C’est le premier pas qui coûte le plus

Deux petites « épreuves » m’attendaient en ce début janvier. 
Juste avant Noël, j’avais achevé une traduction très difficile, que j’étais censée relire cette semaine-là puisque de toute façon nous ne faisions rien de spécial pendant les fêtes. Comme je soigne beaucoup mon premier jet, d’habitude, la phase de relecture n’est qu’une simple formalité: virer les coquilles, supprimer quelques répétitions, changer un terme du lexique si j’ai trouvé mieux entre-temps… Deux jours me suffisent pour un ouvrage de 500 feuillets. Là, j’avais plusieurs casse-tête à prendre en compte, des problèmes de changements de temps, de neutralité de genre en français, mais aussi de conventions de mise en forme. J’appréhendais grave; du coup, j’ai repoussé à la rentrée sous prétexte que j’avais jusqu’au 15 janvier pour rendre ma traduction et que « ça ne me ferait pas de mal de prendre un peu de recul par rapport au texte ». Mon fondement, oui. La vérité, c’est que je bloquais d’avance sur la première phrase du premier chapitre, qui sonnait bizarre si on la traduisait au plus près de l’anglais, mais qui dénaturait le style de l’auteur si on la traduisait en ce que j’appelle le « français fluide » (et que je privilégie d’habitude). J’étais comme un cheval qui se dérobe devant le premier obstacle du parcours.

Puis le lundi de la reprise est arrivé, et comme j’avais un planning à tenir, il a bien fallu que je m’y mette. J’ai pris cinq minutes pour trancher sur cette foutue phrase dans la douleur, et après ça, j’ai enchaîné 120 pages sans grosse difficulté en quatre heures environ. La suite a été plus laborieuse, mais à cause de l’actualité obsédante plutôt que du travail lui-même. Au final, j’ai bouclé cette relecture de près de 800 000 signes en quatre jours. Et en ayant joint, pour la première fois de ma carrière, une notice d’explications de plusieurs pages à l’éditrice – mais peu importe. Il me semble avoir fait du bon travail, et le plus dur, ça a été cette fameuse première phrase. Le reste se résumait essentiellement à un exercice de vigilance. 

Autre épreuve redoutée par avance: le 30 Day Shred. Il s’agit, en gros, d’un programme d’exercices à la maison basé sur le principe de l’interval training: on alterne les abdos, les exercices de muscu et le cardio sans interruption, pour forcer le corps à s’adapter sans cesse et provoquer une « fonte » de la graisse. Les séances durent moins d’une demi-heure et ne nécessitent pas d’autre matériel qu’une paire de petites haltères. Des copines l’avaient fait en fin d’année et rapportaient des résultats fantastiques, bien qu’obtenus dans la souffrance. « Certains jours, lever un verre d’eau me faisait mal », disait l’une d’entre elles. Etant à peu près au pire poids de toute ma vie, j’ai décidé de tenter le coup aussi en janvier, dès le retour de Porto. Sauf que j’ai commencé par être trop occupée à Bruxelles, et le lendemain de mon arrivée à Toulon, le jour même où je comptais m’y mettre, il y a eu la fusillade de Charlie Hebdo qui m’a empêchée de décoller de mon ordinateur pendant trois jours.

Hier, je devais passer la journée en ville. J’ai profité des soldes pour acheter une jupe sublime mais légèrement trop juste pour moi (c’était la dernière et je la voulais vraiment), en me disant ça me ferait une motivation supplémentaire. Ce matin, je n’avais plus aucune excuse, et je voulais absolument rentrer dans ma jupe sublime. Je me suis levée de bonne heure; j’ai bu mon thé en faisant mon tour habituel sur internet; puis j’ai pris une demi-dose de créatine gracieusement fournie par Chouchou, enfilé ma tenue de sport et lancé la vidéo du niveau 1 en me disant « Quand faut y aller, faut y aller ». Et tout s’est bien passé. J’ai tenu les abdos sans problème; mes muscles ont brûlé et tremblé durant les exercices de force, mais j’ai pu aller au bout; la seule fois où j’ai dû m’interrompre, c’est pendant le cardio – la deuxième répétition jumping jacks/saut de corde ne passait juste pas. J’ai fini crevée mais pas hachée menu, même si j’aurai sans doute des crampes demain (c’est là qu’on va voir l’efficacité de la créatine, ou pas).

