Hier, j’ai reçu le faire-part de naissance de la fille de Fleur. Le prénom pourtant original me disait quelque chose. J’ai mis une bonne minute à le replacer: c’est celui de l’héroïne de « La nuit des temps » de Barjavel. Puis je me suis souvenue que Fleur avait lu et adoré le bouquin quand elle était au collège.
J’avais cessé de l’appeler après le jour de l’an 2006, quand elle se lamentait parce qu’elle s’était fait plaquer par un mec auquel elle ne tenait même pas. Marre de ses déboires amoureux et de passer mon temps à l’écouter gémir. Les gens qui vont toujours mal tendent à me fatiguer assez vite. Et puis en novembre, j’étais tombée par hasard sur elle dans un magasin. On avait dîné ensemble; elle m’avait annoncé qu’elle était enceinte de son nouveau copain, avec qui elle sortait depuis à peine plus de six mois. Elle était radieuse. J’ai vraiment espéré que cette fois serait la bonne pour elle. Son histoire était jolie; elle redonnait de l’espoir à mon coeur meurtri. A l’époque, je commençais tout juste à sortir avec Hawk et bien que déjà mordue, je n’osais pas croire que notre relation puisse évoluer et durer.
Je viens d’appeler Fleur pour prendre de ses nouvelles. La conversation n’a pas duré très longtemps, car Melle Barjavel commençait à manifester sa faim en bruit de fond. Je me disais qu’on pourrait peut-être dîner ensemble un soir, mais Fleur et l’homme de sa vie sont en plein travaux (qu’ils réalisent eux-mêmes) avant déménagement, et Fleur reprend le boulot à la fin du mois. On a convenu d’attendre mon retour de vacances. Je suis plus déçue que je ne l’aurais cru. Sans doute parce que, égoïstement, j’avais envie de me shooter du bonheur de gens qui ont très vite surmonté les obstacles affectifs et matériels que j’abats avec beaucoup plus de lenteur en ce moment. Même si leur plan de vie n’est pas du tout le même que le mien.