Hier matin, je lisais ce post d’Amanda Palmer dans lequel elle raconte qu’elle a perdu beaucoup de proches ces derniers mois et s’interroge sur le sens à donner à tous ces deuils. Comment continuer à vivre après la disparition souvent aléatoire et injuste de ceux qu’on aimait? Comme toujours, son texte bien que très long est d’une grande puissance émotionnelle – et il résonne forcément en moi qui me pose la même question depuis un bout de temps. La réponse d’Amanda est simple, au fond: faire de l’art, faire de l’art, faire de l’art. Partager avec les gens.
Je méditais encore là-dessus quand je suis arrivée chez ma mère un peu avant minuit. Parmi les premières nouvelles qu’elle m’a annoncées, il y avait: la voisine d’une cinquantaine d’années, qui a un cancer du sein depuis un an et demi, a développé des métastases au cerveau et aux poumons. Autant dire qu’elle est foutue. Je n’ai jamais supporté cette femme qui est d’une bêtise incommensurable, et raciste de surcroît. Pourtant, ça m’a rendue affreusement triste pour elle. Personne ne mérite ça.
Je sais que je ne me déferai plus jamais de ce sentiment d’être en sursis, et tous les gens que j’aime avec. Cette impression que la chute me guette à chaque coin de rue, demain peut-être, ou au printemps prochain… Jusqu’ici, j’ai pensé que la seule réaction valable, c’était de savourer chaque jour, chaque heure, chaque minute au maximum. Je n’ai plus eu qu’une idée en tête: profiter des petits plaisirs de la vie. Et j’ai cessé de faire des projets ou d’avoir la moindre ambition, un peu pour conjurer le sort, et beaucoup pour avoir le moins de regrets possibles quand le couperet tomberait.
Je réalise maintenant que c’était idiot. Oui, c’est merveilleux de savoir trouver du bonheur dans les détails du quotidien que la plupart des gens tiennent pour acquis. Faut-il s’en contenter pour autant? Faut-il, par crainte que cela s’arrête bien plus tôt que prévu, se résigner à vivre petit pour avoir moins à perdre? Ou faut-il au contraire essayer d’accomplir le plus possible de choses aussi grandes que possible dans le temps inconnu qui nous est imparti?
La bonne réponse est sûrement différente pour chacun. Moi, je crois que je vais essayer de faire de l’art. Ou quelque chose qui y ressemble vaguement. Et puis de le partager, au cas où ça parlerait à d’autres et où on pourrait se tenir chaud ensemble en attendant l’inévitable chute.
Il y a 2 semaines, j'ai craqué et je me suis inscrite à un cours de photos. Depuis longtemps je me cherche un moyen d'expression. L'écriture n'est clairement pas mon truc, mes problèmes de dysorthographie me dérangent, j'ai l'impression qu'on ne voit que ça et qu'on passe à côté du message.
De plus, je n'ose pas raconter et me dévoiler ainsi et pourtant, j'ai des choses à dire…
Le dessin, je n'ai malheureusement pas le trait de crayon qu'avait ma maman.
En ce moment, avec beau-papa Pops qui va s'en aller très bientôt, je me suis retrouvée face à ce questionnement. Est-ce que je le vis comme les autres départs où est-ce que j'en construit quelque chose.
J'ai décidé de sortir de ma zone de confort et de partager avec la chose qui me touche le plus. La photo, même si personne n'a envie de la partager avec moi… je veux et j'ai besoin de donner…
Je suis vraiment désolée pour le papa de Mr Pops :-((( Mais le cours de photo me semble une bonne idée.
Ce billet fait écho à l'une de mes expériences personnelles… Assez traumatisante, elle aurait du me briser. Finalement, alors que je ne suis pas quelqu'un de très solide, elle est devenu la base de ma (re)construction. J'ai beaucoup écris, dessiné, réfléchi sur le sujet. Elle est devenue une chose constructive, faisant partie de mon histoire et d'une certaine manière de mon identité.
J'ai eu beaucoup de chance car il est parfois difficile de parvenir à tirer le meilleur de ce qui peut nous arriver de négatif.
J'ai enfin pris le temps de lire le post d'Amanda Palmer que tu cites et je l'ai beaucoup aimé.
Je l'ai lu comme un texte à envisager de façon large : elle invite à faire, du mieux qu'on peu, quelque chose qu'on a vraiment choisi, et qui permet une expression personnelle, la plus personnelle possible, même. Pour elle, c'est l'art, c'est sa voie, c'est ce qu'elle est. Mais je trouve qu'elle laisse la porte ouverte à plein d'autres possibilités pour d'autres personnalités et c'est un point de vue généreux.
Créer ou fréquenter des oeuvres qui nous dépassent, c'est fascinant et rassurant à la fois, je trouve.
Ms Brown > Bon courage.
Mon âge m'a pour l'instant épargné les décès en masse, bien que celui de mon grand-père m'ait fait prendre conscience de notre compte à rebours (en plus de m'attrister, évidemment). En revanche, aux questions "Que ferais-tu si tu n'avais plus que 24 heures à vivre" ou "C'est l'apocalypse, que fais-tu ?", je n'ai jamais su que répondre, si ce n'est abréger le suspens. Ou me raccrocher à un espoir un peu vain, celui qui me fait toujours continuer, à défaut d'avancer.
Autrement, "faire de l'art" me semble être une belle solution. Par contre, je n'ai pas vraiment de talent artistique (tout au plus, je gribouille), et même s'il n'est pas obligatoire d'avoir le talent de Palmer pour "faire de l'art", un minimum de bases est toujours la bienvenue.
En attendant, je profite de la vie et de la présence de ceux qui me sont chers.