce n'est pas du tout évident à gérer (et encore moins, j'imagine, avec des enfants). Bon courage à toi et à ta famille.
Unknown (une prochaine fois, tu me laisses un pseudo pour que je puisse te situer?): j'arrive tout à fait à tolérer que quelqu'un me parle de son mal-être, juste pour en parler… si ce n'est pas systématique. Si la personne en face me dit: "Pfiou, c'est pas la joie en ce moment", je vais comme disait Dola proposer une activité remonte-moral (un cokctail, un thé entre filles…). Tout est une question de dosage et de fréquence, en fait.
Ness: la voix de la tempérance, une fois de plus 🙂 Oui, tout le monde a ses hauts et ses bas, et je veux bien écouter les bas quand ce n'est pas sans cesse, comme je le disais plus haut ou quand ce sont des vrais bas. L'autre nuance à laquelle je n'avais pas pensé, c'est qu'effectivement, je suis sans doute plus "réceptive" aux doléances par rapport à des problèmes dont je n'ai pas l'expérience moi-même. Ce que tu traverses en ce moment, par exemple, m'est tout à fait étranger, et donc je ne me sentirais pas légitime à te donner le moindre avis (d'autant que ça rentre quand même un peu dans la catégorie des problèmes subis auxquels on ne peut pas forcément grand-chose même avec la meilleure volonté du monde). J'ai aussi beaucoup de patience avec une amie de naturel dépressif dont le jeune fils a un problème de santé qui sans être mortel a des répercussions importantes sur la vie de sa famille: je ne peux même pas imaginer la pression à laquelle elle est soumise, jamais je ne m'aventurerais à la juger. Mais là encore, on est dans le domaine des "vrais problèmes". Pour toute les choses que je connais et que j'ai surmontées, c'est vrai, je suis plus "jugeante". Non par manque d'humilité, mais justement, parce que je suis quelqu'un de parfaitement ordinaire, et que je me dis que si j'ai pu le faire, c'est à la portée de tout le monde…
Quand je vais mal, j'en parle… pas à des amis : peur de les soûler, d'ailleurs, je ne saurais pas mettre des mots sur ce qui me ronge. Alors je me tourne vers mon pauvre copain ou vers mon blog. Parfois, je me lance et me confie à des copains-pas-encore-amis mais toujours avec cette peur du "mais qu'est-ce qu'il/elle en a à faire, en fait". Ahem.
Sinon, j'ai la bienveillance maladroite. Je n'ai compris que récemment que je pouvais juste être là pour réconforter sans apporter la solution miracle. Un poil vexant pour l'autre partie, il est vrai…
Mon premier commentaire. Moi qui suis ton blog depuis longtemps en suivant un lien qui me soutenait dans un énorme chagrin que nous avions en commun. Juste merci! J'ai la chance d'être entourée de bienveillants durs et c'est juste de ça dont j'ai besoin dans ma situation actuelle!
Merci pour ce premier commentaire Ariane 🙂
Ma propre capacité d'écoute, de patience et de douceur dépend en effet, comme Julie et Dora, de mon interlocuteur.
Une personne qui se plaindra en permanence sans essayer de prendre du recul et de voir aussi les jolies aspects de sa propre vie va finir par me taper sur le système et rongera mes capacités d'écoute. En revanche une amie habituellement forte ou positive qui craque d'un coup, c'est pour moi un vrai signal d'alarme.
Je crois ensuite que je suis plutôt une personne bienveillante qui mélange douceur et dureté, telles que tu les définis.
Tu le sais, j'ai vécu une séparation qui a été pour moi un vrai choc l'an dernier, qui se soldera par un divorce (on attend de vendre notre appartement commun). J'ai été extremement bien entourée par famille et amis. A la fois de la douceur dans les moments où j'étais vraiment très mal, mais de la "dureté" (entre guillemets car je ne l'ai jamais vécu comme dur en fait) aussi pour m'encourager à aller de l'avant, à tourner la page, à me concentrer sur mes qualités, mes valeurs, ma propre vie, sans jugement. C'est aussi ce que le travail avec la psy m'a apporté.
Et cela m'a grandement aidée, j'ai pu m'appuyer sur tous ces éléments pour non seulement garder la tête hors de l'eau mais aussi, comme tu le dis si bien, comprendre que si ça n'avait pas marché, ça valait mieux ainsi. Que j'étais complète et heureuse seule, que ma vie continuait, en rien moins riche.
