
N’allez pas croire pour autant que j’ai décidé de jouer les tire-au-flanc en ce début de week-end. A 8h, je suis debout pour préparer les derniers cartons. A 10h, je retrouve la propriétaire au bas de notre nouvel immeuble pour la remise de la clé de la cave, que l’ex-locataire lui a seulement restituée hier. A 10h30, je retrousse mes manches et attaque le montage des grandes Besta.
Très vite, je me heurte à un problème que tous les heureux propriétaires de bibliothèques Ikea visualiseront aisément. Après avoir assemblé, en position couchée, le bas du meuble, les deux côtés et la séparation du milieu, je dois glisser dans les rainures prévues à cet effet le mince contreplaqué censé servir de fond. Problème: pour ne pas tenir de place dans le carton, ce contreplaqué est articulé au milieu. Donc, au lieu de se tenir bien raide une fois à l’horizontale, il plie légèrement – ce qui fait qu’il est impossible de le pousser tel quel dans la rainure du bas du meuble. Pour pouvoir l’insérer correctement, il faudrait le tenir par en-dessous et le guider/tirer à l’extrémité inférieure tout en continuant à le pousser à l’extrémité supérieure. Piece of cake dans le cas d’une petite Besta, comme je le découvrirai un peu plus tard. Dans le cas d’une grande, qui fait 1m90 de haut (contre à peine 1m54 pour moi, je le rappelle), c’est juste impossible.
En désespoir de cause, je tente une manoeuvre hyper périlleuse pour l’intégrité physique du meuble – et, accessoirement, pour la mienne: relever ce qui, pour le moment, est une planche de 1m20 de large à laquelles sont fixées, par une seule extrémité, trois planches de 1m90 de haut. Saint-Ikea doit être avec moi aujourd’hui, car j’y parviens sans autre dommage qu’une mémorable suée. En position verticale, j’arrive enfin à faire rentrer mon contreplaqué dans la foutue rainure. Et, pas bête, j’assemble le haut du meuble perchée sur un escabeau au lieu de le coucher à nouveau.
Tout de même, je n’ose compter sur la vigilance de Saint-Ikea, qui doit avoir bien d’autres ouailles à surveiller en ce week-end pluvieux de début d’automne. Pour le montage de la deuxième grande Besta, j’essaie une autre tactique. J’assemble le bas, les côtés et la partition rainure vers le haut plutôt que vers le bas, comme indiqué par la notice (voir photo). Puis je glisse le contreplaqué presque jusqu’au bout, et pour pouvoir le guider sur le dernier centimètre crucial, je rampe à l’intérieur de la bibliothèque retournée. Sur les coudes, à la Rambo. Une fois en place, je me retourne prudemment sur le dos. Du bout des doigts, je tente de tirer le contreplaqué tandis qu’avec mes orteils fléchis, je le pousse à l’autre extrémité. La manoeuvre est parfaitement ridicule, et parfaitement couronnée de succès.
Après ça, tout me paraît risiblement simple. Je vide mes cartons d’affaires de scrap et nos caisses de bouquins, de DVD et de CD dans les Besta fraîchement montées. Je range quelques trucs dans la cuisine et la salle de bain. Le meuble télé est encore en kit dans ses cartons auxquels je n’ai pas touché, mais il est 14h20 et je n’ai pas déjeuné ce matin faute de vaisselle restante rue M***. Je frôle l’hypoglycémie.

De retour à l’appartement, je suis en train de fignoler mon rangement quand un concert de « youyouyouyouyou » s’élève à l’extérieur. Je regarde par la fenêtre. Oh oh. Apparemment, il y a un mariage… euh, juif, je dirais, un peu plus bas dans l’avenue. Et les voitures des invités sont garées en double file des deux côtés, bouchant le passage. Quelques conducteurs mécontents klaxonnent et font gronder leur moteur, mais en vain. Je ne vois vraiment pas comment Chouchou va réussir à se garer à moins de 200 mètres de la maison. Et 200 mètres avec une machine à laver de 90 kilos à bout de bras, c’est au moins 195 de trop.

Après le départ de nos aides, la soirée se passe au ralenti. Nous sommes épuisés mais très heureux de l’allure prise par notre nouveau logis. La toile cirée « alphabet » commandée à prix d’or chez Cath Kidston donne la touche multicolore nécessaire pour réveiller la pièce et lier visuellement nos autres éléments de déco. Je suis ravie de sortir enfin des cartons tout un tas de brols accumulés au cours des derniers mois en vue de ce moment: par exemple, l’oiseau en bois et le petit vase design rapportés de Copenhague. Nous dînons frugalement sur un coin de table – deux tranches de jambon, un peu de stoemp aux épinards. A 22h15, nous sommes couchés dans notre nouvelle parure de lit Hulda Rund orange et blanche. Bien que crevée, je mets énormément de temps à m’endormir. Je suis trop excitée. Notre premier vrai « chez nous », enfin!
Quelle aventure… En effet un repos du guerrier bien mérité…