Il n’y a pas deux catégories de gens

Hier, j’ai lu  cet article de la philosophe espagnole lesbienne Beatriz Preciado que plusieurs de mes contacts avaient relié sur Facebook. Et bien que je l’aie trouvé très fort et très beau d’un point de vue strictement littéraire, l’image de la balle m’a beaucoup dérangée. Elle semble dire: « En tant que LGBT, nous sommes frappés par un mal extérieur sans que ce soit notre faute ». Alors que la notion de mal et de faute n’a pas sa place ici en premier lieu. Il me semble que c’est perpétuer l’idée totalement erronée que l’humanité se divise en deux camps: les hétéros d’un côté, ceux qui sont naturellement conformes, et les LGBT de l’autre. Et ça, c’est justement ce que voudraient nous faire croire les partisans de la haine et du rejet. 

En réalité, il n’y a pas deux camps, parce qu’il n’y a pas deux catégories de gens – les Blancs et les Noirs hier, les hétéros et les homos aujourd’hui. De tout temps et en tout lieu, il y a juste des individus tous différents et tous semblables. Des êtres humains qui respirent, qui mangent, qui dorment, qui rient, qui souffrent, qui espèrent et qui aiment, indépendamment du contenu de leur culotte et de celle de la personne qui partage leur lit. C’est cela qu’il est urgent de faire comprendre à ceux qui s’obstinent à croire que les homosexuels sont de dangereux déviants qui menacent notre mode de vie, et c’est cela qu’il est urgent de faire comprendre à tous les jeunes membres de la communauté LGBT qui douteraient encore de leur droit à vivre comme ils l’entendent.
On m’a répliqué que l’image était poétique et belle, que je cherchais la petite bête là où il n’y avait pas lieu. Mais je suis désolée, j’estime que si, il y a lieu. Les mots et les images importent; ils sont ce qui forme inconsciemment notre vision des choses. Utilisons-les à bon escient pour faire prévaloir l’idée qu’il n’existe pas de façon d’aimer plus légitime qu’une autre. 
(Et pendant qu’on y est, je me permets de relier la vidéo de l’émouvant coming out d’Ellen Page qui parle très bien de la pression au conformisme exercée par la société en général et Hollywood en particulier:)

13 réflexions sur “Il n’y a pas deux catégories de gens”

  1. Il y a, je trouve, une tendance de l'humain à classer, mettre dans des boîtes, catégoriser… il semblerait que cela rassure… perso, ça m'angoisse (même s'il m'arrive de pratiquer aussi…)

  2. Je partage entièrement ton point de vue.

    J'ai vu la vidéo d'Ellen Page hier et j'avoue qu'à la fin de cette vidéo, j'avais une boule dans la gorge. Qu'on puisse souffrir ainsi pour une chose qui ne devrait même pas être un sujet me désole.
    Le fait même qu'elle doive se justifier de sa sexualité me mets en colère.

  3. si les humains comprenaient qu'on aime une personne avant son genre, on n'en serait pas là.
    j'ai du mal avec le binaire, sous quelque forme il soit. ce n'est pas tout blanc ou tout noir, je crois que l'histoire l'a montré, au détriment d'êtres humains, donc ce n'est pas hétéro vs gay.

  4. Je comprends ta réaction face à l'image de la balle, certes le côté sniper, ce n'est pas très positif. Peut-être est-ce une sorte de réutilisation plus moderne de Cupidon et ses flèches ? Mine de rien, le coup des flèches, objectivement ce n'est pas très positif non plus mais c'est rentré dans l'imaginaire collectif.
    Après… 2013 n'a déjà pas été simple avec toute la haine déversée dans les rues par des personnes-pas-du-tout-homophobes mais qui estiment qu'un couple homo n'a pas à avoir les mêmes droits qu'un couple hétéro. Et manifestement, 2014 ne semble pas partie pour arranger les choses. Quand je vois comme ça me bouleverse tout étant out, adulte, assumée et heureuse, je n'imagine pas ce que peuvent ressentir les gosses qui commencent à se poser des questions. Et je suis atterrée de voir comme certains n'ont toujours rien compris et s'imaginent encore les homo comme ayant un mode de vie à part totalement fantasmé, entre orgies sataniques et bouffage de bébés au petit dej…

  5. Jeanne à débats : S'il y avait une logique comme ça… Mais non, toutes les phobies existent.

    Autrement, j'ai lu l'article car j'aime beaucoup Preciado depuis que je l'ai découverte (duh, l'inverse serait difficile) et j'avoue n'y avoir rien vu d'autre que la métaphore de Harvey Milk.

    Le mal qu'est la balle, c'est celui de la société.

  6. Je comprends que l'analogie au sniper soit surprenante. Et pourtant ça me touche. Peut-être que quand la vie a enfin décidé de m'ouvrir les yeux sur moi, j'ai eu ce sentiment d'une balle qui me touchait. Non seulement la société nous rejette, mais on se rejette tout seul, au moins un temps. Quoi qu'on dise, on ne sera jamais la majorité, pour l'instant ça n'est pas facile d'aborder le sujet, encore moins, de s'avouer homo, bi transgenre ou autre.

  7. (Commentaire précédent effacé parce que j'y avais fait deux énormes fautes!)
    Finalement, il semblerait que les premiers concernés se reconnaissent dans cette fameuse analogie. Et bien entendu, je n'avais pas l'intention de nier la validité des sentiments de quiconque. Je me focalise sur ce que les choses devraient être, alors que l'auteure de l'article parle des choses telles qu'elles sont; la différence est sûrement là.

  8. Je n'ai jamais compris pourquoi s'attaquer aux homos, et je ne comprendrai jamais. Qu'une personne aime une autre personne du même sexe qu'elle, ne m'a jamais dérangée.

    Et si aux yeux de la société, je dois être rangée dans la catégorie "hétéro", cette chasse aux homos me touche beaucoup et me dépasse. Le temps du Moyen-Âge n'est pas révolu; on tombe même encore plus bas.
    Quand je vois qu'en France sont organisées des manifestations pour empêcher les homosexuel(le)s à acquérir certains droits, ça me fout la gerbe.

    Cette métaphore de Preciado ne me dérange pas vraiment, même si elle est effectivement maladroite. L'homosexualité n'est pas une balle qui peut frapper; c'est la société qui frappe de balles les homosexuel(le)s.

    Ellen Page est super touchante.

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