Et ça, ça change tout !
Prêter une oreille attentive c'est bien, mais pousser les gens à s'en sortir, s'il y a quelque chose à faire, c'est plus constructif je pense. C'est ce que j'essaie de faire, mais je ressens souvent de l'agacement car les gens voudraient surtout qu'on leur donne raison ou qu'on leur déverse un robinet d'eau tiède. Dans tous les cas, c'est mieux que l'indifférence qui est dévastatrice. J'ai souvent eu des "amis" qui me laissaient m'engluer dans des problèmes ou des souffrances et me regardaient patauger, sans le moindre mot réconfortant ni la solution coup de pied au cul qui m'aurait permis d'y voir plus clair. Ça a eu le mérite de me faire faire un grand tri dans mes relations, car sans attendre tout des autres, loin de là, à quoi bon fréquenter des gens que votre sort indiffère (au mieux)?
Dans la bienveillance, il y a aussi le fait de ne pas se sentir vexé quand une personne s'éloigne/se renferme pour cause de déprime. Ca arrive à des gens qui n'aiment pas faire étalage de leur mal-être, et on peut se sentir un peu bête après coup de ne pas être allé les chercher pour les soutenir… ça m'est arrivé.
Je suis plutôt du côté dur de la force, euh, de la bienveillance.
Et j'avoue que ça fonctionne aussi dans le sens inverse : je n'aime pas me plaindre de trucs persos pour me faire plaindre. Je détester. Quand je vais mal, soit je n'en parle pas, soit je cherche des solutions et je cherche donc des gens avec qui débattre, qui me redonnent de l'énergie et sont positifs. Ou m'aident simplement à me changer les idées.
Sauf que. Pafois, ça fait du bien de râler, de se plaindre, de gémir, de se lamenter. Juste pour le faire. Et pour ça j'ai un cercle secret de copines avec lequel on partage nos coups de mou, mais aussi coups de gueule. Et plein de bisous virtuels. Et ce petit espace sacré et secret est une bonne soupape pour les jours de blues.
Mais pour le reste, je comprends pourquoi on s'entend aussi bien 🙂
(Je suis désolée je ne sais pas comment choisir un pseudo, pourtant j'ai dû me logger avec mon adresse gmail pour laisser un commentaire, mais ça apparaît quand même en inconnu..?)
Bref, je suis d'accord, on ne réagit pas pareil selon la personne qui est en train de se plaindre.
Par contre je suis aussi convaincue que la plupart des solution qu'on peut apporter à ses amis dans ces cas-là sont souvent des solutions assez inutiles. Si ce sont nos amis, c'est qu'à priori ils ne sont pas imbéciles (du moins pas beaucoup plus que nous-même, c'est rare les grosses disparités culturelles / intelligence au sein d'un même groupe d'amis proches, non?). S'ils ne sont pas imbéciles, c'est qu'ils sont déjà parfaitement au courant de la solution à laquelle on a pensé. Donc j'essaye de ne pas trop faire la prof moralisatrice quand un ami proche se plaint!
Exception faite bien sûr des cas où notre approche extérieure permet de voir ce que ne voit pas l'intéressé(e) manquant de recul..
-Hundun
Même sans te loguer, juste un pseudo en fin de com, c'est bon! Plein d'autres lectrices font ça. Ca me permet au moins de savoir à qui je m'adresse 🙂
Et pas d'accord sur le coup des solutions inutiles. Non que je pense que mes amis ou ceux de quiconque soient des imbéciles. Mais personne ne connaît tout sur tout en matières de solutions pratiques, par exemple; ou parfois, les gens n'envisagent même pas telle ou telle possibilité parce que ce n'est pas dans leur domaine d'expertise, dans leurs habitudes, parce qu'ils ne s'en croient pas capables…
Et c'est là que je réalise que je n'ai quasiment aucune expérience sur le sujet, parce qu'on s'adresse rarement à moi dans ces cas-là… Ouille ! (alors que je me considérais comme raisonnablement emphatique, hein)
Quand ça arrive, je trouve que c'est tellement miraculeux qu'un(e) ami(e) s'ouvre à moi que j'ai tendance à écouter et surtout ne rien dire. A la limite un "qu'est-ce que tu vas faire ?" ou un "comment tu vois les choses maintenant ?" J'en déduis que c'est très insuffisant 😉