Quand j’ai éclaté en sanglots à la vue d’un orque, j’ai bien été obligée d’admettre que quelque chose ne tournait pas rond.
Ca faisait déjà trois semaines que j’écoutais « Erase » en boucle sur mon iPod en regardant le sud des Etats-Unis défiler par la vitre du Highlander. Trois semaines que des regrets aigus venaient parasiter les pensées qui auraient dû être réservées à un autre. J’ai d’abord voulu croire que c’était le contexte qui ravivait de mauvais souvenirs. Et puis ces larmes, immédiates, débordantes. Ces images qui ne me lâchaient plus.
J’avais au moins une certitude à laquelle me raccrocher. Je ne voudrais sous aucun prétexte être encore avec lui. Nous n’étions pas faits l’un pour l’autre; je suis infiniment plus heureuse et épanouie sans lui, ça ne fait pas le moindre doute. Je n’étais pas en train de souhaiter qu’il me revienne.
Alors pourquoi je n’arrêtais pas de penser à lui, et pourquoi c’était comme un coup de couteau dans le coeur à chaque fois?
La fierté humiliée, bien que réelle et toujours vivace, ne suffisait pas à expliquer ça. C’était comme si, à la lumière de sa trahison finale, je revoyais toute notre histoire sous un jour nouveau. Comme si je revivais chacune des occasions où je m’étais donné du mal pour lui faire plaisir, chacun des sacrifices que j’avais consentis – spontanément ou contrainte et forcée – pour être avec lui, chacune de mes vaines tentatives pour l’atteindre. Et comme si je réalisais enfin à quel point j’étais à côté de la plaque, à quel point je vivais mon histoire toute seule dans mon coin, à quel point c’était sans espoir. Je pleurais sur le sort de cette fille aveuglée par ses sentiments, qui était en train de perdre son temps et de gaspiller ses efforts, de sombrer dans la dépression nerveuse quatre mois par an et dans un ennui morose les huit autres pour essayer de s’attacher un homme inaccessible. Un homme qui dormait dans le même lit qu’elle mais restait à jamais hors de sa portée.
Mais ça faisait quand même plus d’un an qu’on était séparés, et après une période où ma douleur semblait s’être tassée, voilà que le fantôme de mon ex revenait inopportunément à la charge. Pourquoi?