Après une excellente soirée « produits du terroir » entre amis, la nuit avait été un peu agitée: d’abord le téléphone de Chouchou avait double-bipé à 2h46 alors que mon estomac venait juste de consentir à ce que je m’endorme, puis Chouchou lui-même s’était mis à ronfler, m’obligeant à dégainer les boules Quiès. Mais nous nous étions levés tout heureux à la pensée de ce départ tant attendu pour Porto, son ciel sans nuages et ses 12° prévisionnels pendant la semaine à venir. Passer le Nouvel An au Portugal, quelle merveilleuse idée!
Il nous restait une journée pour faire le ménage à fond, histoire de rentrer vendredi dans un appartement nickel et d’attaquer janvier du bon pied. Alors, après un petit-déjeuner de thé et de panettone, nous nous étions mis à l’oeuvre, épongeant la mare d’eau glacée vomie par le congélateur qui n’avait pas été dégivré depuis deux ans au moins, passant plumeau, aspirateur et balai lavant dans toutes les pièces, cuisinant autant de produits frais que possible, examinant le contenu du frigo et jetant les pots de sauce impossible à identifier mais périmée depuis le mois d’avril, multipliant les aller-retour à la cave avec des poubelles pleines.
Bien qu’on soit samedi, l’avenue était très calme. Nous n’attendions ni courrier ni coups de fil; nous nous contentions de nous affairer dans un silence joyeux à ce que nous considérons d’ordinaire comme des corvées mais qui, exceptionnellement, ne nous pesait pas tant que ça. Je repensais au kagami biraki que j’avais passé au dojo de Tamura Sensei, et à l’occasion duquel tous les élèves (dont moi) avaient intégralement briqué l’immense bâtisse perdue dans la campagne – un des rares bons souvenirs que je conserve de mes années d’aikido. Chouchou, lui, pensait… probablement à des trucs de Chouchou qu’il est le seul à pouvoir comprendre (et encore, ce n’est pas sûr).
Sur le feu, un risotto aux asperges absorbait lentement la dernière louche de bouillon, et je sirotais le reste du Riesling quand Chouchou a lancé: « Ah, ça y est ici aussi. » J’ai tourné la tête vers la fenêtre. Les flocons blancs dont nos amis suisses postaient des Instagram depuis le matin étaient arrivés à Bruxelles. « Ca ne va pas tenir », a prédit Chouchou.
Il se trompait. La neige a continué à tomber tout l’après-midi pendant que je faisais la valise en musique et me récompensais de mes efforts avec un délicieux chocolat chaud, ainsi que quelques chapitres de « The secret of lost things »; elle a continué à tomber pendant que, blottis sur le canapé, nous regardions l’épisode de Noël de « Downton Abbey » en prenant des paris (si les Bates se reproduisent, combien de temps avant que le bébé ne finisse en prison?). A l’heure où j’écris ce billet, elle semble hésiter à se changer en pluie. L’épais manteau d’ouate immaculée sur toute la ville, ce ne sera pas pour cette fois. Mais un de mes deux voeux secrets aura été exaucé: j’aurai eu de la neige pour Noël.
Supposément, je me réveille demain matin dans un Aveyron Blanco par des flocons, un temps idéal pour un aligot. Le monde est bien fait.
Quelle belle et douce journée…
Rien de mieux que le sentiment d'accomplissement après avoir briqué la baraque.
Très bonnes vacances à vous 🙂