Si j’avais su, j’aurais pas achetu

Devenir propriétaire de son logement, c’est le rêve de tout Français moyen et, pour la plupart d’entre nous, de très loin la plus grosse dépense que nous ferons dans toute notre vie. Si je n’ai jamais adhéré au schéma mariage-enfants, j’ai toujours considéré comme une évidence que dès que je gagnerais ma vie, je commencerais à économiser en vue d’acheter un appartement. J’ai beaucoup bougé quand j’étais jeune adulte: études à Toulouse, passage d’un an et demi à Aix-en-Provence, puis quatre ans à Nantes et un an aux Zuess avant de revenir me poser – définitivement, croyais-je – à Monpatelin où j’avais grandi. L’arrivée à terme de mon PEL ayant coïncidé avec une donation de mes parents, j’ai commencé à chercher à la rentrée 2002, assez rapidement eu un coup de coeur pour un mignon duplex et concrétisé mon achat en janvier 2003, avec un crédit immobilier sur 15 ans. D’ici un peu plus de 5 ans, je serai donc officiellement propriétaire de mon appartement. Pourtant, si c’était à refaire, je ne suis pas certaine que je me lancerais de nouveau dans l’aventure. 
Au premier abord, l’argument financier semble sans appel: mieux vaut rembourser chaque mois 500 ou 1000€ à sa banque, en sachant qu’on les retrouvera à la fin, plutôt que de jeter la même somme par la fenêtre en payant un loyer. Mais quand on gratte un peu, on s’aperçoit que le calcul n’est pas si simple. Acheter un appartement, c’est payer, en plus de sa valeur, 7% de frais de notaire et une somme considérable en intérêts bancaires. Sachant que les premières années, les mensualités de remboursement comprennent environ deux tiers d’intérêts pour seulement un tiers de capital (tendance qui s’inverse au fur et à mesure de la durée du prêt), quelqu’un de plus savant que moi a calculé que pour qu’un achat immobilier vaille vraiment le coup du point de vue financier, il faut garder le bien au moins 7 ans. Si vous revendez au bout de 3 ou 4 ans, en réalité, vous perdez de l’argent. Or, de nos jours, il est assez rare qu’une personne en activité et en âge d’avoir des enfants conserve le même logement aussi longtemps…
Au-delà des frais de notaire et des intérêts bancaires, on sous-estime généralement les dépenses annexes que sont les impôts fonciers et les charges de copropriété (pour les gens qui sont en appartement) ou les travaux particuliers (pour ceux qui sont en maison individuelle). Au final, la note mensuelle se retrouve bien plus salée qu’un loyer, et empiète alors sur le reste du budget. Mieux vaut se sentir bien chez soi, parce qu’on ne peut plus consacrer les mêmes sommes aux sorties et aux vacances! Vous me direz que justement, être chez soi, ça n’a pas de prix: se sentir dans ses propres murs, pouvoir décorer comme on veut… Certes. En contrepartie, à vous les emmerdements (et les factures) des travaux. Et si vous avez fait un mauvais achat ou que vous vous lassez de votre logement au bout de quelques années, vous êtes bien davantage coincé qu’un simple locataire qui peut se contenter de poser son préavis et de foutre le camp trois mois plus tard. 
C’est peut-être une solution valable pour les vrais casaniers dont les goûts et les besoins ne sont pas appelés à évoluer beaucoup. En ce qui me concerne, bien que j’adore mon appartement, ma vie serait plus simple si je ne l’avais jamais acheté. (Et, non: pour tout un tas de raisons sur lesquelles je ne m’étendrai pas ici, elle ne redeviendrait pas plus simple si je vendais maintenant.) J’aurais placé mes sous autrement et conservé une mobilité qui me manque aujourd’hui. Dans le fond, même si j’adore rester chez moi, m’occuper de mon intérieur et en faire un cocon douillet, j’aime aussi déménager régulièrement, m’approprier de nouvelles villes et repartir quelques années plus tard. Parce que les choses ont tendance à me lasser au bout d’un moment, j’ai moins besoin de pérennité que de changement. Si vous êtes dans le même cas que moi, acheter votre logement n’est pas forcément une bonne solution. Réfléchissez-y avant de vous endetter pour les 20 ou 30 prochaines années.

Illustration trouvée sur cette boutique etsy

19 réflexions sur “Si j’avais su, j’aurais pas achetu”

  1. Figure-toi que j'y ai pensé et que j'aime beaucoup le concept 🙂 Les Airstream sont magnifiques… mais bon, je ne rentrerais même pas un dixième de ma bibliothèque dedans!

