Avant-hier, j’ai reçu un mail adorable d’une lectrice qui a eu la bonne idée de m’envoyer sa photo. Or, des mails adorables, j’ai la chance d’en recevoir assez régulièrement, mais une photo, c’était la première fois, et ça m’a ravie de pouvoir mettre un visage sur les mots de cette jeune femme. Parce que c’est quand même une drôle d’activité, bloguer: on se met plus ou moins à nu pour des gens « invisibles » qui n’éprouvent pas le besoin de commenter, ou dont on ne va connaître que le pseudo et les réactions sur certains sujets précis. Du coup, j’ai bien aimé ce petit bout de réciprocité.
La lectrice en question me remerciait par ailleurs de tout ce que je livrais d’intime dans mes écrits, et cela m’a conduite à m’interroger sur la part d’exhibitionnisme inhérente au fait de tenir un blog d’humeurs comme le mien. Parfois, j’ai l’impression d’en dire beaucoup trop, de raconter des choses gênantes pour ceux qui les liront (même si on est bien d’accord que je n’oblige personne à venir ici). J’aurais aimé être une de ces créatures stoïques et ultra-positives, à l’instar des blogueuses américaines que je lis et qui donnent l’impression de tout prendre du bon côté. Même quand l’une d’elles a annoncé le décès de son frère de 42 ans, il y a quinze jours, elle a trouvé le moyen de mettre l’accent sur le fait que c’était un type extraordinaire qui avait fait beaucoup de bien dans sa vie (et que le Seigneur avait sûrement une raison de l’arracher à sa famille, et qu’ils se reverraient tous au ciel un jour, mais ceci est une autre histoire).
A l’inverse, quand je clame mon bonheur, j’ai toujours un peu peur d’avoir l’air auto-satisfaite et d’en devenir agaçante. Quand je parle des leçons que j’ai apprises ou des efforts constants que je fais pour m’améliorer, je crains de passer pour une insupportable donneuse de leçons. Vous noterez que ça ne m’empêche pas de le faire quand même, parce qu’au fond, le jugement des autres m’importe assez peu. J’essaie d’être toujours sincère dans mes propos; après, je conçois très bien que ma façon d’être puisse ne pas plaire à certains et ça ne m’ennuie pas plus que ça. Mais je n’aimerais pas penser que je suis rasoir!
Pour autant, et après mûre réflexion, je me rends compte que je respecte certaines limites tacites, et qu’il est des choses que je ne fais pas sur ce blog.
– Je ne parle pas de ma vie sexuelle, ou en tout cas, plus depuis que mes proches et mes collègues de travail me lisent! (Mais les plus vieux de mes lecteurs se rappellent peut-être avoir vu passer des trucs assez olé olé…) Je n’ai aucune pudeur sur le sujet; par contre, je n’aime pas choquer les autres en leur racontant des choses qu’ils n’ont pas envie de lire ou d’entendre. Dans la vraie vie, parfois, des confidences tout à fait déplacées m’échappent; j’ai vu verdir quelques-unes des filles qui assistaient à la dernière troc party quand je me suis lancée dans un grand discours imagé sur l’épilation masculine. Mais à cause de (ou grâce à) Google qui risquerait de m’envoyer des lecteurs indésirables, j’évite soigneusement de commettre ce genre de bévue sur le blog.
– Je ne parle pas non plus d’argent, ou plus exactement, pas des revenus que je tire de mon activité professionnelle. Ca ne me dérange pas de le faire en privé avec des gens que je connais un peu. Ici, ça me gênerait, parce que j’ai conscience de plutôt bien gagner ma vie et que je ne voudrais pas avoir l’air de faire étalage de ma chance dans ce domaine. Sans compter que mes lecteurs pourraient en déduire que traducteur littéraire est un métier super bien payé, alors que dans l’absolu, ça n’est pas vrai du tout.
– Je ne dis pas de mal de Chouchou. Il m’est arrivé de raconter qu’on s’était disputés violemment, ou que j’avais trouvé son comportement inacceptable à certaines occasions, mais je ne donne jamais de détails, parce que c’est notre vie privée et que personne d’autre que moi n’a à le juger sur ce qui se passe entre nous. Avec un peu de chance, les disputes se résoudront, mais les choses que j’aurai écrites resteront à travers l’impression produite dans l’esprit de mes lecteurs. Je ne veux pas de ça.
– De manière générale, je n’utilise pas mon blog pour régler mes comptes. Si j’ai un problème avec une personne de mon entourage dont je sais qu’elle me lit, j’en parle avec elle… ou pas, selon les circonstances, mais je ne fais pas d’allusions voilées ici en espérant que la personne en question se reconnaîtra et en tiendra compte. Et si je suis fâchée contre un autre blogueur, je n’utilise pas non plus cet espace comme une tribune pour clamer « Ouh le vilain, regardez ce qu’il a osé me faire cet enfoiré! ». J’ai assisté sur internet à trop de vendettas qui ont rempli d’effroi et d’incompréhension mon petit coeur de Bisounours. Je ne suis pas quelqu’un de vindicatif. Quand quelqu’un m’a gonflée, je le sors de ma vie et je passe à autre chose.
