En avril, je décidai de me mettre au régime pour me délester enfin des kilos qui m’empoisonnaient la vie. J’allai jusqu’à solliciter l’aide d’une diététicienne. Les premières semaines, la perte de poids fut lente mais régulière. J’adoptai une alimentation équilibrée, à mille lieues des régimes spectaculaires qui produisent des résultats ultra-rapides mais éphémères (et au prix de quelles privations!). Et j’eus bientôt le plaisir de revoir un 5 en premier chiffre sur ma balance. Psychologiquement, c’était un cap très important pour moi. Puis il y eut les vacances aux Etats-Unis où je repassai brièvement dans les 6. A mon retour, j’annulai le rendez-vous suivant chez la diététicienne au prétexte que ça ne servait à rien d’aller la voir tant que je n’avais pas repris mon poids pré-voyage.
Depuis… rien. Je ne suis pas retournée voir cette brave dame, et mon poids oscille constamment autour des 59,5 kilos. J’ai trouvé un mode d’alimentation qui me convient, d’une part à cause de ses effets physiques positifs (au-delà de l’aspect pondéral), d’autre part parce qu’il ne me force jamais à m’affamer. Je pourrais sans doute faire quelques efforts supplémentaires mais… Quand je me regarde dans la glace, je n’ai plus jamais envie de dire « beurk ». Entendons-nous bien, je n’ai pas non plus envie d’appeler Elite et de m’enquérir de la date du casting pour la prochaine couv’ de Cosmo. Mais je me sens pleine d’indulgence envers mon corps. Je vois ses petits défauts, et tout ce qu’ils m’inspirent c’est une tendresse résignée. Je vois aussi ses qualités, et je comprends un peu mieux ce qui peut attirer mon amoureux. Il faut dire que tout ça, c’est grâce à lui. Difficile de continuer à se vomir quand quelqu’un vous regarde avec autant de désir que si Gisele Bundchen était un vulgaire boudin à côté de vous, vous répète sans cesse que vous êtes belle avec des trémolos d’émerveillement dans la voix et vous prouve sa sincérité en passant son temps à vous mitrailler avec son appareil photo.
Il y a plein de filles en surpoids que je trouve magnifiques. Au nom de quel orgueil mal placé refuserais-je d’admettre que ce qui s’applique à elles peut également s’appliquer à moi? Les brindilles à la Kate Moss sont de superbes portemanteaux, mais d’un point de vue physique elles me laissent totalement froide; celles qui m’inspirent des fantasmes interdits aux moins de 18 ans ont toujours des seins, des hanches, un cul rond et un petit ventre moelleux – alors pourquoi Hawk ne pourrait-il pas avoir tout le temps envie de moi même avec 5 kilos de trop? Et surtout, comment une fille intelligente et parfaitement capable de voir au travers de la dictature de la minceur (moi, donc) a-t-elle quand même pu s’y laisser prendre si longtemps? Si tout le temps et l’énergie que nous passons à nous préoccuper de notre poids était consacré à quelque chose de plus utile ou tout simplement de plus agréable, mesdemoiselles, nous aurions déjà trouvé un vaccin contre le Sida, envoyé l’une d’entre nous sur Vénus ou mis au point le tissu révolutionnaire capable de remodeler nos courbes à l’envi.
Je laisse le mot de la fin à Eve Ensler avec un extrait de son dernier livre « Un corps parfait ». « Dites aux faiseurs d’images, et aux vendeurs de magazines, et aux chirugiens esthétiques, que vous n’avez pas peur. Que ce qui vous effraie, c’est la mort de l’imagination, de l’originalité, de la métaphore, de la passion. Et soyez téméraires, aimez votre corps, arrêtez d’essayer de le réparer: il n’a jamais été cassé. »
Depuis… rien. Je ne suis pas retournée voir cette brave dame, et mon poids oscille constamment autour des 59,5 kilos. J’ai trouvé un mode d’alimentation qui me convient, d’une part à cause de ses effets physiques positifs (au-delà de l’aspect pondéral), d’autre part parce qu’il ne me force jamais à m’affamer. Je pourrais sans doute faire quelques efforts supplémentaires mais… Quand je me regarde dans la glace, je n’ai plus jamais envie de dire « beurk ». Entendons-nous bien, je n’ai pas non plus envie d’appeler Elite et de m’enquérir de la date du casting pour la prochaine couv’ de Cosmo. Mais je me sens pleine d’indulgence envers mon corps. Je vois ses petits défauts, et tout ce qu’ils m’inspirent c’est une tendresse résignée. Je vois aussi ses qualités, et je comprends un peu mieux ce qui peut attirer mon amoureux. Il faut dire que tout ça, c’est grâce à lui. Difficile de continuer à se vomir quand quelqu’un vous regarde avec autant de désir que si Gisele Bundchen était un vulgaire boudin à côté de vous, vous répète sans cesse que vous êtes belle avec des trémolos d’émerveillement dans la voix et vous prouve sa sincérité en passant son temps à vous mitrailler avec son appareil photo.
Il y a plein de filles en surpoids que je trouve magnifiques. Au nom de quel orgueil mal placé refuserais-je d’admettre que ce qui s’applique à elles peut également s’appliquer à moi? Les brindilles à la Kate Moss sont de superbes portemanteaux, mais d’un point de vue physique elles me laissent totalement froide; celles qui m’inspirent des fantasmes interdits aux moins de 18 ans ont toujours des seins, des hanches, un cul rond et un petit ventre moelleux – alors pourquoi Hawk ne pourrait-il pas avoir tout le temps envie de moi même avec 5 kilos de trop? Et surtout, comment une fille intelligente et parfaitement capable de voir au travers de la dictature de la minceur (moi, donc) a-t-elle quand même pu s’y laisser prendre si longtemps? Si tout le temps et l’énergie que nous passons à nous préoccuper de notre poids était consacré à quelque chose de plus utile ou tout simplement de plus agréable, mesdemoiselles, nous aurions déjà trouvé un vaccin contre le Sida, envoyé l’une d’entre nous sur Vénus ou mis au point le tissu révolutionnaire capable de remodeler nos courbes à l’envi.
Je laisse le mot de la fin à Eve Ensler avec un extrait de son dernier livre « Un corps parfait ». « Dites aux faiseurs d’images, et aux vendeurs de magazines, et aux chirugiens esthétiques, que vous n’avez pas peur. Que ce qui vous effraie, c’est la mort de l’imagination, de l’originalité, de la métaphore, de la passion. Et soyez téméraires, aimez votre corps, arrêtez d’essayer de le réparer: il n’a jamais été cassé. »
Ah, donc, Ensler a continué son combat après « Les Monologues du Vagin ». Bon à savoir.