Je suis fatiguée.
J’ai passé la semaine à courir à la pharmacie chercher ceci ou cela, à tenir la main de mon père pendant ses crises, à lui distribuer ses médicaments aux heures voulues, à essayer de joindre ses médecins au téléphone, à rester positive-positive-positive et souriante et rassurante.
J’ai lutté contre l’angoisse de la maladie qui m’empêche de m’endormir le soir et qui fait que la première chose à laquelle je pense en revenant à la conscience le matin, c’est le mot « cancer »; cette angoisse qui me donne envie de pleurer de trouille tandis que je me palpe les seins sous la douche et imagine sentir une boule dans celui de droite.
J’ai géré ma mère qui m’appelle toutes les cinq minutes parce que son ordinateur lui propose des mises à jour et qu’elle ne sait pas si elle doit les faire (moi non plus); ma mère qui me harcèle chaque jour pour que j’appelle le SAV de la Fnac afin qu’ils viennent remplacer le disque dur défectueux de son PC, alors que je ne suis pas plus qualifiée qu’elle pour m’en charger et que j’aimerais bien pouvoir bosser un peu au lieu de passer deux heures à m’énerver au téléphone; ma mère qui ne prend plus AUCUNE décision depuis que je suis là – tout à l’heure, elle est venue dans ma chambre (où je tentais de m’isoler parce que je n’en pouvais plus de cette promiscuité étouffante) pour me demander: « C’est quoi déjà qu’il doit prendre 2 heures avant le repas? ».
J’ai géré mon père qui ne prend ses médicaments que si on les lui donne, et qui même ainsi rechigne un maximum sous prétexte que « c’est pas bon » ou qu’il déteste boire de l’eau; mon père qui refuse de comprendre qu’il doit être acteur de son traitement, que les médecins ne sont pas dans son corps et que s’il a mal il DOIT le leur dire et réclamer quelque chose pour soulager sa douleur; mon père qui veut conduire alors qu’il est marqué en jaune vif sur la notice de ses patchs à la morphine qu’il ne doit pas le faire, et comme j’insiste pour lui servir de chauffeur, il passe tout le temps où nous sommes en voiture à scander: « 3ème… 4ème… Ne roule pas trop près du bord… Attention là il y a un dos d’âne… » (alors que quand c’est ma soeur qui conduit il ne dit rien).
J’ai lutté pour bosser malgré les pitreries de Dechavanne ou de Jean-Luc Reichmann diffusées à 3 mètres de mes oreilles, essayant d’arriver coûte que coûte à traduire 18 pages par jour, y compris quand l’auteur raconte une tempête en mer en se plantant dans les termes de navigation à voile utilisés et que du coup, je ne comprends même pas ce qu’il cherche à dire.
J’ai dû me contenir pour ne pas hurler que je n’étais pas vacances quand mes parents ont protesté qu’on n’allait quand même pas faire les courses un samedi, il y a trop de monde dans les magasins; oui mais c’est ma seule journée de liberté et les rendez-vous en radiothérapie de papa sont à midi toute la semaine prochaine, à l’autre bout de Toulouse, ce qui signifie que ça va me bouffer mes heures les plus productives de la journée; et je veux bien être à leur disposition pour toutes les choses graves ou dont ils ne peuvent pas se charger eux-mêmes, mais merde j’ai aussi un boulot à faire et des factures qui ne vont pas se payer toutes seules et ça fait déjà presque trois semaines que je bosse en pointillés.
Je n’ai pas vu Chouchou ni mes chats depuis le 12 septembre; niveau logistique, je me débrouille avec le contenu de ma valise et ma figure ressemble à une devanture de mercerie de n’avoir pas vu la crème pour peaux intolérantes d’Avène depuis trop longtemps – quant à mes cheveux, mes racines sont si longues qu’ils ont l’air bicolores.
J’ai essayé de me changer les idées en bouquinant un peu. Première tentative: « La Tour de Tokyo, Maman, moi et Papa de temps en temps », de Lily Francky. La mère du héros chope un cancer aux deux tiers du livre et meurt. Je me suis rabattue sur « La musique du hasard » de Paul Auster. A la troisième page, le narrateur explique qu’il a hérité une grosse somme de son père mort d’un cancer. Je suis passée à ELLE: en ce moment, c’est campagne de prévention contre le cancer du sein sur tous les fronts.
