Ce matin avant de quitter l’hôtel, Isa et moi déposons nos bagages à la réception – enfin, dans un salon auquel n’importe qui peut accéder quand le réceptionniste n’est pas à son poste. D’un côté, c’est peu rassurant. De l’autre, ça m’amuse d’imaginer la tête du voleur qui, ouvrant mon sac à dos à petites fleurs, n’y trouverait que des sous-vêtements sales, des livres en anglais et une figurine en plastique semi-écorchée.

Malgré les prévisions météo, il fait encore beau aujourd’hui. Nous nous dirigeons à pied vers Binici, un salon de thé japonais où nous étions déjà allées ensemble. Est-ce qu’un strawberry shortcake accompagné d’un thé au yuzu fait un petit-déjeuner convenable? Probablement pas, mais c’est si bon! Avant de repartir, j’achète deux intrigants scones à l’ail pour bruncher demain avec Chouchou. (Spoiler: nous les trouverons unanimement infects.)

Nous prenons ensuite le métro jusqu’aux jardins du Trocadéro, et plus particulièrement à l’Aquarium de Paris qui abrite la deuxième plus grande collection de méduses au monde. Quand j’ai proposé cette visite à Isa, je pensais vraiment que l’idée ne l’emballerait pas – la méduse est quand même un intérêt spécifique assez « niche » -, mais elle a dit oui tout de suite.

Bien que ce soit un samedi matin, il y a relativement peu de monde. (Peut-être à cause du prix rédhibitoire de l’entrée: pour 27,50€, je peux quasiment passer une journée entière à Pairi Daiza!) Je jette des coups d’oeil polis aux poissons, aux étoiles de mer, aux anémones et autres pensionnaires des premiers bassins. Même si certains sont vraiment très beaux et/ou très intéressants, je ne suis pas venue pour eux, et je les traite à peu près comme l’artiste qui fait la première partie d’un concert. J’applaudis parce qu’il faut bien, mais par-devers moi, j’attends juste que ça se termine.



Enfin, nous pénétrons dans une rotonde bordée d’aquariums tous occupés par des méduses, et je deviens complètement gaga. Je pousse des exclamations ravies, je roucoule tel un pigeon voleur de scone, je leur dis qu’elles sont magnifiques, je m’extasie devant leur niveau de toxicité, je les mitraille avec mon iPad mini en m’étonnant d’obtenir un résultat aussi potable. Je suis émerveillée comme je ne le suis jamais devant des êtres humains (mais présentez-moi un ornithorynque et je ne répondrai plus de rien). Si j’étais seule, je pense que je pleurerais d’émotion. Parce que la nature est sublime et que nous la massacrons un peu plus chaque jour. Je ne suis jamais aussi près d’envisager l’existence de Dieu que lorsque je contemple des animaux.










Après les méduses, il y a un bassin à caresses. Deux règles seulement: se laver les mains à l’eau et au savon avant de les mettre dans l’eau, et ne pas aller vers les carpes koi mais les laisser venir d’elles-mêmes. Moyennant quoi, une flopée de gamins plongent leurs mains pas lavées dans le bassin et gesticulent pour tenter d’attraper les poissons sous le regard ennuyé ou vaguement attendri de leurs parents. Je.

Rien ne me tente vraiment à la boutique, hormis un faux billet orné de créatures marines qui intéresse également Isa. Je mets 2€ dans la machine, qui m’en donne un. Je remets 2€ dans la machine, qui les avale sans rien me donner en échange. Quelques minutes et l’intervention de plusieurs employés sont nécessaires pour obtenir mon dû, qui ornera très joliment une des pages de mon agenda Moleskine.

A ce stade, il est tard et nous avons l’estomac dans les talons. Nous retournons vers la rue Sainte-Anne où j’ai deux restaurants japonais à tester. La file devant l’Omusubi Gonbei est assez dissuasive. Mais lorsque nous tentons notre chance au Bistro Ryukishin chaudement recommandé par plusieurs amies parisiennes, on nous propose aussitôt deux places au comptoir. J’aurais préféré une table, mais tant pis – ça fera encore plus authentique. Je commande un tchintan yuzu sur la carte de saison, et Isa un païtan sésame. Verdict: leurs fameux ramen sont effectivement fameux.

Après ça, nous faisons un tour rapide à la deuxième boutique Fioko Shop (pas mieux achalandée que la première) et allons prendre le dessert chez Tomo qui vend les meilleurs dorayaki de Paris. Je me régale d’un ricotta-yuzu accompagné d’une limonade matcha-yuzu. Oui, le risque que je meure du scorbut est infinitésimal.
Nous repassons ensuite à l’hôtel pour récupérer nos bagages. Isa est la première à partir pour la gare de Lyon. Je traîne encore dans le salon une demi-heure avant de me diriger vers le studio de selfies voisin, où je me sens extrêmement vieille et seule derrière trois groupes de jeunes dont le plus âgé ne doit pas avoir 20 ans. Pour autant, est-ce que ça va m’empêcher de faire l’andouille? Que nenni. Mon tour venu, je sélectionne un format sur la machine, paye avec ma carte et vois avec incrédulité démarrer un compte à rebours de 15 secondes. C’est tout le temps dont je dispose pour retirer mes trois sacs, changer de lunettes, me ruer dans la cabine voisine et prendre ma première pose. Ah, c’est sportif.

Le résultat est… moui bon bof. Mais OK: je voulais tester, et j’ai testé. Je fais encore un tour au Flying Tiger Copenhagen voisin pour y acheter des verres à motifs fraises de la collection de Pâques. Je ne trouve que la carafe; mais c’est bien aussi. Je bavarde un peu avec les vendeurs de la boutique de fringues alternatives dans la rue du Cygne – la jeune fille n’a jamais entendu parler du Grouft où je me fournissais quand j’avais son âge et qui devait se trouver à cent mètres d’ici, bouhouhou. Puis je m’engouffre une dernière fois dans le métro pour me rendre jusqu’à la gare du Nord.


J’ai encore du temps avant de prendre mon train, aussi j’en profite pour dîner en attendant. Faute d’autre resto qui m’inspire dans les environs, j’atterris au Terminus Nord, brasserie mythique que j’avais toujours dédaignée par… snobisme inversé, je pense. C’est une excellente surprise: la salle est vaste, belle et pas trop bruyante à 18h. J’hésite entre un vol-au-vent et les coquillettes à la truffe avant de pencher pour ces dernières, avec un thé au jasmin pour ne pas m’endormir le nez dans mon assiette. A la table voisine, deux rôlistes commentent d’une voix très forte leur dernière partie de Nephilim; je suis partagée entre l’envie de me joindre à la conversation et celle de leur faire remarquer sèchement qu’ils ne sont pas seuls au monde.
Mon voyage de retour se déroule sans incident. J’ai même la chance d’avoir un siège vide à côté de moi, et donc de pouvoir m’étaler à ma guise. Malgré de chouettes moments, ces trois jours à Paris m’ont épuisée, et c’est en assez mauvais état que Chouchou va me récupérer à la gare du Midi. On remet ça en novembre pour Montreuil.
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