  2. Cécile de Brest

    Étant, de par le métier de mon mari, quelqu'un qui déménage beaucoup (tous les 2 ans), je ne partage pas ton opinion. Je rêve d'avoir un endroit à nous qui nous plaise vraiment et pas une maison où l'on vit parce que c'est près du boulot mais qu'on ne peut pas modifier parce qu'elle n'est pas à nous (et de toute façon je n'aurais jamais acheté le logement où nous vivons maintenant). Je crois en fait que j'en ai tellement soupé du changement que je n'en peux plus. On verra l'année prochaine si l'armée exauce nos vœux, auquel cas nous achèterons une maison dans l'optique d'y finir nos jours (bon, dis comme ça c'est assez glauque mais en fait non !!)

  3. J'imagine qu'on a plus besoin de "nidifier" quand on a des enfants (et aussi que c'est beaucoup plus chiant chaque fois qu'il faut déménager!).

  4. Je suis casanier mais locataire^^ et n'envisage pas pour l'instant de devenir propriétaire (même si mon PEL ne va plus être renouvelable l'an prochain).
    C'est principalement par fainéantise (pas envie de déménager plus loin pour vivre là où j'achèterais, pas envie d'avoir un locataire qui m'appellera (à raison) si la chaudière pète). Bref, je reste comme ça et je peux partir quand je veux (même si ce n'est pas prévu là dans l'immédiat). Les hasards de la vie font que des fois, elle est imprévisible et je n'ai pas vraiment envie de m'encombrer l'esprit avec ça.

    Du point de vue financier, acheter n'est pas toujours la meilleure solution d'ailleurs, cf cet article de 2010 .

  5. A part le fait que tu m'aies littéralement foutu le moral à plat… Nan, je rigole 😉

    Bref, je me suis posé ce genre de questions aussi vu le projet en route et pour moi, après avoir vécu par 2 occasions en Espagne, il était clair que je devais acheter. J'ai toujours eu besoin d'avoir un toit où je ne risquais rien, où ça ne dépendrait que de moi.

    Cela dit, j'ai aussi pensé au fait que j'aurai peut-être un jour un mec qui voudra peut-être vivre ailleurs que "chez moi", etc. Et j'ai donc acheté (enfin, presque-acheté) en prenant soin d'avoir des mensualités égales à un loyer raisonnable pour l'endroit. Ainsi, je conserve une possibilité de changement tout en restant proprio! Et hop!

  6. Le Suisse est locataire. Non pas par nomadisme (oh que non), mais parce que posséder son logement est impossible pour la plupart (ta note ne ferait d'ailleurs pas un peu suite à notre conversation sur la fameuse valeure locative helvétique dont je te parlais ce weekend 😉 ?). Financièrement.

    Pour cela, parce que j'adore appeler un propriétaire pour qu'il fasse réparer mes toilettes, changer ma chaudière, etc. sans que je n'aie rien à payer, parce que ne sachant pas de quoi demain sera fait, je préfère pouvoir déménager dans moins cher s'il le faut, parce que je ne sais pas où je veux vivre ces prochaines années, je suis locataire.

    Un jour, si je décide de finir mes jours dans un pays qui ne rackette pas les propriétaires, j'y penserai.

    Ou pas.

  7. Disons que le sujet traînait sur ma liste de posts à écrire un de ces 4, et que le fait d'avoir été en Suisse, où Lady Pops m'a expliqué un jour que très peu de gens pouvaient devenir proprios, l'a fait passer en tête.

  8. Grâce à ton article, je me dis que finalement je suis contente de ne pas avoir acheté un appartement 😉

  9. Argh, la dure réalité après avoir reçu mon appel de fonds octobre-décembre 😀
    Tous tes arguments se tiennent, ceci dit, étant en région parisienne, le choix est vite vu : 600 € pour un minuscule endroit et pour être proche des activités culturelles, c'est beaucoup. 1000 € pour 2 fois plus de surface (certes, un peu plus loin) me paraît être un bon compromis.
    Et puis bon, avec un toit sur la tête, même s'il appartient à la banque (pour l'instant, je dois avoir un cinquième de la buanderie…), je sais que même sans travail, j'aurai un endroit où loger. Et mes futurs nenfants aussi.
    Bon, je dois avoir 1 an ou 2 de plus que toi lorsque tu as acheté, alors la désillusion viendra peut-être, mais c'est vrai qu'on m'a toujours rabâché qu'il fallait vivre sous son propre toit.