Tous les soirs je me couche avec une énorme boule dans la gorge, sans personne pour me réconforter et me dire que tout ira bien, et je tressaille au moindre bruit en provenance de la chambre de mes parents.
J’ai mal partout.
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Je voudrais te faire un câlin virtuel.
COURAGE COURAGE COURAGE.
*Câlin*
Courage. Peut-être que ta famille ne le voit pas bien, mais tu accomplies quelque chose d'extrêmement fort et important.
En tant que lectrice, je ne suis pas présente physiquement, je n'ai que des mots à offrir, mais je pense à toi.
Des bisous.
Mélusine
Pas facile dans ces moments-là de se manifester sans indélicatesse… Mais je te lis chaque jour et je t'envoie mes pensées les plus réconfortantes.
Simplement courage Armalite, courage pour tout…
Je t'envoie un collier de bisous tout doux et une écharpe moelleuse de tendresse. Tu décris la situation avec tellement de pudeur et de justesse, que te lire me bouleverse. Je ne sais pas pourquoi il me revient en mémoire notre longue conversation futile et légère dans le minibus au Maroc. La vie devrait toujours être comme ça. Je t'embrasse fort Armalite.
Courage !
Nous sommes tous là pour te soutenir.
Nathalie
… Bon je retire ce que je disais sur FB : ne partage pas les petits coeurs (et tout ce qu'ils sous-entendent) tu en as bien besoin.
… Voilà, je ne sais pas qu'ajouter d'autre, à part beaucoup d'encouragements, et le fait que je pense à vous tous (même si je ne vous connais pas vraiment)
Mon homme et moi pensons très très fort à toi, tu as toutes nos pensées de soutien. Peut-être à bientôt.
Tendres bisous
Antonia: rhâ cette semaine au Maroc, comme c'était bien! J'espère qu'on aura de nouveau l'occasion de voyager ensemble…
Tout le monde: merci pour vos gentilles paroles de soutien, ça me touche.
Des semaines que je ne sais pas commenter ici. Je n'ai pas les mots, je ne sais pas quoi dire qui soit un tant soit peu réconfortant ou qui pourrait te faire sourire.
Mais je n'en pense pas moins et je suis là, silencieuse derrière mon écran, avec toi très souvent en pensées.
*hug*
Parfois, je ne sais plus quoi dire… mais je pense à toi !
Bisous, de la part de Maurice et Eddy aussi !
Courage, je te fais un énorme câlin virtuel
Je ne sais pas ce que peut te communiquer une anonyme qui lit ton blog depuis plusieurs semaines : du soutien, de la compassion, de l'énergie, de l'espoir.
Prends ce qui pourra te servir. Prends tout.
Ne prends rien.
A ta convenance. Courage.
je te souhaite beaucoup de courage. le médecin de ton père peut sans doute t'aider à tenir le choc, prends le temps d'aller le voir et pas seulement de lui téléphoner. Tu n'es pas non plus obligée d'aller à TOUS les rendez vous de radiothérapie, les ambulances existent. De toutes façons il sera tout seul sous l'appareil, par contre vas-y pour les deux premières qui sont les plus éprouvantes.
Moi non plus, je ne sais pas quoi dire. Mais je pense à toi.
Tiens bon ! Il y a plein de pensées chaleureuses qui se concentrent autour de toi et de ton père pour vous aider, vous encourager : il suffit de lire tous ces commentaires. J'y ajoute mes pensées les plus douces et les plus positives aussi.
Courage, TOUT IRA BIEN <3
:bisous:
Des pensées, encore et encore. Je t'embrasse.
Courage!
J'ai envie de t'envoyer un calin virtuel! C'est vraiment beau ce que tu fais pour tes parents! Ils ont de la chance de t'avoir à leur coté!
Bisous
Je te tiens virtuellement la main pour t'accompagner et t'aider à ne pas trébucher… c'est peu, trop peu … mais le coeur y est!