De l’envie qu’on a parfois d’étrangler les gens qu’on aime avec leurs propres boyaux

Quand j’étais adolescente, ma famille habitait dans un assez grand appartement disposé tout en long. Mes parents dormaient dans la chambre du fond. Les soirs où je rentrais tard, à peine sortie de l’ascenseur, j’entendais mon père ronfler à travers la porte malgré le battant de 4 cm d’épaisseur et les 20 mètres de distance qui nous séparaient. Je n’ai jamais compris comment ma mère faisait pour dormir à côté de lui.
A 17 ans, j’ai quitté ma province bien décidée à empoigner la vie pour passer les oraux des grandes écoles de commerce à Paris. Mon père m’a accompagnée. Il nous avait retenu une chambre à deux lits jumeaux dans un foyer de la Marine Nationale pour laquelle il travaillait alors. Je n’ai pas fermé l’oeil de toute la semaine. Le matin, quand j’arrivais devant les jurés, j’avais le teint blême et le regard vitreux de la nana qui a sacrifié la moitié de ses nuits sur l’autel de Keynes et de Marx depuis le mois de septembre – moi qui avais passé toute mon année de prépa à glander.
Quand je sortais avec Etre Exquis, nous ne vivions pas ensemble. Comme j’avais déjà de gros problèmes d’endormissement et pas encore commencé les somnifères, il s’assoupissait systématiquement avant moi. Toutes les cinq minutes, je lui donnais un coup de pied ou de coude en sifflant: « Tu ronfles! ». Réveillé en sursaut, il geignait: « Hein, quoi? Tu me fais mal! » et se rendormait aussi sec. Dix secondes plus tard, la cacophonie reprenait sans espoir d’arrêt avant le lendemain. Les yeux grands ouverts dans le noir, je serrais les dents en imaginant mille moyens de le tuer dans d’atroces souffrances. Le jour où il m’a dit que non, il ne serait pas prêt à se faire opérer pour régler le problème, j’ai su qu’on ne passerait pas notre vie ensemble.
Soeur Cadette et David sont arrivés hier. Ils sont en train de dormir comme des bienheureux sur la mezzanine. A chacune de ses inspirations, David produit un son légèrement plus tonitruant que celui d’un V8. Nous l’ignorions et n’avions pas prévu de boules Quiès. Il est 5h30. Hawk vient de partir au travail sans avoir dormi du tout, et moi, je me demande si ma soeur m’en voudrait beaucoup de se réveiller veuve.

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5 réflexions sur “De l’envie qu’on a parfois d’étrangler les gens qu’on aime avec leurs propres boyaux”

  1. Je suis pliée de rire en te lisant. Décidemment, j’aime vraiment venir te rendre visite. Une nouvelle surprise est au rendez vous chaque jour. Une véritable récréation.

    J’organise un stage de carnets de voyage en Juillet 2009. J’attends d’en savoir un peu plus pour t’en parler mais la destination me fait déjà rêver…

    A bientôt,
    Et encore merci de me donner ma dose de vitamines et de fous rires chaque jour.
    antonia

  2. Je te signale qu’en pharmacie il existe d’excellents spray anti-ronflements…et que ça fonctionne…:-)
    Je peux en témoigner…

  3. le pire c’est quand on reveille le , et qu’il nous jur qu’il ne dormait pas , la haine:o)

  4. Antonia: you’re welcome 🙂
    Sioran: mais oui! et le pire c’est qu’il en a un. mais il n’aime pas s’en servir parce que « ça n’a pas bon goût ». quand j’ai entendu ça, j’ai VRAIMENT failli l’étrangler.
    Boucles d’or: décidément les hommes sont tous les mêmes 😉

  5. Linda Lemay doit avoir vécu les mêmes expériences que toi….

    Moi j’aurais jamais cru
    Que j’penserais au divorce
    Mais l’idée m’est venue
    Vers la fin d’la nuit d’noces
    C’est pas que j’te déteste
    Ou que j’veux t’voir mourir
    C’est juste que tu m’agresses
    Chaque fois qu’tu respires !
    Non c’est pas qu’tu m’écœures
    Ou que j’peux plus t’sentir
    Mais essaie de dormir
    Dans la pelle d’un tracteur !
    C’est pas qu’t’es pas gentil
    C’est qu’t’as dû avaler
    Lorsque t’étais petit
    Un moteur de Harley

    Chéri, tu ronfles

    J’t’ai donné des coups d’genou
    J’t’ai secoué, j’t’ai tourné
    J’t’ai roué de coups d’pied
    Ça n’a rien changé du tout
    Quand t’es près d’étouffer
    Là je guette en silence
    Presque entrain d’espérer
    E puis « rrron » tu r’commences
    J’me suis mis des bouchons
    Et des bonnets d’grand-mère
    Mais y a tes vibrations
    Mesurables sur « Richter »
    J’t’ai acheté toutes les marques
    D’humidificateur
    Pour calmer tes horreurs
    D’amygdales qui claquent
    Et puis j’ai bâillonné
    Ta grosse face de limace
    En osant prétexter
    Que c’était un fantasme
    Quand j’te pince les narines
    Jusqu’à c’que ça fasse mal
    C’est au tour des babines
    De faire « ppfff » comme un cheval
    Y aurait l’opération
    Qui nous sauverait la vie
    Mais monsieur l’étalon
    A peur des bistouris
    Pourrais-tu m’expliquer
    Me confier ton secret
    Dis, t’es-tu fait greffer
    Entr’la gorge et le nez
    Un broyeur à déchets… ?
    Y a sûrement une façon
    Une potion miracle
    A donner aux cochons
    Pour ne plus qu’y renâclent
    Moi j’t’aimerais ma grenouille
    Si c’tait pas qu’tu coasses
    Si j’ramonais ta face
    A grand coup de quenouilles
    Au début j’me disais
    Que j’allais m’habituer
    Mais alors j’ignorais
    Que t’allais empirer !!!
    Là, j’comprends le bonheur
    Le bonheur de ta mère au mariage
    Elle rêvait qu’son enfant
    Qu’son enfant-pas-d’muffler déménage !
    J’vais te tirer d’affaire
    Si tu veux que j’me charge
    De t’trouver un garage
    Ou un vétérinaire
    Sinon, r’tourne chez ta mère
    Avec ton vice caché
    J’vais lui dire de t’refaire
    Et puis de s’appliquer !!!

    Quand à moi j’ai eu la chance d’avoir un papa ronfleur acommpagné d’une maman ronfleuse… je compatis donc….

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