  10. On m'a tanné depuis ma majorité en me rabachant "tu devrais acheter un appart.Quand tu seras vieille tu auras ton truc à toi !!"
    Ouai sauf QUE … j'ai eu la bonne idée de faire une demande en HLM (oh mon Dieu elle vit en HLM en banlieue parisienne ^^)quand j'ai eu 18 ans, alors que je ne voulais pas d'appart de suite.
    Lorsque j'ai eu envie (et surtout les moyens) de quitter le cocon familiale, j'ai eu un F2 dans un HLM et un loyer qui va avec !
    Je vis dans la banlieue pas trop pourrie de Paris. Avec le RER je suis sur les Champs Elysées (c'est juste un exemple hein, je ne vais pas aux Champs tout le temps)en 20 mn.
    Orly est à 1/4 d'heure en voiture et Roissy 40 mn.
    J'ai 45m² et plein de placards pour 350 € CC par mois et pas de frais supplémentaires en cas de soucis de plomberie, d'electricité etc …
    Je ne regrette pas un instant de ne pas avoir acheté un "truc à moi". Je peux me faire plaisir avec les voyages ou en changeant de voiture.
    C'est d'ailleurs la seule chose dont je suis propriétaire … une voiture 🙂

    J'vous ai raconté ma vie la non ??

    Tout ça pour dire que je comprends ton raisonnement du moment ^^

  11. "C'est d'ailleurs la seule chose dont je suis propriétaire … une voiture :-)"

    …A qui appartient le string que tu as sur les fesses en ce moment? O_o

  12. Le fait d'être proprio ou locataire, ça dépend vraiment de la situation de chacun. Quand on est du genre à bouger relativement souvent, qu'on n'a pas vraiment de situation fixe perso ou pro, sûr que l'achat n'est sans doute pas une idée très évidente.

    Perso, je viens d'une famille de casaniers et je n'en dépare pas, et mon amie non plus. Alors rester locataires, non, trop l'impression de balancer l'argent par la fenêtre pour rien avoir en finalité (et devant subir les humeurs d'un proprio parfois foireux, sait-on jamais). Couple stable, pas d'enfant, ne bougeant jamais (on ne part même pas en vacances, c'est tout dire), on a vite acheté un appart il y a quelques années. Et comme on est du genre économes, on a pu rembourser le prêt il y a peu. Donc, plus de loyer, plus de remboursement, ça fait grave des économies chaque mois. Même si évidemment à côté, il y a les impôts fonciers et les travaux (non négligeables). Mais si ma copine perd son job (ce qui risque d'être le cas) ou si moi, je paume mon boulot de freelance, au moins, on a un toit au dessus de nos têtes qu'on ne peut pas nous enlever. Pour une angoissée comme moi, ce n'est pas négligeable…

    Mais chaque situation est différente et certaines ne vont simplement pas avec le fait d'être proprio. La seule question que je me pose dans ce cas, c'est pour plus tard : une fois en retraite, avec un revenu potentiellement limité, la location ça n'est pas forcément évident, non ?
    (Premier commentaire sur ce blog que je suis quotidiennement, merci pour tous ces billets !!)

  13. Aria, bienvenue dans les commentaires. Je verrai peut-être la situation sous un autre angle dans 5 ans, quand j'aurai fini de payer cet appart et qu'il ne me restera plus que les frais annexes…

  14. Peut-être les choses seraient-elles différentes si tu louais l'appartement. Ici, tu vis dans l'étrange situation (que je partage) d'avoir un appartement que tu paies chaque mois pour n'y habiter que quelques jours par mois. J'envisage de louer le mien, je viens de terminer les travaux de peinture, il reste la nouvelle porte de la cuisine par le menuisier et ensuite il sera prêt à être mis en location. Je pense qu'il fait partie des choses dont l'existence me rassurer, une sorte de pomme pour la soif, chère et génératrice de soucis mais une pomme quand même.

  15. J'avoue que je suis totalement du côté "loueur" et non "acheteur". J'habite en région parisienne depuis une bonne quinzaine d'années et j'ai été pas mal refroidie par les expériences de mes amis propriétaires qui ont toujours un ravalement de façade, une réparation d'ascenseur ou autre qui tombe au pire moment. En plus, mes parents ayant divorcé à plusieurs reprises et ayant dû revendre plus ou moins en catastrophe, j'ai surtout l'image d'un lieu qui "attache" plus qu'il ne sécurise.
    Après, j'ai aussi la chance d'être en couple et de pas trop mal gagner ma vie, ce qui me permet de ne pas vivre dans une boîte à chaussure sous les toits sans ascenseur (auquel cas, ma position serait sans doute différente).

  16. Pour ma part, je vois plus la propriété comme une réelle opportunité de se constituer un capital, un patrimoine. Je souffre tous les mois de devoir verser un loyer à un propriétaire totalement indigne tandis que je ferais bien mieux de capitaliser pour ma retraite, si j'y arrive. Ma mère divorcée, elle, est bien heureuse aujourd'hui de ne plus avoir de loyer à payer tous les mois, au vu de sa maigre pension.

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