Honesty is such a lonely wooooord

Le garçon avec qui j’ai eu ma première relation sérieuse aidait sa mère à voler des palettes vides sur les chantiers le soir, profitait des pubs de type « 5 CD pour le prix d’un seul » pour commander des tas d’albums qu’il ne payait jamais, utilisait des chéquiers trouvés et fraudait allègrement chaque fois qu’il prenait les transports en commun ou le train, sans jamais payer ses amendes ni être inquiété.
Le second de mes ex-qui-ont-compté n’avait pas d’emploi (parce qu’il n’en cherchait pas); il survivait en donnant des cours de maths à des lycéens et… en arnaquant avec son meilleur ami un type un peu barjot auquel ils faisaient croire qu’un homme politique en vue lui confierait bientôt des fonctions importantes.
Le troisième, entrepreneur indépendant, réalisait une grande partie de son chiffre d’affaires en liquide et au noir, et s’est débrouillé pendant de longues années pour ne jamais payer d’impôts sur le revenu.
Le quatrième, enfin, déclarait ne pas posséder de télévision pour ne pas payer la redevance – ce qui, je vous l’accorde, semble un délit bien modeste comparé aux précédents, mais qui était d’autant plus stupide qu’on voyait son poste de la fenêtre donnant sur la rue.
Longtemps, je me suis demandé si j’étais la seule andouille scrupuleuse perdue dans un monde de brigands, ou si une tendance malsaine me poussait à l’insu de mon plein gré vers des types plus ou moins malhonnêtes. Et puis heureusement, j’ai rencontré Chouchou qui va jusqu’à prévenir les vendeuses quand elles lui rendent de la monnaie en trop.
Bon, je ne vais pas me faire passer pour la sainte que je ne suis pas. Quand une caissière d’Ikea ou de la Fnac oublie de me compter un article et que je m’en rends compte, je ne moufte pas, partant du principe que 1/ je ne suis pas responsable de l’erreur, 2/ la perte ne représente qu’une goutte d’eau dans un océan de profits pour ces grandes chaînes. (Si la même chose se produit dans une petite boutique, en revanche, je le signale, parce que je ne veux pas léser quelqu’un qui travaille pour son propre compte.) Il m’est arrivé de ne pas mettre de sous dans un parcmètre si je pensais qu’aucune pervenche ne passerait par là durant mon temps de stationnement, ou de prendre quelques petites libertés avec la loi quand je savais que ça ne nuirait à personne.
Pour le reste, je me considère comme bêtement honnête. Un peu par peur du gendarme, sûrement. Un peu parce que j’ai une conscience aiguë de ce que j’estime bien ou mal, et que quand on aime se maquiller autant que moi, il est tout de même plus pratique de supporter de se regarder dans une glace. Mais aussi, me semble-t-il pour être tout à fait franche, par crainte d’un revers de bâton cosmique. Je ne crois pas en Dieu et ne redoute donc pas de passer l’éternité à rôtir sur une broche; en revanche, la toute petite partie de moi qui ne vénère pas Saint Thomas d’Aquin est assez sensible à la notion de karma. Qui, à bien y réfléchir, n’est pas si irrationnelle que ça. Il est permis d’imaginer que si on se conduit décemment avec les autres, ils feront de même en retour. Je sais que ça ne fonctionne pas toujours ainsi, mais j’aime à croire qu’il arrive des choses bien aux gens bien et que les méchants finissent toujours par être punis d’une façon ou d’une autre. Ce qui est sûrement très naïf de ma part, mais tant pis. Nobody’s perfect, et je pêche déjà suffisamment par excès de cynisme dans d’autres domaines.
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