Les Japonaises de Tokyo portent des micro shorts moulants avec des bottes sous le genou, ou de petites robes taille Empire sur des leggings noirs qui se terminent à mi-mollets par une grosse bande de dentelle. Elles déambulent les pieds en dedans, titubant sur de vertigineux talons pour s’approprier par la ruse les centimètres que la nature leur a refusés. Afin de s’occidentaliser, beaucoup teignent leurs magnifiques cheveux noirs en un châtain roux dépourvu de caractère. Mais leur poitrine menue, leurs hanches étroites, leurs membres déliés, leurs doigts fins et leur peau dorée demeurent indiscutablement asiatiques. Dans le métro ou la file d’attente des restaurants, elles pianotent à la vitesse de la lumière sur leur mobile auquel pend toute une grappe de breloques, dont certaines font deux fois la taille de l’appareil lui-même. Leurs sacs se répartissent en quatre catégories: les Vuitton, les cabas assez spacieux pour transporter un cadavre, les fourre-tout pleins de boucles dans le style bling-bling cher à Gucci, et les petites valises à roulettes. Leur visage peu expressif semble délicatement sculpté dans de la cire. Sous un soleil de plomb, elles trouvent encore le moyen de superposer un T-shirt et un gilet à manches longues sans paraître incommodées le moins du monde. Quadra à l’élégance sobre, punkettes androgynes ou Barbie nipponnes griffées de la tête aux pieds, les Japonaises de Tokyo sont un régal pour les yeux. Elles vont beaucoup nous manquer.