J’aime Paul Auster parce que peu d’écrivains savent sonder l’âme humaine aussi bien que lui.
« Une conscience raffinée à l’excès, une prédisposition à se sentir coupable face à ses désirs entraînaient cet homme de bien à des comportements curieusement sournois, qui déniaient ses propres qualités. Tel est, à mon avis, le noeud de la catastrophe. Il acceptait les faiblesses de tout le monde, mais pour lui-même il exigeait la perfection, une rigueur quasi surhumaine jusque dans les actions les plus insignifiantes. Il en résultait une déception, une conscience accablante de son humaine imperfection, qui l’amenaient à plus de rigueur encore dans ce qu’il exigeait de sa conduite, ce qui à son tour donnait lieu à des déceptions encore plus écrasantes. S’il avait appris à s’aimer un peu mieux, il n’aurait pas eu un tel pouvoir de provoquer le malheur autour de lui. Mais Sachs se sentait assoiffé de pénitence, avide d’assumer sa culpabilité comme celle du monde entier et d’en porter les marques dans sa chair. »
(extrait de « Léviathan »)