– J’essaie de ne pas porter de jugements susceptibles de blesser les gens de mon entourage qui me lisent. Je ne dis pas que j’y arrive toujours: je suis notoirement dénuée de tact. Mais j’essaie, sincèrement. Pendant les dernière sélections présidentielles, vous avez ainsi échappé à de longues et virulentes tirades anti-capitalisme. Je m’efforce également de ne pas m’étendre sur certaines de mes aversions les plus étranges ou de mes opinions les plus impopulaires, parce qu’il est des sujets dont il est absolument inutile de débattre: personne ne changera d’avis à la fin, et je vais juste réussir à plomber l’ambiance.
Au final, ça fait pas mal de limitations… mais l’essentiel, c’est que je trouve toujours des choses à raconter malgré tout!
Pour moi qui te lis quotidiennement avec un grand plaisir depuis quelques mois, il est clair que tu réussis parfaitement cet équilibre : une parole qui peut sembler parfois très intime et une pudeur absolue. J'ai souvent le sentiment que tu livres dans ce blog des choses de toi, évidemment, mais jamais je n'ai eu le sentiment que tu étais exhibitionniste, pour une raison simple : tes billets sont très bien écrits, ils ne donnent jamais l'impression d'une diarrhée verbale incontrôlée (si tu me passes l'impression). A l'inverse, ton blog n'a en effet rien à voir avec certains blogs (américains ou autres) où j'ai le sentiment que la personne se met en scène et réinvente sa vie… Quant à tes limitations, elles sont plus qu'honorables et nécessaires, dans ce difficile exercice "extime" (comme avait dit je ne sais plus qui à propos des blogs d'humeur, omparables aux journaux intimes en tout cas). Soit dit en passant, les mystères de google sont impénétrables, car figure-toi que je suis arrivée sur ton blog, la première fois, en faisant une des mes innombrables requêtes sur Chie Mihara… Je te souhaite une bonne journée!
Pardon Tasha, à la fin de ton com j'ai lu "bonne diarhée". Hum.
Projet : faire contrôler mes yeux.
Perso, tu t'en tires très bien, je ne te trouve jamais rasoir et je lis toujours tes posts avec plaisir, même si je fais partie de celles qui commentent peu!
Tu as raison de te fixer des limites pour ne pas, plus tard, regretter ce que tu aurais pu écrire (mais j'aurai bien voulu les tirades anti-capitalisme!!).
Le mélange de tout tes billets crée une image parfaitement agréable de ta personne avec des défauts juste suffisants pour nous éloigner du papier glacé des magazines 🙂
En tout cas, peu importe ce que tu n'écris pas, merci pour ce que tu écris !
Là, tes réflexions à propos du blog me font cogiter…Il y a juste deux personnes de mon entourage qui me lisent et c'est bien comme ça parce que leur présence en plus grand nombre donnerait des allures de règlage de compte à certaines notes alors que , je promets, il s'agit juste de ma caboche qui n'arrête pas de réfléchir aux relations humaines doublé d'un exercice d'écriture…
Pour répondre à ta question (comment ça tu n'en poses pas, mais si, mais si) pour ma part je suis assez admirative de ta manière de parler de "l'intime". Mais je ne mets peut-être pas ce curseur au même endroit que les gens "normaux".
J'ai toujours fait un énorme compartimentage de ma vie personnelle / professionnelle, familiale / amicale, "virtuelle" / réelle. Compartimentage qui foire très régulièrement quand le "virtuel" ne l'est plus du tout et que des "vrais gens" me connaissent depuis mon moi funambuline. Mais je m'égare.
Je trouve que ta manière de parler d'intime, donc, ne nous met pas en position de voyeurisme. On ne suit pas une genre de "téléréalité" sur blog où Armalite et Chouchou seraient des personnages dont on veut connaître les prochains déboires. C'est l'inverse. Probablement grâce à tes interrogations sur ta propres personnes (qui sont pour moi les parties les plus "intimes" de ce blog d'ailleurs, bien plus que les récits de vie commune par exemple, où j'ai l'impression que tu racontes plus facilement ce qui te fait plaisir d'écrire/de raconter que des détails triviaux.
Bref, ton management de l'intime me sied. J'en suis incapable, même si j'ai "nombrilisé" un peu plus cette année à force de te côtoyer… 😛
Tasha: Google me considère comme une source d'information pertinente sur Chie Mihara. Ma vie n'aura pas été vaine.
Sagattine: il y avait pire que les tirades anti-capitalisme, un long post sur le féminisme tellement virulent que j'étais sûre de fâcher 90% de mes lectrices avec, et que je n'ai jamais osé publier!