Ces exemples d’autant plus flagrants que très rapprochés dans le temps me font repenser à toutes les idées que j’ai eues et jamais mises en pratique parce que j’anticipais la myriade de difficultés que je pourrais rencontrer. A la base, je suis une grosse feignasse velléitaire. Je ne me décide à faire les choses qui vont me coûter des efforts qu’avec un fusil dans le dos (une deadline, l’approche d’une dizaine redoutée sur la balance). Pourtant, je commence à me dire que si ça se trouve, elles m’en coûteraient beaucoup moins que je ne le redoute. Et que le couple infernal de mes démons personnels – Madame Paresse & Monsieur Pessimisme – me fait passer à côté de beaucoup d’expériences enrichissantes. Parfois, il suffit de se mettre en route pour se rendre compte que le chemin est bien moins ardu que prévu.

8 réflexions sur “C’est le premier pas qui coûte le plus”

  1. Cécile de Brest

    J'admire le recul que tu es capable de prendre. Il faudrait que je médite un peu sur ton texte, cela me ferait le plus grand bien, je crois car je ne compte plus les envies et les projets abandonnés à cause de l'angoisse et du pessimisme (mes deux fidèles compagnons).

  2. Repousser et attendre ne fait que faire enfler la partie désagréable du projet, qui sinon dure 5 minutes (enfin, dans le cas des projets qui m'occupent, c'est lourd aussi après, mais on ne s'en rend plus compte une fois mis en route). J'ai beau le savoir, mes mises en route sont toujours aussi laborieuses et angoissées.

  3. J'ai repoussé mon premier jour d'exercice depuis que j'ai reçu le dvd. J'avais plein de bonnes raisons!
    Ton post m'a motivée ainsi que le fait d'être en repos aujourd'hui sans Lgqmp à la maison!

    Bilan : J'ai hâte d'être à demain pour recommencer. Je pensais pas que ça allait être aussi dur! J'ai terminé en sueur et en crachant mes poumons! Les muscles que j'utilise au boulot ne m'ont posé aucun soucis par contre les autres !

    Bref, on verra dans quelques semaines si j'arrive à me tenir à au moins 3 séances par semaine!

  4. Euh, il est bien spécifié que le programme n'est efficace que si tu le fais tous les jours sans aucun jour de repos entre les séances pendant 30 jours…

  5. Avec mes horaires je suis pas sure de pouvoir le faire tous les jours et j'ai déjà un travail physique qui fait que souvent quand je rentre chez moi j'ai mal partout et je suis bonne à rien.

    J'ai prévu d'en refaire une demain mais j'ai pas envie de me donner un objectif qui va me faire abandonner en cours de route. Si je le fais 3 fois par semaine c'est mieux que rien. J'ai pas envie de perdre 10 kg j'ai juste envie d'être un peu plus en forme (bon si j'arrive à perdre 1 ou 2 kg je crache pas dessus hein^^). J'ai pas les horaires pour m'inscrire à des cours réguliers et je sais que je n'arriverai jamais à me trainer dans une salle de sport.

    Ceci-dit j'ai bien aimé la première séance d'exercice. J'aime bien qu'elle explique ce qu'il faut faire et ne pas faire et le fait de donner des exemples selon son niveau de forme physique.

  6. Je suis tout à fait d'accord avec toi, il suffit de s'y mettre mais s'y mettre est parfois si ardu!
    Tu te dis paresseuse mis moi je vois en toi une fille si active, bourrée d'idées et qui les mets en pratique. J'ai encore pas mal à faire de mon coté! Mais savoir que l'on n'est pas seule, aide.
    Je voudrais aller à la piscine 2 fois / semaine, vais-je réussir?

  7. J'ai l'air active parce que je parle ici des idées que je mets en pratique, pas de toutes celles que je laisse moisir dans un coin par flemmingite aiguë 😉 Bon courage pour la piscine!

  8. Bravo pour la traduction, ça semblait très costaud effectivement 🙂

    Autrement, je me retrouve dans ce que tu dis. A part que je ne suis pas trop feignasse mais je m'imagine des difficultés et j'ai une peur de l'échec qui me paralyse parfois. Il nous faudrait plus de coups de pied au derrière parfois 🙂

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