Ness: avoir donne l'adresse de mon blog à beaucoup de gens de mon entourage m'a permis d'instaurer un autre niveau de lien avec eux, et ça c'est chouette. La contrepartie, c'est que je dois me censurer davantage…
Funambuline: quand je parlais d''intime, je pensais effectivement plus aux posts où je parle de mes sentiments qu'à ceux où je raconte Chouchou et moi. Et je suis ravie d'avoir réussi à te nombriliser un peu; si je parle autant de choses intimes, c'est aussi parce que ce sont systématiquement celles qui m'intéressent le plus dans les blogs des autres…
Je fais partie des personnes qui t'ont connue Toi avant ton blog.
Je ne lis pas les blogs des gens que je ne connais pas (en fait je ne lis que ton blog ^^ ! ce qui ne veut pas dire que je ne connais personne ou Que des illettrés hein).
Nous n'avons pas toujours été … heu non … Nous avons quelques fois été d'accord sur certains sujets :))
En tout cas, tu es la première personne avec qui je garde le contact aussi longtemps alors que nous avons des opinions et modes de vie vraiment différents et que nous ne nous voyons … jamais !
Tu dois être l'A-M dont j'ai besoin pour me rendre moins "rigide".
En tout cas, je continuerai à te lire (et si besoin à t'écouter).
Et j'ose OUI j'OSE un :grisBisou:
Je me joins aux autres lectrices, tu as un super équilibre sur ton blog.
Je suis remontée loin, très loin dans tes archives et les détails bien plus intimes ne m'ont pas non plus dérangée. Bref, aucun exhibitionnisme (qui n'est pas un défaut, d'ailleurs, je trouve ;))
Au final, c'est super que tu "assumes" ce que tu écris (de si beaux textes, en même temps).
Perso, sur mon blog, je ne laisse que les billets les plus banals en mode public. Tout le reste est filtré. Et je n'assume tellement pas que j'efface certains billets ou les privatise.
Désolée pour ce commentaire inutile… Ma hantise en tant que commentatrice, c'est d'être rasoir (aussi), de donner l'impression de mieux savoir que tout le monde, bref, d'être insupportable, quoi. J'espère donc que ce n'est pas le cas.
Et bonne continuation à ce blog !
@ Funambuline : tu pourras te vanter de m'avoir arraché le seul éclat de rire de la journée… En même temps je vois pas pourquoi tu t'en vanterais, ça doit même te faire une belle jambe! :-))
Eh bien, je ne poste pas souvent mais je te lis régulièrement et j'adore ta façon d'écrire, ton humour, bref, souvent je rigole à ce que tu écris et pour ça, ben, merci.
Et non (enfin de mon point de vue) tu n'es pas rasoir !
Et puis, si on aime pas, on ne lit pas (c'est la magie du choix ^^).
Mais je suis contente d'avoir connu ton blog, même si c'est récent, car je découvre pas mal de choses et surtout, je rigole.
Encore une fois : merci
Merci à toutes de me lire, et puis aussi de me faire d'aussi gentils retours! 🙂
Coucou
Moi j'admire le recul que tu prends sur toi même dans tes posts. J'imagine qu'il y a du pré-arrachage de cheveux avant d'en arriver là mais j'admire autant tes analyses que ta façon de les écrire. Ton blog est loin d'être lisse comme beaucoup d'autres. J'aime énormément te lire et j'espère que tu continueras longtemps à tenir ce blog !
Un seul regret : les tirades anti-capitalistes, moi, j'aurais adoré !Mille bisous
JC
C'est le 1er que je lis en tout cas (sur une douzaine,on va dire)
ANNESO
Fred: ouais, j'ai un master en analyse de nombril!
JC: je n'en doute pas une seule seconde! et je sais que tu n'aurais pas été le seul.
Autre Moi: j'ai, à 95%, des amis qui ont le même profil que moi. tu es mon 5% de diversité ethnique :-DDDDD et je me disais hier que la première fois que j'ai rencontré junior, elle venait d'avoir 20 ans, et qu'elle en aura 30 le mois prochain… ça fait un bail, en effet!
Bonjour,
je trouve ton blog tout à fait personnel, ne serait-ce que parce que les critiques, de films, de livres, de séries apprennent des choses sur celle qui les écrit… Et cette intimité-là est réjouissante ! La part de mystère dans les relations humaines est quand même ce qui fait qu'on a envie de fréquenter quelqu'un : qui est-il/elle ? Que pense-t-il/elle ? En quoi est-il/elle différent(e) de moi ?
En tant que lectrice, j'ai horreur des blogs qui racontent tout, comme s'ils s'adressaient à de vieilles connaissances, ou qui interpellent les lecteurs/lectrices comme s'ils étaient de vieux/vieilles ami(e)s… Pour tout dire, je trouve même ça un peu effrayant car je me demande toujours si ces auteurs qui m'appellent "chérie", "belle", "adorée" etc. en font de même dans leur vie quotidienne. Parfois, j'ai l'impression que non et c'est infiniment triste.
Et j'aime beaucoup les billets de développement personnel, parce qu'ils incitent forcément à un peu d'introspection !
A mon sens, la distance est donc parfaite.